Société civile : engagés contre le Gabon énervant

Militants écologistes, juristes, artistes… Les citoyens sont plus organisés, actifs et réactifs que l’opposition.

Première manifestation du collectif Ça suffit comme ça, en octobre 2011. © AFP

Première manifestation du collectif Ça suffit comme ça, en octobre 2011. © AFP

ProfilAuteur_LaurentDeSaintPerier

Publié le 26 avril 2013 Lecture : 2 minutes.

Le Gabon change-t-il vraiment ?
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Le Gabon change-t-il vraiment ?

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Dans la nébuleuse des associations, fondations et think tanks, une petite galaxie d’ONG très organisées milite au Gabon pour la moralisation des affaires et de la vie politique. Leurs voix couvrent souvent celles des ténors de l’opposition, leurs recommandations rivalisent d’intransigeance avec les revendications des partis les plus radicaux. Transparence, gouvernance, État de droit, justice et démocratie, tel est le glossaire de ces poils à gratter de la République, qui, lassés du tout « Gabon émergent », enragent contre « le Gabon énervant ». Unis au sein de coalitions aux noms sans ambiguïté, Publiez ce que vous payez (PCQVP) ou ça suffit comme ça (CSCC), ces militants associatifs représentent un contre-pouvoir grandissant. Et si l’État semble avoir renoncé à les contrôler, de nombreux litiges se règlent encore régulièrement au palais de justice.

Le 29 mars, Marc Ona Essangui, président de l’ONG Brainforest, très populaire depuis qu’il a obtenu la révision du contrat d’exploitation du fer de Belinga, a été condamné à six mois de prison avec sursis, assortis d’une amende de 200 000 F CFA (305 euros) et du paiement de la somme de 5 millions de F CFA au plaignant Liban Soleman, chef du cabinet présidentiel. « Olam Gabon [filiale de la multinationale singapourienne, NDLR] est le business d’Ali Bongo et Liban Soleman », avait lancé Ona Essangui lors d’un débat sur TéléAfrica en novembre 2012.

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Défiance

Solidaire, Georges Mpaga, président du collectif ROLBG et porte-parole de CSCC, fulmine : « Nous sommes engagés dans une défiance totale ! » En 2009, Ona Essangui, Mpaga et trois autres militants avaient passé quelques jours en prison, mis en examen pour incitation à la révolte à la suite d’une plainte de la Fondation Omar Bongo Ondimba. Mpaga précise que c’était la conséquence de leur soutien aux démarches, devant les tribunaux français, des ONG Transparency International, Sherpa et Survie contre les familles dirigeantes gabonaise, congolaise, angolaise et équato-guinéenne dans l’affaire des « biens mal acquis ».

Autre hérault d’une société civile en fin de compte très politisée, l’avocate Paulette Oyane Ondo a fait du terrain judiciaire son champ de bataille. Ex-députée, ex-ministre et ex-membre du parti présidentiel, elle a notamment attaqué le groupe français Eramet pour l’obliger à réparer les dégâts liés à l’exploitation du manganèse dans le Haut-Ogooué. L’an dernier, elle est également allée en justice contre l’État lorsque celui-ci a démoli le bidonville librevillois de Sotega sans avoir relogé ses habitants.

Ali’9

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Georges Mpaga reconnaît que le pouvoir n’empêche pas la société civile de s’organiser et de s’exprimer. Ainsi, le dessinateur Pahé, après son décapant Ali’9, roi de la République gabonaise, publié fin 2010 et réédité en 2012 (avec une préface « signée par le président himself »), a sorti l’an dernier un album non moins corrosif, Laissez-nous avancer !, tout en regrettant que la plupart des rédactions n’osent pas publier ses dessins.

Une frilosité qu’illustre l’indice de pérennité des organisations de la société civile établi en 2012 par l’Agence américaine pour le développement international (USAID). Le Gabon y est classé au 19e rang sur 23 pays africains étudiés, en raison de « lois obsolètes, intimidations, manque de viabilité financière »… Toujours selon l’USAID, « certaines organisations de la société civile critiques à l’égard du gouvernement reçoivent des menaces de dissolution ou des menaces personnelles à l’encontre de leurs directeurs »

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