Corée du Nord : le vassal indocile

L’essai nucléaire de la Corée du Nord, le 12 février, a agacé la Chine. De là à imaginer une rupture, il y a un pas qu’il serait aventureux de franchir.

Manifestation à Pyongyang, après le nouvel essai nucléaire. © KCNA/Reuters

Manifestation à Pyongyang, après le nouvel essai nucléaire. © KCNA/Reuters

Publié le 11 mars 2013 Lecture : 3 minutes.

À Pékin, en plein nouvel an chinois, l’essai nucléaire nord-coréen du 12 février a fait l’effet… d’une bombe. La République populaire avait en effet mis en garde son voisin contre une nouvelle provocation. Mieux, elle espérait renouer avec le régime de Kim Jong-un une relation de confiance. Or l’explosion souterraine a eu pour cadre le site de Punggye-ri, à moins de 100 km de la frontière chinoise !

« Les nominations au bureau politique du Parti communiste de deux experts supposés de la Corée du Nord, Li Keqiang [qui deviendra Premier ministre en mars ; NDLR] et Zhang Dejiang [diplômé de l’université Kim Il-song, à Pyongyang], étaient la promesse d’une nouvelle ère dans les relations sino-coréennes. On voit bien qu’il n’en est rien, et que la Chine est agacée », commente Jean-Pierre Cabestan, de l’université baptiste de Hong Kong.

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« Il y a beaucoup de discussions d’intellectuels, notamment sur les réseaux sociaux et sur internet, explique l’analyste politique He Liang Liang. On peut y lire des critiques ouvertes contre la Corée du Nord, ce qui est nouveau ; mais aussi des manifestations de soutien, notamment sur la question des essais nucléaires, venant de l’extrême gauche postmaoïste. »

Des dissensions se font jour au sommet de l’État. La proximité idéologique entre les conservateurs du régime et la dictature de Pyongyang reste une réalité. Pourtant, si les deux pays sont assurément des alliés, ils ne sont pas des amis. Avant de mourir, Kim Jong-il, qui se méfiait de Pékin, avait d’ailleurs tenté de se rapprocher de Moscou. En matière économique, la Chine appelle pour sa part de ses voeux une évolution « à la chinoise » de son voisin.

Tutelle

Quatre-vingts pour cent des importations nord-coréennes passent déjà par la République populaire, qui se verrait bien exercer une tutelle, au moins économique, sur Pyongyang. C’est le rôle dévolu à Li Keqiang et Zhang Dejiang, deux hommes qui ont longtemps travaillé dans les provinces frontalières, par où transite le commerce entre les deux pays.

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Après la surprise et la condamnation que l’essai nucléaire nord-coréen a provoquées à Pékin, la presse officielle a rapidement mis de l’eau dans son vin. Plutôt que de critiquer Pyongyang, elle préfère jeter l’opprobre sur Washington, accusé de mettre de l’huile sur le feu. C’est le cas par exemple de l’agence Chine nouvelle, qui estime qu’il est temps d’« identifier les vrais responsables » de la course aux armements. Porte-parole du régime communiste, Le Quotidien du peuple va plus loin et met directement en cause les États-Unis.

Imprévisible

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« Il faut s’attendre à un durcissement des positions, estime Jean-Pierre Cabestan. D’abord, parce que le président Xi Jinping est plus nationaliste que son prédécesseur. Ensuite, parce que son principal objectif est d’éviter que les États-Unis et, dans une moindre mesure, le Japon et la Corée du Sud ne s’en prennent à la Corée du Nord, ce qui risquerait de provoquer une crise majeure. »

Le problème est que les dirigeants de ce pays sont imprévisibles. « Ils sont en train de démontrer qu’ils se fichent complètement de la Chine, commente encore He Liang Liang. Tous nos efforts pour les calmer ne marchent pas. J’ai l’impression que la Chine n’a plus aucune influence sur eux. Ils doivent se dire que, de toute façon, elle ne fera rien contre eux parce qu’elle veut par-dessus tout éviter une implosion du régime. Cet essai nucléaire avait pour seul objectif de faire peur aux Américains. »

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