Tchad : Succès Masra n’a pas pu se rendre à sa convocation au tribunal
Le cortège du principal leader de l’opposition tchadienne a dû faire demi-tour alors qu’il se rendait, le vendredi 9 septembre, au palais de justice où le président des Transformateurs était convoqué par le procureur de N’Djamena, la police ayant tiré des grenades lacrymogènes pour disperser les centaines de partisans qui l’accompagnaient.
La police a tiré, le vendredi 9 septembre, des grenades lacrymogènes pour disperser des centaines de manifestants accompagnant le principal leader de l’opposition à la junte militaire au Tchad qui se rendait à une convocation du procureur de N’Djamena.
Succès Masra, 39 ans, président du parti Les Transformateurs, a été rapidement entouré par ses jeunes partisans et poussé dans une voiture avant que le cortège, qui se rendait en direction du palais de justice de la capitale, ne fasse demi-tour dans une atmosphère saturée de gaz lacrymogène.
Ces nouveaux heurts surviennent quelques jours après des manifestation non autorisées et violemment réprimées du parti Les Transformateurs, le plus virulent mouvement d’une coalition de l’opposition politique et de la société civile qui boycotte le dialogue de réconciliation nationale lancé il y a 20 jours par le président de la transition, Mahamat Idriss Déby Itno.
« Respecter l’ordre et ne toucher à rien »
Lors de son accession à la tête de l’État, le chef de la junte avait promis de rendre le pouvoir aux civils dans les dix-huit mois par des élections « libres et démocratiques », à l’issue d’un dialogue national « inclusif », mais ce forum, reporté à de nombreuses reprises, vient tout juste d’entamer ses travaux sur le fond après de nouvelles défections d’organisations de la société civile.
Il était déjà boycotté par la majorité de l’opposition politique et par au moins deux des plus puissants groupes rebelles armés, qui dénoncent un « monologue » de la junte et accusent Mahamat Idriss Déby Itno et les militaires de vouloir se maintenir au pouvoir.
Succès Masra a affirmé avoir reçu le jeudi 8 septembre une convocation du procureur de la République, mais dont le motif ne lui a pas été communiqué.
Le monde est pris à témoin. Ils veulent arrêter le dialogue du peuple par la violence
Dans la matinée du vendredi, il est sorti de son domicile, a assisté à deux prières – musulmane et chrétienne – au milieu de plusieurs centaines de ses partisans. Il les a exhortés à « marcher dignement, à respecter l’ordre et ne toucher à rien », avant de prendre, sous la pluie, la direction du tribunal à la tête d’un long cortège de sympathisants.
Les policiers ont rapidement tiré de nombreuses grenades lacrymogènes, et Succès Masra et ses partisans ont fait demi-tour pour regagner son domicile et siège du parti.
Clôture du DNIS repoussée de dix jours
« Le peuple est sorti nous accompagner au palais de justice, ils nous ont attaqués et tiré à balle réelle », a notamment tweeté le président des Transformateurs, ajoutant : « le monde est pris à témoin. Ils veulent arrêter le dialogue du peuple par la violence ». Il n’a pas été possible de vérifier, de sources indépendantes, l’accusation de tirs à balles réelles.
Le calme était revenu dans l’après-midi autour du siège des Transformateurs, mais le dispositif policier maintenu. Le procureur de N’Djamena, Moussa Wade Djibrine, a assuré avoir accepté la proposition des avocats de Succès Masra de venir le lundi 12 septembre avec leur client honorer sa convocation.
Cette convocation survient six jours après des manifestations réprimées par la police et l’armée, et le siège par les forces de l’ordre du parti des Transformateurs pendant quatre jours. Environ 200 partisans de Succès Masra avaient été interpellés durant ces quatre jours de manifestations dispersées systématiquement à coups de grenades lacrymogènes, puis remis en liberté le 4 septembre.
Vingt jours après son lancement par Mahamat Idriss Déby Itno, les travaux du Dialogue national inclusif et souverain (DNIS) sur le fond viennent à peine de commencer et sa clôture a dû être repoussée de dix jours, au 30 septembre.
À ce stade, les élections promises après une transition de dix-huit mois – en octobre 2022 au plus tard, donc – ont très peu de chance d’être tenues dans ce délai. Le chef de la junte avait toutefois annoncé qu’elle pourraient être reportées de dix-huit mois supplémentaires « si les Tchadiens ne parviennent pas à s’entendre ».
Avec AFP
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