La « consolation » africaine de François Hollande
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Alain Faujas
Alain Faujas est spécialisé en macro-économie.
Publié le 21 mai 2013 Lecture : 3 minutes.
Tombé dans les sondages plus bas que tous ses prédécesseurs à l’Élysée, François Hollande fait l’objet d’accusations récurrentes de mollesse et d’indécision jusque dans les rangs socialistes. Sauf en matière de politique africaine. Car c’est l’Afrique – et elle seule – qui lui vaut l’approbation de ses concitoyens et des médias internationaux. C’est, bien sûr, l’opération Serval et la raclée infligée depuis le 11 janvier aux maquis islamistes au Mali qui est applaudie de Washington à Brive-la-Gaillarde. Les critiques de l’opposition portées par MM. de Villepin ou Juppé ont tourné court devant une victoire éclatante. Des centaines de jihadistes mis hors de combat pour six militaires français tués et la sérénité revenue parmi les populations de Gao et de Tombouctou terrorisées par les islamistes parlent d’eux-mêmes.
Personne n’en a cru ses yeux, car le président français avait déclaré le 12 octobre 2012 devant le Parlement sénégalais : « Le temps de la Françafrique est révolu. » Et, pour rompre avec les compromissions et l’interventionnisme d’un passé critiquable, François Hollande avait affirmé que la contribution de la France à « la résolution de la crise malienne » se ferait sous la forme d’un « appui logistique » pour renforcer « la capacité des Africains à gérer eux-mêmes les crises africaines ».
L’avancée foudroyante des pick-up des jihadistes en direction de Bamako a obligé le chef de l’État à faire fi de ses beaux principes et à ne pas respecter à la lettre les résolutions onusiennes. Il a remisé une certaine naïveté propre aux socialistes français et s’est révélé chef de guerre. Lui qui avait formellement refusé l’envoi de troupes au sol a dépêché à Bamako 4 000 combattants pour rétablir la souveraineté malienne. Lui qui avait critiqué ses prédécesseurs pour leurs opérations militaires en Afrique a fait plus et mieux que Jacques Chirac détruisant l’armée de l’air ivoirienne (en 2004) ou Nicolas Sarkozy envoyant des hélicoptères à Abidjan pour contraindre Laurent Gbagbo à cesser de contester la victoire électorale d’Alassane Ouattara et des Rafale en Libye pour chasser le despote Kadhafi (en 2011).
De nombreux analystes s’amusent de ce retour au réalisme. Des dirigeants africains tenus à distance, il y a quelques mois, ne retrouvent-ils pas l’oreille de l’Élysée, par exemple le président tchadien, Idriss Déby Itno, dont les combattants ont été très appréciés dans les combats du désert malien ?
Face à cette accusation de retour de la Françafrique, le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a répondu dans Jeune Afrique que, « dans le passé […], l’approche officielle française est souvent apparue condescendante. Tantôt utilitariste, tantôt arrogante, quand ce n’était pas les deux. Pour notre part, nous souhaitons une approche d’égal à égal, entre partenaires ».
Il faut porter au crédit du président français qu’il a tout fait pour ne pas imposer de solution au Sahel. Il a joué de bout en bout la carte du multilatéralisme, multipliant les consultations avec l’Union africaine ou la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. La démonstration finale de cette modestie très « hollandaise » est fournie par le premier retour de militaires français, le 9 avril, et par l’adoption à l’unanimité par le Conseil de sécurité des Nations unies, le 25 du même mois, d’une résolution créant une force de maintien de l’ordre de 12 600 Casques bleus pour stabiliser le nord du Mali.
Le président français a eu une autre « consolation » africaine : la libération, le 19 avril, des sept membres de la famille Moulin-Fournier, dont quatre enfants, enlevés en février dans le nord du Cameroun par un groupe islamiste nigérian. Il a certifié qu’aucune rançon n’avait été versée pour cela, conformément à la nouvelle doctrine arrêtée au début de cette année et qui s’oppose à toute forme de versement aux geôliers d’otages français.
Vrai ? Faux ? En tout cas, les apparences d’une libération conforme à ce principe ont été un nouveau succès africain pour François Hollande – qui en est singulièrement privé ces temps-ci…
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