Corée du Sud : l’inquiétant « Mister Yu »

Faux transfuge, il travaillait au service des réfugiés de la ville de Séoul et transmettait à Pyongyang des informations ultraconfidentielles.

Le Hanawon, centre d’insertion des réfugiés nord-coréens, à Ansung. © AFP

Le Hanawon, centre d’insertion des réfugiés nord-coréens, à Ansung. © AFP

Publié le 4 février 2013 Lecture : 2 minutes.

Yon-ju est inquiète. Arrivée en Corée du Sud en 2007, cette réfugiée nord-coréenne économise depuis des mois pour que sa mère et sa soeur puissent la rejoindre. « J’ai déjà payé les passeurs mais, avec cette histoire d’arrestation, tout est remis en question. Jusqu’ici, il n’y avait pas de preuve tangible de ma défection. À présent, le régime va pouvoir faire pression sur ma famille. J’ai peur. »

Pour Yon-ju comme pour les vingt-cinq mille Nord-Coréens réfugiés au Sud, la récente arrestation d’un transfuge soupçonné d’espionnage au profit du régime de Pyongyang est une véritable catastrophe. L’homme, que les services secrets sud-coréens appellent simplement Mister Yu, a fait défection en 2004 et a subi sans difficulté tous les interrogatoires des services de sécurité. Les responsables du Hanawon, le centre chargé de l’insertion des réfugiés, voyaient même en lui un « transfuge modèle » qui s’était adapté en un temps record à la vie au Sud. Après des études à l’université, Mister Yu avait travaillé dans une entreprise privée, puis décroché un emploi au service des réfugiés de la municipalité de Séoul. Un poste d’observation idéal pour cet ancien chirurgien de 33 ans qui, depuis deux ans, a pu rencontrer tous les transfuges que compte le pays et accéder à leurs dossiers ultraconfidentiels : son travail consistait justement à réunir des informations sur leur passé au Nord !

C’est moche ! Maintenant, ils vont croire que nous sommes tous des espions.

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Depuis l’arrivée de Kim Jong-un au pouvoir, il y a un an, la surveillance de la frontière septentrionale avec la Mandchourie chinoise, passage obligé des transfuges pour quitter leur patrie, a été renforcée, et le nombre de réfugiés a diminué. L’affaire, qui survient à la veille de l’investiture, le 25 février, de Park Geun-hye, la nouvelle présidente sud-coréenne, est embarrassante pour Séoul, dont la politique d’accueil des Nord-Coréens est l’objet de violentes critiques. Les réfugiés reprochent au gouvernement de les ghettoïser et de pratiquer un accueil quelque peu discriminatoire : les ex-apparatchiks du régime communiste, censés disposer d’informations secrètes, seraient favorisés au détriment des citoyens « ordinaires ». « C’est moche, conclut amèrement Yon-ju. Les Sud-Coréens avaient déjà du mal à nous accepter. Maintenant, ils vont se convaincre que nous sommes tous des espions ! »

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