Algérie : Hamza Bendelladj, cracker indécryptable

Soupçonné par le FBI d’avoir dérobé plusieurs millions de dollars à quelque 217 banques et établissements américains, le jeune pirate informatique Hamza Bendelladj, arrêté à Bangkok, ne laisse d’intriguer.

Hamza Bendelladj est originaire de Kouba, quartier populaire sur les hauteurs d’Alger. © AFP

Hamza Bendelladj est originaire de Kouba, quartier populaire sur les hauteurs d’Alger. © AFP

Publié le 30 janvier 2013 Lecture : 4 minutes.

Génie de l’informatique et escroc de haut vol ou pirate de pacotille doublé d’un fanfaron ? L’Algérien Hamza Bendelladj aura, le 6 janvier, eu droit à son quart d’heure de célébrité. Menottes aux poignets, sourire aux lèvres, l’informaticien de 24 ans fait la une de la presse internationale après son arrestation par la police à l’aéroport Suvarnabhumi de Bangkok, en Thaïlande.

Objet d’un mandat d’arrêt délivré par une cour de justice américaine, Hamza Bendelladj figure, selon la police thaïlandaise, dans le top 10 des personnes les plus recherchées par le FBI. Mieux, il ferait partie d’un réseau constitué des vingt plus grands cybercriminels du monde, qui auraient détourné plus de 100 millions de dollars au cours des six dernières années. Bigre ! Présenté en conférence de presse le lendemain, le jeune cracker, hilare face aux caméras et au milieu des policiers, a suscité une avalanche d’articles. Voilà pour le quart d’heure de gloire.

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Pour les ennuis, ils sont sérieux et gros. Dans les bagages de Hamza Bendelladj, marié et père d’un enfant, les services de l’immigration thaïlandais ont découvert deux ordinateurs portables, un téléphone cellulaire, une tablette Microsoft, des disques durs et autres bidules informatiques. Bref, de quoi braquer les banques à distance. Si le matériel ne constitue pas pour l’heure des pièces à conviction – les experts du FBI attendent de « faire parler » les ordinateurs -, sa présence dans les valises du jeune homme laisse à penser que micros et autres disques sont à tout le moins de précieux outils de travail pour ce cracker présumé.

Traqué depuis trois ans par le FBI, Hamza Bendelladj est soupçonné d’avoir dérobé plusieurs millions de dollars à pas moins de 217 banques et établissements américains. Réclamé par un tribunal de Géorgie, dans le sud des États-Unis, il devrait être extradé pour y être jugé. À l’origine de la notice d’arrestation, le FBI refuse de commenter la moindre information concernant le cas de ce pirate d’origine algérienne. « Nous ne pouvons pas communiquer sur le sujet car l’affaire fait encore l’objet d’investigations », se justifie, dans les colonnes du journal The Christian Science Monitor, une porte-parole de l’antenne du Federal Bureau du Georgia Northern District. En attendant son plus que probable transfert vers les États-Unis, Hamza croupit dans une prison à Bangkok.

Aveux

Aux policiers qui avaient procédé à son interpellation, Hamza a fait des débuts d’aveux, bien qu’il soit impossible à ce stade de savoir si le jeune fait le kéké ou s’il est réellement un pirate de génie. « Il nous a dit qu’il avait piraté plusieurs banques américaines et qu’en une seule transaction il pouvait ramasser entre 10 et 20 millions de dollars », révélera un responsable de la police thaïlandaise. Ces opérations présumées de hacking, d’intrusion et de siphonnage – des crimes passibles de plusieurs années de prison aux États-Unis – se sont déroulées entre décembre 2009 et septembre 2011.

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C’est à l’aide d’un logiciel malveillant dénommé SpyEye que le cracker, qui utilise les pseudonymes BX1 ou Daniel HB, s’introduirait dans les ordinateurs des banques ou des particuliers pour récupérer les mots de passe et les codes d’identification. Une fois avoir pris le contrôle d’un compte, il serait en mesure de le vider en deux ou trois clics de souris.

Hamza a mené la belle vie en claquant son argent sans compter, voyageant en première classe et séjournant dans des palaces de luxe.

Dans le monde secret et opaque des pirates, où personne n’opère jamais sous son véritable nom, Hamza s’est créé une autre identité et une nationalité étrangère. Il s’est ainsi fait faire une carte internationale d’étudiant de l’université de Sutton, en Grande-Bretagne, alors qu’il n’y a jamais été admis. Ainsi qu’une autre carte (carte d’identification internationale !) sur laquelle le jeune homme, né le 3 juin 1988, s’appellerait Hamza Daniel Bendelladj et serait de citoyenneté « britannique ». Faux papiers bien entendu. Mais il semble que ces documents ainsi que la nationalité britannique ne soient pas les seuls éléments troublants.

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Troublant

Originaire de Kouba, quartier populaire sur les hauteurs d’Alger, prétendument titulaire d’une licence en informatique, polyglotte maîtrisant, semble-t-il, cinq langues, Hamza a mené la belle vie en claquant son argent sans compter, voyageant en première classe et séjournant dans des palaces de luxe aux quatre coins du monde. Une vie de millionnaire pour un jeune garçon dont la famille vit dans une misère noire ? Selon la police thaïlandaise, Hamza, né donc en 1988, aurait obtenu son diplôme d’informaticien dans une université d’Alger en 2008, c’est-à-dire à l’âge de 20 ans. Enfant très précoce ou génie, il aurait donc passé son bac à l’âge de 16 ans. Or sa famille en Algérie affirme qu’il est d’extraction modeste, que sa scolarité s’est arrêtée à la troisième et qu’il a appris l’informatique plutôt dans les cybercafés que dans les amphis.

Autre élément troublant, sa notice de recherche. Après vérification sur le site officiel du Federal Bureau, le nom de Hamza Bendelladj ne figure sur aucun listing des personnes recherchées par le FBI. Comment se fait-il alors que la police thaïlandaise soutienne qu’il est l’un des dix hackers les plus recherchés par les Fédéraux ? Escroc de haut vol ou pirate de supérette, Hamza Bendelladj aura tout de même connu son quart d’heure de gloire.

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