Livre : un dictionnaire des réformateurs musulmans par Malek Chebel
« Jeune Afrique » plonge dans le dernier ouvrage de Malek Chebel, « Changer l’Islam. Dictionnaire des réformateurs musulmans des origines à nos jours », à paraître le 31 janvier.
Qui trop embrasse mal étreint. Voilà qui pourrait résumer en cinq mots l’impression que laisse la lecture du dernier ouvrage de l’islamologue Malek Chebel. L’anthropologue algérien déploie depuis près de trois décennies une oeuvre prolifique autour du couple islam-modernité. Quelle est donc la place de ce Dictionnaire des réformateurs musulmans des origines à nos jours dans le projet « chebelien » ? S’agit-il de vulgariser un savoir sur l’islam et d’apporter la contradiction aux préjugés tenaces sur la deuxième religion de France ? L’introduction le laisse entendre.
Mais en choisissant de rassembler pêle-mêle des trajectoires aussi diverses que celle du théologien de l’âge classique Al-Ash’ari, de l’idéologue des Frères musulmans égyptiens Sayyed Qotb, de la juriste iranienne Shirin Ebadi (en sept lignes) ou du poète libertin Abû Nuwâs (dont il dit pourtant qu’« il n’a cure de réformer l’islam »), Chebel tombe dans le piège du catalogue, d’un Who’s Who partiel et partial, sans problématique ni vulgarisation de l’apport intellectuel et doctrinal des personnages retenus.
Le détail de ces notices biographiques n’est pas à la hauteur d’un sujet passionnant. L’oeuvre de tel ou tel penseur est souvent évacuée sous les qualificatifs de « critique », « libérale », « réformiste ». Mais il y a pire, comme la légèreté qui autorise Malek Chebel à écrire que « les idées de Mohammed Ibn Abdel-Wahhab [père du wahhabisme, NDLR] influencent l’action du sultan Mohammed Ben Abdallah (1757-1790) ». Auteur d’une étude fouillée de l’influence wahhabite dans l’action des sultans marocains et de son échec (publiée dans le numéro de novembre 2012 de la revue Zamane), le chercheur Abdellah Tourabi reste sceptique : « Rien ne permet de prouver, historiquement, cette supposée influence. Ce n’est qu’en 1803, treize ans après la mort de Sidi Mohammed Ben Abdallah, que le contact des Marocains avec le wahhabisme devient effectif. »
Une somme, au final, qui tient plus du pensum que de l’ouvrage d’érudition et laissera certainement sur leur faim les lecteurs les plus curieux.
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