Climat : quand les pollueurs occidentaux snobent l’Afrique

Plusieurs présidents du continent ont dénoncé l’absence des dirigeants des pays industrialisés, pourtant les plus pollueurs, au sommet de Rotterdam sur le soutien de l’adaptation de l’Afrique au changement climatique.

© Damien Glez

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Publié le 6 septembre 2022 Lecture : 2 minutes.

Que l’Afrique des indépendances n’ait pu se repaître, autant que les continents industrialisés, de l’insouciance gourmande des Trente Glorieuses, passe encore. Que l’Afrique ait accepté de s’entendre dire, à l’heure des grandes restrictions annoncées, qu’il serait indécent qu’elle rattrape la goinfrerie industrielle manquée, passe un peu moins. Alors quand les chefs d’État des pays repus de grands discours négligent un sommet destiné à soutenir « l’acclimatation » de l’Afrique au réchauffement de la planète, le sang des leaders du continent ne fait qu’un tour.

C’est au sommet pour l’adaptation au climat en Afrique, ce 5 septembre, à deux mois de la COP27 de Charm el-Cheikh, que les présidents Macky Sall (Sénégal), Nana Akufo-Addo (Ghana), Félix Tshisekedi (RDC), Sahle-Work Zewde (Éthiopie), de même que Moussa Faki Mahamat, à la tête de la Commission de l’Union africaine (UA), ont chacun fustigé frontalement l’absence de leurs homologues des pays dits industrialisés. Une négligence qui reste d’autant plus en travers des gorges du Sud que la rencontre avait lieu en Europe – à Rotterdam –, que les absents représentent les principaux pays responsables de la pollution mondiale et qu’ils ne se font jamais prier, lorsqu’il s’agit de pousser, sur la question climatique, des cris d’orfraie aussi médiatisés que peu suivis d’effet…

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Pleurnicharde, l’Afrique ? Le sentiment d’injustice est légitime, si l’on écoute les propos de Félix Tshisekedi aux Pays-Bas : « Le continent africain est celui qui a le moins d’impact sur le changement climatique, mais c’est celui qui, paradoxalement, subit la majorité des conséquences de ce fléau. »

50 milliards de dollars par an

Mendiant, le continent du Sud ? Si le président en exercice de l’UA affirme que « les principaux pollueurs doivent financer l’adaptation », Akinwumi Adesina, qui dirige la Banque africaine de développement (BAD), tient à rappeler que « les Africains ne sont pas en train de mendier ni d’attendre. Ils mettent de l’argent sur la table », quand bien même le Covid-19 et l’inflation liée à la crise ukrainienne ont étriqué leurs capacités financières. D’ici 2030, les politiques d’adaptation élaborées par les gouvernements africains nécessitent environ 50 milliards de dollars par an, alors que 33 des 54 États du continent font partie des « pays les moins avancés », selon l’ONU.

Certes, lorsque les donneurs de leçons ne sont pas les plus irréprochables et quand ces conseilleurs ne sont pas les payeurs, il est de bon ton de leur tourner le dos, en entreprenant une démarche volontariste patriotique, voire intégrée sur le plan continental. Mais cette question du changement climatique ne pourra être traitée qu’à la dimension du globe. Tout comme l’Afrique, peu polluante – moins de 4 % des émissions mondiales de CO2 depuis 1850 –, tousse en réaction aux gaz à effet de serre des autres continents, les efforts d’un Sud aux marges de manœuvre étroites n’endigueront pas, à eux seuls, les conséquences du réchauffement global.

Or les COP qui négligent les sommets préparatoires thématiques comme Rotterdam se révèlent souvent des grands-messes plutôt stériles. La communauté internationale peine déjà à remplir les objectifs de la COP21, la plus médiatisée, qui s’était tenue à Paris en 2015. Espérons que les pontes de l’hémisphère nord ne snoberont pas la COP27 sous prétexte (inavoué) que celle-ci se tiendra en Afrique.

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