France : le feuilleton judiciaire continue pour Charles Pasqua

À peine l’ancien ministre français de l’Intérieur était-il condamné dans l’affaire d’une fondation d’art que s’ouvrait, le 21 janvier, le procès « Pétrole contre nourriture ».

Charles Pasqua comparaît à nouveau devant la justice depuis le 21 janvier. © Reuters

Charles Pasqua comparaît à nouveau devant la justice depuis le 21 janvier. © Reuters

ProfilAuteur_LaurentDeSaintPerier

Publié le 28 janvier 2013 Lecture : 3 minutes.

De l’art à l’or noir, des Hauts-de-Seine aux rives du Tigre… Le 21 janvier, Charles Pasqua s’est livré à une acrobatie judiciaire. Condamné ce jour-là à deux ans de prison avec sursis pour prise illégale d’intérêts dans l’affaire de la fondation d’art Hamon, il n’a pu se rendre à Versailles pour entendre la sentence. Il devait être à 13 h 30 à la barre des prévenus, au palais de justice de Paris, où s’ouvrait le procès « Pétrole contre nourriture », une affaire de malversations financières entre Paris et Bagdad dans laquelle il est également poursuivi. Le sixième gros dossier pour lequel il est mis en examen depuis 2001.

Détournements de fonds, pétrole, armes, casino… Le parcours judiciaire de ce fils de policier corse, longtemps proche de Jacques Chirac et qui fut député, ministre de l’Intérieur, président de conseil général et sénateur, a de quoi surprendre. Relaxé quatre fois, il avait reçu une première sanction en 2009 dans l’affaire du casino d’Annemasse : dix-huit mois de prison avec sursis pour avoir touché 1,15 million d’euros lors de la revente de l’établissement, somme qui avait servi à financer sa campagne des élections européennes de 1999. Il vient donc d’écoper d’une deuxième condamnation pour avoir détourné des fonds du Syndicat mixte de l’Île-Saint-Germain (SMISG), une structure qu’il présidait et chargée de la construction, avortée, d’un musée contre une donation de 192 oeuvres d’art du milliardaire Jean Hamon. Prochain round en cour d’appel.

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Voûté

Sur le front irakien, le combat promet d’être rude. Ce 21 janvier au palais de justice, le vieil homme de 85 ans n’était plus que l’ombre du féroce tribun de la droite française, voûté, le cheveu très blanc et la peau parcheminée. Mais l’oeil restait goguenard et un sourire à la Fernandel lui fendait toujours le visage quand il a traversé la cohorte des photographes et des caméramans pour aller comparaître. Plus bougon à l’issue de l’audience, il a lancé aux journalistes un « venez voir dans ma cave s’il y a des barils ! ».

Comme l’affaire Elf et l’Angolagate (dans lesquels il a été relaxé), ce cru judiciaire aux arômes d’hydrocarbures est issu du terroir de la diplomatie parallèle, fermenté à l’ombre des guerres lointaines. Avec Bernard Guillet, l’un de ses coaccusés et ancien conseiller diplomatique, Pasqua est soupçonné d’avoir « sollicité des allocations de barils irakiens » en échange d’actions de lobbying auprès du ministère des Affaires étrangères, de députés et de sénateurs, destinées à obtenir des autorités françaises la levée de l’embargo. Fin 1996, la résolution 986 du Conseil de sécurité des Nations unies, dite « Pétrole contre nourriture », était mise en oeuvre pour subvenir aux besoins essentiels de la population irakienne, durement éprouvée par l’embargo total imposé après la première guerre du Golfe en 1990-1991.

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Le programme prévoyait l’exportation limitée de pétrole pour acheter les médicaments, la nourriture et les produits de première nécessité. Mais Saddam Hussein et sa clique étaient parvenus à détourner une partie des bénéfices à leur profit en récompensant, en barils de brut, des personnalités complices manoeuvrant en coulisses pour une levée des sanctions. Soupçonné d’en faire partie, Charles Pasqua aurait reçu entre 750 000 et 2,2 millions d’euros. La ligne de défense de l’ex-ministre : son nom a été utilisé à son insu. Le procureur avait alors reçu l’argument et requis le non-lieu, mais le juge Courroye, qui instruisait le dossier, a fait la sourde oreille. Sera-ce l’ultime combat judiciaire de l’ex-premier flic de France

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