WikiLeaks – Algérie : quand Bouteflika négociait avec Carlos
Dans un câble diplomatique daté du 23 décembre 1975, Richard Bordeaux Parker, l’ambassadeur américain à Alger, note que son homologue autrichien à Alger qualifie la gestion par les Algériens de l’opération de la prise d’otages à Vienne, puis à Alger d’« efficace, détendue et très cool ». Et Abdelaziz Bouteflika, alors ministre des Affaires étrangères ? « Il a fait du bon boulot et renforcé sa réputation en gérant cette affaire de manière magistrale, que ce soit avec les pirates de l’air ou la presse », ajoute le diplomate américain.
Deux jours plus tôt, six terroristes, conduits par Ilich Ramirez Sanchez, plus connu sous le nom de Carlos, font irruption dans l’immeuble qui abrite l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) en Autriche. Ils prennent de nombreux otages, dont onze ministres du Pétrole. Après avoir libéré une vingtaine de personnes, les terroristes s’envolent vers l’Algérie.
Le 22 décembre, deux heures après l’atterrissage du DC-9, l’ambassadeur Parker, citant la radio algérienne, expédie un télégramme faisant état d’une rencontre « entre l’un des terroristes et le ministre algérien Bouteflika dans le salon VIP de l’aéroport ».
Ambulance
Dans l’après-midi, l’ambassade américaine à Vienne indique dans un mémo que le président Boumédiène confirme au chancelier autrichien Bruno Kreisky que les négociations seront menées par Bouteflika, secondé par le ministre de l’Intérieur et le directeur de la police nationale.
Tandis que « deux terroristes sortent de l’avion » et qu’un troisième, Hans-Joachim Klein, blessé à Vienne, est évacué « par ambulance » vers un hôpital d’Alger, des discussions s’engagent avec le chef de la diplomatie algérienne. Au bout de cinq heures, Carlos accepte de libérer trente otages. Il détient encore plusieurs ministres et réclame un avion spécial pour atteindre une destination inconnue.
À 22 h 40, un mémo signé par le secrétaire d’État américain Henry Kissinger confirme que l’avion a quitté Alger « avec des ministres otages à son bord », probablement vers Tripoli ou Benghazi.
À Tripoli, Kadhafi se montre moins conciliant que les Algériens. Lorsque Carlos demande du kérosène pour gagner l’Arabie saoudite, le « Guide » libyen exige qu’il commence par libérer ses compatriotes. Les négociations capotent. Au bout de plusieurs heures, l’avion décolle de Tripoli et tente d’atterrir à Tunis. Bourguiba lui en refuse l’autorisation. Retour à Alger, où Bouteflika reprend les discussions. Cette fois avec succès. Le 23 décembre, un câble annonce que « tous les otages ont été libérés et que les terroristes se sont rendus aux autorités algériennes ».
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