Alami Lazraq, bâtisseur et mécène

Côte d’Ivoire, Sénégal, Congo… Alami Lazraq, le patron du groupe marocain Alliances étend son empire immobilier sur le continent africain. Et quand il ne planche pas sur de nouveaux projets, l’homme d’affaires cultive son goût pour l’art contemporain.

Alami lazraq dispose d’un patrimoine estimé à 330 millions d’euros selon Forbes. DR

Alami lazraq dispose d’un patrimoine estimé à 330 millions d’euros selon Forbes. DR

Publié le 8 janvier 2014 Lecture : 4 minutes.

Quand le groupe marocain Alliances avait fait son entrée à la Bourse de Casablanca, en juillet 2008, le succès de l’opération avait sorti de l’ombre son très discret PDG, Alami Lazraq. Depuis, le groupe n’a cessé de se développer et, en dépit de la crise immobilière qui a secoué le royaume quelques mois après son introduction sur la place marocaine, le navire Alliances vogue sereinement. Son capitaine de 63 ans, qui a su tenir solidement le gouvernail, met désormais le cap sur de nouveaux horizons.

Ambitions panafricaines

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Coup sur coup, Alliances vient en effet de s’implanter dans trois pays du continent. D’abord en Côte d’Ivoire, où le groupe a annoncé en novembre la construction de 14 000 logements à Abidjan (10 000 logements sociaux et 4 000 de moyen et haut standings), soit le double de ce qui avait été annoncé un an plus tôt, lors de la signature d’un contrat de partenariat avec le gouvernement ivoirien. Les premières livraisons sont prévues pour le second semestre 2014.

Alami Lazraq rêve d’ouvrir à Marrakech un musée dédié à l’art contemporain marocain et africain.

Au Sénégal, Alliances créera un grand pôle urbain avec 25 000 unités d’habitation à Diamniadio, près de Dakar, pour un montant de 350 millions d’euros (près de 4 milliards de dirhams). Enfin, au Congo, la commune de Kintélé doit voir la construction de 3 250 logements.

Depuis plus d’un an, emboîtant le pas à son compatriote et concurrent Addoha, le groupe a décidé de se tourner vers le reste du continent. « L’expertise marocaine y est très demandée », confie le PDG d’Alliances.

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En plus des trois pays cités plus haut, Alami Lazraq assure être en train d’étudier des demandes émanant notamment du Nigeria, du Gabon, du Cameroun et du Burkina Faso. Et que son objectif est d’augmenter la part du continent (hors Maroc) dans ses revenus : 15 % en 2014, puis de 25 % à 30 % à l’horizon 2016. Outre l’érection de logements, cela passera aussi par la construction d’infrastructures.

Patron et mécène

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Malgré tous ces projets, Alami Lazraq n’a pas que des pelleteuses dans la tête. Un aspect méconnu de sa personnalité est sa passion pour l’art contemporain.

Collectionneur de longue date avec son épouse Farida, notamment d’artistes africains – dont certains très en vue, comme le Béninois Romuald Hazoumé, le Congolais Chéri Samba (RD Congo) ou l’Ivoirien Frédéric Bruly Bouabré -, il a créé fin 2009 la Fondation Alliances, dont la vocation est de financer des activités sociales et de faire du mécénat culturel. Son premier projet a été dévoilé en septembre : un parc d’une douzaine de sculptures monumentales au sein d’Al Maaden Golf Resorts, un complexe de tourisme de luxe d’Alliances, à Marrakech.

« Je suis persuadé que l’art fait partie du contrat social. L’art contemporain accompagne la modernité du Maroc. Il me semblait donc évident de créer une fondation pour contribuer au rayonnement de la culture de mon pays », explique Alami Lazraq. D’autres installations sont prévues dans les prochaines années et un budget important a été consacré à chaque oeuvre, de l’ordre de 100 000 euros pour chacune.

Et ce n’est pas fini : le magnat de la construction rêve d’ouvrir un musée totalement consacré à l’art contemporain – marocain et africain -, toujours à Marrakech, pour un coût estimé à 20 millions d’euros. Inauguration prévue en 2016.

De l’architecture aux affaires

Que de chemin parcouru par cet architecte de formation, diplômé de l’École spéciale d’architecture de Paris, aujourd’hui classé parmi les 50 plus grandes fortunes africaines par le magazine américain Forbes ! Passé par le secteur public en tant que chef d’études au ministère des Habous et des Affaires islamiques (1976) puis directeur général de l’Établissement régional d’aménagement et de construction de Marrakech-Tensift (1978), Alami Lazraq a aussi fait un détour par l’Omnium nord-africain (holding royal, entre-temps rebaptisé SNI), dont il a dirigé le pôle immobilier en 1989.

Son aventure d’entrepreneur a commencé en 1994, avec la création du groupe Alliances. Deux ans plus tard, il concluait une convention d’exclusivité avec Risma, filiale d’Accor, dont Alami Lazraq a accompagné le développement au Maroc, avec la construction de toutes les unités hôtelières de la chaîne française. Vingt ans plus tard, Alliances est un empire diversifié : hôtellerie, promotion immobilière, logements sociaux et intermédiaires, travaux publics…

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À la Bourse de Casablanca, la compagnie a connu une année 2013 morose. Après un plus bas au-dessous des 400 dirhams mi-2013, l’action est légèrement remontée.

Mais cela ne semble pas trop inquiéter le management du groupe. « Le marché financier se comporte depuis quelque temps de manière irrationnelle, ignorant les fondamentaux. Ce n’est d’ailleurs un secret pour personne », expliquait Alami Lazraq en février dernier à la lettre économique Africa Diligence.

Le logement social comme locomotive

Si l’activité immobilière du groupe a souffert du ralentissement du secteur au Maroc, Alliances a tout de même réussi à tirer son épingle du jeu. « Cette résistance s’explique en partie par la diversification menée ces dernières années et par l’importance de l’activité BTP à travers la filiale EMT, juge un analyste de la place. Avec le développement en cours sur le continent africain, les perspectives de croissance d’Alliances restent solides. »

En 2012, la firme affichait un résultat net part du groupe en hausse (78,5 millions d’euros), en dépit d’un léger recul du chiffre d’affaires (359 millions d’euros). Une performance encore tirée par le logement social, véritable locomotive du groupe. « En 2012, ce type d’habitations représentait 50 % de nos revenus et de nos résultats, avec un volume quotidien de 300 ventes en moyenne », avance le PDG. Le déficit en logements sociaux est tel que l’État a tout fait pour encourager, ces dernières années, la construction de nouvelles unités.

Mais la manne n’est pas inépuisable. « Le projet de loi de finances pour 2014 n’a prévu aucune incitation fiscale et, avec le resserrement du crédit, beaucoup de petits promoteurs souffrent », explique William Simoncelli, patron de l’agence de conseil Carré immobilier, à Casablanca. Heureusement, avec ses multiples activités et son carnet de commandes bien rempli, Alami Lazraq a d’autres atouts pour rebondir.

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