Micmac à Kinshasa

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  • Tshitenge Lubabu M.K.

    Ancien journaliste à Jeune Afrique, spécialiste de la République démocratique du Congo, de l’Afrique centrale et de l’Histoire africaine, Tshitenge Lubabu écrit régulièrement des Post-scriptum depuis son pays natal.

Publié le 14 mai 2013 Lecture : 2 minutes.

Le 15 avril dernier, la capitale de la République démocratique du Congo attendait un tremblement de terre : la chute du gouvernement dirigé par Augustin Matata Ponyo depuis un an. Tous les regards étaient tournés vers le Palais du peuple, siège du Parlement. Le Premier ministre devait répondre à une motion de censure déposée à l’Assemblée nationale par un député de l’opposition, auquel s’étaient joints certains de ses collègues de… la majorité au pouvoir. Il fallait 125 signatures pour que la motion soit validée. Il y en a eu 137. Puis 96, à la suite du désistement d’une flopée d’élus. La motion a donc fait pschitt, comme on dit aujourd’hui. Matata et ses ministres sont repartis pour un tour, le sourire en plus.

Le fin mot de l’affaire, c’est que la motion de censure a été suscitée dans le propre camp du Premier ministre, au sein de la formation politique à laquelle il appartient : le Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD). Original, non ? Imaginez quelques personnages sans foi ni loi, rongés par la kleptomanie, et pour qui l’argent – toujours plus d’argent – reste la valeur suprême. Ces gens-là répètent à l’envi que l’argent, leur dieu, ne circule plus depuis l’arrivée de Matata à la primature. Ils préfèrent le voir atterrir dans leurs poches déjà pleines à craquer plutôt que dans les caisses d’un État qui a le blues. Pour arriver à leurs fins, ils n’ont pas hésité, à force de manigances, de messes basses, de micmacs, à faire un croc-en-jambe à leur propre camarade, l’empêcheur de tourner en rond. Que l’opposition veuille renverser un gouvernement, c’est son rôle. Mais que la majorité se fasse seppuku, c’est abracadabrant, même si la politique, pour aller vite, est l’art des coups fourrés.

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Que voulaient donc les honorables députés ? Notamment une augmentation des salaires des fonctionnaires. De combien pour le moins bien loti ? De quelque 20 dollars, faisant plafonner son salaire à 70 dollars. Et comme l’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, ils ont demandé la hausse de leurs émoluments : à 14 000 dollars, contre 8 000 dollars mensuels tout compris aujourd’hui, alignés sur ceux des sénateurs. Raison invoquée pour obtenir cette rallonge ? Leur qualité d’élus du peuple, qui devrait leur donner droit à un meilleur traitement par rapport aux sénateurs, dont le mandat n’est pas issu du suffrage universel. En cherchant à gagner plus, les députés, qui avaient déjà interpellé le Premier ministre en 2012, oublient que leur pays est dernier sur la liste des nations du monde en termes d’indice de développement humain. Quand proposeront-ils une réduction de ce qu’ils gagnent au profit de la communauté ?

Le 23 avril, le président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku, était l’invité d’une émission diffusée sur la chaîne de télévision publique. Interrogé sur ses priorités à venir dans le cadre parlementaire, il a été on ne peut plus clair : le gouvernement et le Premier ministre doivent savoir que l’Assemblée nationale a un pouvoir de contrôle et d’interpellation pouvant aboutir à de nouvelles motions de censure. Dorénavant, ce pouvoir sera utilisé pour que le Premier ministre et les ministres aient « peur du gendarme ». Tremblez, gouvernement, tremblez : le gendarme arrive !

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