Hip hop : Sa Majesté Oxmo Puccino

Bien accueilli par la critique et le public, le dernier album d’Oxmo Puccino, natif de Bamako, vient d’être nominé, en France, aux Victoires de la musique.

Oxmo Puccino sera aux Victoires de la musique, le 8 février. © AFP / Pierre Verdy

Oxmo Puccino sera aux Victoires de la musique, le 8 février. © AFP / Pierre Verdy

ProfilAuteur_SeverineKodjo

Publié le 23 janvier 2013 Lecture : 3 minutes.

Et si l’histoire se répétait ? Couronné d’une Victoire de la musique pour son précédent opus L’Arme de paix, sacré meilleur album de musique urbaine en France en 2010, Oxmo Puccino pourrait bien de nouveau se voir récompensé le 8 février prochain pour Roi sans carrosse. Salué par la critique, bien accueilli par le public, ce sixième album s’est écoulé à près de 35 000 exemplaires depuis sa sortie en septembre 2012 et mène Oxmo Puccino sur les routes de France et de Navarre pour une longue et trépidante tournée qui se terminera le 1er juin sur la scène du Zénith parisien. Une consécration pour ce natif de Bamako aux talents multiples qui, par ailleurs, travaille à l’écriture d’un scénario pour le cinéma, d’un livre pour enfants et, à pas encore 40 ans, de ses Mémoires. Déjà ? Il faut dire que l’artiste écume les salles et les scènes depuis plus d’un quart de siècle et que le Black Mafioso a rencontré le succès dès ses débuts avec notamment, en 1998, le tube « Mama Lova » tiré de son premier album, Opéra Puccino, alors disque d’or.

Saudade

la suite après cette publicité

En compagnie des Jazz Bastards, le fameux Lipopette Bar l’a entraîné en 2006 vers des contrées davantage musicales. Ce que confirme Roi sans carrosse, composé lors d’un voyage au Brésil. « La bossanova et la saudade, cette alliance de joie et de tristesse qui représente la vie, m’ont fortement influencé, reconnaît l’artiste. Avec cet album, mon univers musical se précise. Il semble plus léger, mais il n’en est pas moins dense pour autant. C’est un voyage émotionnel qui représente une tranche de ma vie. » Avec une orchestration à forte dominante acoustique et un groove doux-amer faisant la part belle aux cordes, Roi sans carrosse est empreint de cette poésie lapidaire qui caractérise le flow du plus parisien des rappeurs maliens.

Rosa Parks

Évoquant la paternité (« Un an moins le quart »), le deuil (« Le Vide en soi »), celui qui, jusqu’à présent, a fait la part belle à la fiction narre de moins en moins de fables mais raconte de plus en plus ses histoires. Une intimité qu’il veut « universelle ». « La vie, la mort, ce sont des expériences partagées par chacun d’entre nous », commente celui qui a perdu un frère en 2007. Une ode à la capitale parisienne (« Pam Pa Nam »), un hommage au combat d’un Spartacus ou d’une Rosa Parks (« Parfois »), en formidable griot urbain engagé, celui qui revendique des « textes emplis de philosophie africaine avec des expériences parisiennes » évoque le fléau du racisme et la nécessité de poursuivre un combat toujours d’actualité afin que chacun puisse « être en harmonie avec son africanité ». « Malheureusement, explique-t-il, cela demeure difficile pour certains tant l’image des Noirs que l’Occident a fabriquée a été dévastatrice. Il n’y a pas si longtemps, il y avait encore des zoos humains en France. Cela a imprégné les esprits, et aujourd’hui ce pays doit accepter toute son histoire pour se comprendre lui-même. »

Accepter ce que l’on est, pleinement. Un conseil que l’artiste prodigue à tous, y compris aux jeunes artistes africains qu’il a pu rencontrer à Bamako, il y a deux ans, lors de la dernière édition du festival littéraire Étonnants Voyageurs. « L’Afrique a toujours eu beaucoup de poésie à offrir. Or les jeunes, aujourd’hui, craignent parfois de se tourner vers elle par peur de retrouver une tradition qu’ils cherchent à fuir à travers la musique moderne, comme le rap. C’est pourtant en intégrant cette poésie ainsi que les tendances musicales locales que les rappeurs africains parviendront à créer leur propre univers. Des talents, en Europe comme en Afrique, il y en a beaucoup, mais malheureusement ils n’auront pas toujours les moyens de s’exprimer. Ce sont des "rois sans carrosse". Je leur rends hommage. »

la suite après cette publicité

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires