Italie : Cécile Kyenge, un parcours de battante

Ophtalmologue de 48 ans, d’origine congolaise, Cécile Kyenge est le premier ministre noir de l’histoire de l’Italie. Et, malgré les attaques racistes dont elle est la cible, elle assume avec panache ses origine. Retour sur le parcours d’une femme courage.

Cécile Kyenge est la ministre italienne de l’Intégration depuis le 28 avril. © Andreas Solaro/AFP

Cécile Kyenge est la ministre italienne de l’Intégration depuis le 28 avril. © Andreas Solaro/AFP

Publié le 16 mai 2013 Lecture : 3 minutes.

Dans cette salle où elle donnait, le 3 mai, sa première conférence de presse en tant que ministre de l’Intégration du nouveau gouvernement italien conduit par le social-démocrate Enrico Letta, on ne voyait plus qu’elle. Petite coupe afro, peau d’ébène, veste et boucles d’oreilles d’un blanc éclatant, Cécile Kyenge Kashetu (48 ans) n’est manifestement pas une personnalité effacée. À peine avait-elle pris place qu’elle lançait avec aplomb : « Je ne suis pas une femme de couleur, je suis noire. Et je le dis avec fierté. »

Elle renvoyait ainsi dans les cordes ses détracteurs racistes, qui, depuis sa nomination, se déchaînent dans les médias et sur les réseaux sociaux, la traitant de « guenon », de « négresse », de « zouloue » et autres gracieusetés. Mario Borghezio, député européen et membre de la Ligue du Nord – parti réputé pour sa xénophobie -, y est allé de son petit couplet, décrétant qu’elle était « sans doute une bonne femme au foyer, mais pas une ministre ». Il n’avait visiblement pas lu son curriculum vitæ…

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Car la carrière de Cécile Kyenge est aussi fulgurante qu’originale. Ophtalmo­logue de formation (elle est diplômée de l’Université catholique du Sacré-Coeur de Rome et de l’Université de Modène et de Reggio d’Émilie), elle se fait d’abord remarquer en s’impliquant dans des associations de défense des droits des immigrés. Ce n’est qu’en 2004, à l’âge de 40 ans, qu’elle entre en politique.

Elle est élue conseillère municipale de Modène (nord de l’Italie) sous les couleurs des Démocrates de gauche (DS) – aujourd’hui Parti démocrate (PD) -, puis, en 2009, au conseil provincial. Parallèlement, elle fonde le Comité du 1er-Mars, une association qui, dit-elle, « a permis aux immigrés de se faire entendre de manière citoyenne ».

Visages neufs

Aux législatives de février 2013, elle figure en sixième position sur la liste du PD dans la région d’Émilie-Romagne – l’une des plus importantes du pays – et devient députée. Le 30 avril, elle est nommée ministre. « Cette nomination ne doit rien au hasard, elle a été longuement pesée, confie à Jeune Afrique Davide Sardo, membre du PD depuis des années. Notre parti doit montrer des visages neufs. Et puis, l’immigration ayant été l’un des principaux thèmes de la campagne électorale, il fallait montrer qu’il ne tomberait pas dans l’oubli. »

Cécile a connu l’immigration et a représenté les immigrés à travers des associations

La nouvelle ministre a d’ailleurs prévenu : sa première tâche consistera à préparer une réforme instaurant un droit du sol, qui permettra d’accorder la nationalité italienne aux enfants nés de parents étrangers présents sur le territoire depuis plus de cinq ans. « Cécile a connu l’immigration et a représenté les immigrés à travers des associations ; elle possède une expérience incontestable en la matière », ajoute Sardo.

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Mariage

Car, on allait presque l’oublier, l’histoire de Cécile Kyenge, citoyenne italienne par mariage, est aussi celle d’une immigrée. Née à Kambove, dans la province du Katanga, en RDC, elle a quitté le pays à l’âge de 18 ans, se fixant pour objectif de devenir médecin.

On naît africain et on le reste. Peu importe le pays où l’on vit, on est africain pour la vie

Elle l’a atteint, et s’en est fixé d’autres, comme elle l’a expliqué en 2012 à la chaîne Télésud : « Ce qui me donne la force de continuer, c’est l’idée que si nous, Africains, ne sommes pas représentés dans les institutions, là où les décisions sont prises, nous serons les premiers à le regretter. Et ce sera ensuite au tour de nos enfants d’en subir les conséquences. »

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Mère de deux adolescentes, elle s’efforce de retourner chaque année dans son pays natal. Et affirme sans complexe : « On naît africain et on le reste. Peu importe le pays où l’on vit, on est africain pour la vie. »

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