Télécoms : le nigérian Tizeti tente sa chance en Afrique francophone  

Fournisseur d’accès à internet via des bornes solaires au Nigeria et au Ghana, Tizeti veut mettre le cap vers la Côte d’Ivoire et le Togo, deux marchés déjà bien occupés.

Kendall Ananyi, CEO de la start-up nigériane Tizeti, fondée en 2012. © Tizeti

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Publié le 11 octobre 2022 Lecture : 3 minutes.

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Télécoms : la revanche des outsiders africains

MTN, Orange, Vodacom, Airtel… Parce qu’ils sont présents sur de nombreux maillons de la chaîne de valeur des télécoms, les mastodontes africains font parfois oublier que d’autres acteurs plus modestes comme Axian, Tizeti ou N+One font tout autant bouger les lignes du secteur et pourraient, à terme, rivaliser d’égal à égal avec le quatuor dominant.

Sommaire

Pour les dix ans de Tizeti, Kendall Ananyi, aux commandes de la start-up nigériane fondée en 2012, a sorti le grand jeu : entre prévisions de croissance, projets d’expansion et entrée en Bourse, cet ancien membre de l’incubateur californien Y Combinator affiche fièrement la couleur. L’entreprise aux 300 employés et 3 884 points d’accès au Nigeria et au Ghana avance ses pions pour se lancer sur deux marchés pourtant déjà bien desservis par les opérateurs de télécoms traditionnels.

Si Tizeti espère ouvrir une brèche au Togo – où l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) appelle les opérateurs de téléphonie mobile et fixe à « améliorer la qualité des services et baisser les prix » –, des concurrents de taille pourraient freiner les ardeurs de la start-up nigériane en Côte d’Ivoire. Orange, MTN et Moov contrôlent les services de l’internet mobile avec respectivement 44,1 %, 35,7 % et 20,2 % de parts de marché au premier trimestre 2022. Selon les données de l’Autorité ivoirienne de régulation des télécommunications (ARTCI), l’opérateur français domine également – et largement – le marché du fixe à hauteur de 97,6 %, suivi par le fournisseur d’accès internet (FAI) français GVA (1,5 %) et le marocain Moov (0,3 %).

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Stabilité financière

« Je ne connais pas Tizeti, je n’ai pas eu l’occasion de me rendre compte de leurs opérations au Ghana et au Nigeria, bien que j’y sois souvent », commente un important acteur des télécoms implanté au Togo et en Côte d’Ivoire. Pourtant, les responsables de la start-up nigériane, qui compte aujourd’hui 2,8 millions d’abonnés, restent optimistes et jugent leur projet d’expansion en Afrique francophone « stratégique » pour l’avenir du continent.

Leurs arguments ? « Le fossé du haut débit en Afrique est encore très élevé. Les opérateurs comme Tizeti doivent s’étendre en veillant à ce que davantage d’Africains aient accès à un réseau internet fiable, abordable et véritablement illimité », explique Kendall Ananyi en marge de la deuxième édition de l’événement annuel Tizeti NextGen 2.0, qui a réuni, en août, les passionnés de nouvelles technologies.

Pionnière de la connectivité internet sans fil en Afrique de l’Ouest, Tizeti achemine son réseau depuis les câbles sous-marins et des terminaux alimentés à l'énergie solaire. © DR

Pionnière de la connectivité internet sans fil en Afrique de l’Ouest, Tizeti achemine son réseau depuis les câbles sous-marins et des terminaux alimentés à l'énergie solaire. © DR

Cofondateur et directeur de l’exploitation de la start-up au chiffre d’affaires évalué à plus de 11 milliards de nairas (près de 26 millions d’euros) sur dix ans, Ifeanyi Okonkwo met en avant la stabilité financière de Tizeti, sa rentabilité au cours de trois des quatre dernières années et le premier dividende versé aux actionnaires en 2021. « Avec une balance positive au cours des dernières années, nous avons le flux de trésorerie disponible pour continuer à investir dans notre réseau et stimuler notre expansion dans les zones mal desservies d’Afrique de l’Ouest, anglophone comme francophone », souligne-t-il.

Gagner en robustesse grâce à Nokia

Pionnier de la connectivité internet sans fil en Afrique de l’Ouest, Tizeti achemine son réseau depuis les câbles sous-marins et des terminaux alimentés à l’énergie solaire. En effet, la start-up nigériane tire profit de la baisse des coûts de développement des panneaux photovoltaïques et de l’importance de sa bande passante pour « commercialiser des forfaits illimités à des tarifs disruptifs pour se démarquer des concurrents », souligne Kendall Ananyi, qui a fait partie des investisseurs de Paystack avant son rachat par l’américain Stripe.

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Une performance solide qui s’est renforcée avec la récente expansion dans plusieurs États, au Nigeria et au Ghana, mais aussi par un rapprochement stratégique avec Nokia. En 2020, Tizeti avait confié à la multinationale finlandaise de télécommunications le renforcement de son réseau internet à l’aide de nouveaux modules radio et routeurs. Objectif : muscler son infrastructure, offrir une connectivité plus robuste, répondre à la demande croissante et aux futures mises à niveau pour évoluer, à terme, vers la 5G. Un choix gagnant puisqu’en 2021 le fournisseur nigérian a « livré plus de 38,648 millions de Go et a multiplié par 2,5 son bénéfice avant amortissement et dépréciation des bénéfices malgré la pandémie, confirme la direction.

Ambitions d’expansion légitimes

« Il y a encore de la place pour la croissance », estime Kendall Ananyi, ex-ingénieur formé au Canada et passé par Microsoft et ExxonMobil. « Le nombre de personnes connectées à l’internet mobile passera de 303 millions en 2020 à 450 millions en 2025 », selon les estimations de l’Association mondiale des opérateurs télécoms (GSMA). D’où les ambitions « légitimes » du patron de Tizeti, qui, convaincu de l’attractivité de sa start-up, œuvre à élargir son dispositif en Afrique de l’Ouest.

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Un positionnement que Kendall Ananyi et ses partenaires comptent acter à travers un appel à l’épargne publique, au Nasdaq (États-Unis) ou au London Stock Exchange (Royaume-Uni), ainsi que sur la place nigériane NGX. Avec un bilan positif et des comptes dans le vert, Tizeti prévoit une offre publique initiale (IPO) sur le marché boursier pour les investisseurs/actionnaires qui pourrait s’étendre aux pays francophones et anglophones de la sous-région.

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