Côte d’Ivoire : les chemins de la guérison

MARWANE-BEN-YAHMED_2024

Publié le 28 avril 2013 Lecture : 2 minutes.

La Côte d’Ivoire émerge à peine d’un long traumatisme que nous lui enjoignons déjà de mettre un terme définitif à sa convalescence. Est-ce si simple ? Depuis la mort d’Houphouët-­Boigny, la fièvre s’est emparée d’elle, et son état n’a alors cessé d’empirer, alternant, de la chute d’Henri Konan Bédié fin 1999 à la crise postélectorale qui s’est achevée il y a précisément deux ans, les périodes de rémission et d’espoir avec celles, plus nombreuses, de sévères rechutes et d’inquiétude. Une décennie d’errance, de soins plus ou moins adaptés prodigués par une cohorte de médecins pas toujours bien intentionnés ou incompétents.

Les virus – la haine, l’ivoirité, le culte du mensonge, de la vengeance et de la rouerie – n’en ont eu que plus de répit pour s’incruster et s’adapter aux différents traitements pratiqués. La Côte d’Ivoire perd du temps, comment ne pas le reconnaître ? Mais elle ne pouvait vraiment pas sortir de tout cela indemne, et les naïfs appels à une réconciliation qu’il suffirait de décréter ne sont qu’incantations stériles. Il lui faudra des décennies pour oublier et se reconstruire. Elle doit en revanche tout mettre en oeuvre pour que l’Histoire ne se répète plus. 

la suite après cette publicité

Certains trouveront cette enquête consacrée au bilan des deux années qu’a passées Alassane Ouattara (ADO) à la tête de la Côte d’Ivoire pour le moins sévère. Ils n’auront pas tout à fait tort si l’on s’en tient au chemin parcouru depuis ce 11 avril 2011 qui vit Laurent Gbagbo être extirpé du réduit dans lequel il s’était réfugié avec le dernier carré de ses fidèles. Il faut se souvenir d’Abidjan à feu et à sang, de ses rues jonchées de cadavres, des centaines de femmes violées par des miliciens ivres de rage. La mort qui rôde à chaque coin de rue, les remugles d’une ville aux allures de cimetière. Le cercle infernal de la vengeance, enfin, celle des parias d’hier devenus les puissants d’aujourd’hui nourrissant elle-même le ressentiment de ceux qui ont tout perdu avec la chute de leur mentor et rêvent toujours de revanche. L’ampleur de la tâche à laquelle est confrontée ADO devrait inciter à la mansuétude… 

Cette relative sévérité n’est, à vrai dire, que le reflet d’une exigence à la mesure des immenses attentes suscitées par l’élection d’Alassane Ouattara. Laurent Gbagbo a incarné cette espérance en son temps. Mais le fils de Marguerite et de Zézé Koudou Paul a préféré les habits de chef de clan à ceux de chef de la nation. Pour la première fois, donc, depuis la mort d’Houphouët, la Côte d’Ivoire a un homme d’État à sa tête. Un homme compétent, capable de reconstruire, de créer de la richesse plutôt que de siphonner les caisses, et, espérons-le, de mieux la répartir. Un esprit brillant et ouvert sur le monde, ce dont son pays a plus besoin que ne le croient les chantres d’une Afrique repliée sur elle-même. Autant de raisons, en somme, de vouloir le meilleur, après le pire.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires