Maroc – Algérie : on ne choisit pas son voisin

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Publié le 6 janvier 2013 Lecture : 3 minutes.

Maroc : l’alternance à pas feutrés
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Maroc : l’alternance à pas feutrés

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S’il est un dossier sur lequel l’exercice du pouvoir gouvernemental par les islamistes d’Abdelilah Benkirane n’a produit aucun effet, c’est bien celui-là. En 2013, la frontière entre le Maroc et son voisin algérien entrera dans sa dix-neuvième année de fermeture, ces deux pays partageant avec les deux Corées le triste privilège d’être les seuls au monde à se tourner obstinément le dos. À peine entré en fonction, le chef du gouvernement marocain avait pourtant dépêché à Alger son ministre des Affaires étrangères, avec l’accord du roi, bien entendu. Voyage symbolique, destiné à démontrer aux frères orientaux que le chapitre d’une absurde cohabitation conflictuelle pouvait enfin se clore, pourvu que chacun y mette du sien. Mais voyage inutile : rien n’a changé depuis.

Certes, dira-t-on, cette absurdité n’est pas sans fondements puisqu’un contentieux non résolu, celui du Sahara occidental, divise ces deux États. Mais, outre le fait que l’Algérie n’est pas officiellement « partie en conflit » dans cette affaire, la frontière commune entre ce dernier pays et l’ex-colonie espagnole, sur laquelle il se refuse à reconnaître la souveraineté marocaine, n’est longue que de… 42 km ; 42 km contestés sur 1 601 au total, un point de détail à la démesure du gâchis politique, économique et humain que représente cet interminable divorce. Sur un demi-siècle d’indépendance commune, Marocains et Algériens n’ont été libres de se voir, d’échanger et de fraterniser que pendant vingt ans à peine. Autant dire qu’ils ne se connaissent presque plus.

En 2013, la frontière avec l’Algérie entrera dans sa dix-neuvième année de fermeture. Une aberration.

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Le Sahara mis entre parenthèses, hypothèse d’autant plus accessible qu’aucun des deux pays n’en fait plus un préalable, seuls des intérêts nationaux divergents peuvent expliquer la persistance de cette aberration. Faisons un sort à ce qui constitue le pain quotidien des récriminations de certains médias algériens à l’encontre du royaume, accusé de vouloir inonder de sa production de cannabis le « marché » maghrébin. Comment ne pas voir en effet que le trafic de drogue profite beaucoup plus de l’absence d’accès réglementaires et contrôlés aux frontières que de son contraire ? Et attachons-nous à l’essentiel : à court terme, il est vraisemblable que le Maroc, dont l’économie et la main-d’oeuvre sont plus compétitives et diversifiées que celles de l’Algérie, tirerait de la réouverture des frontières des dividendes supérieurs à ceux de son voisin. C’est, pour une large part, ce sentiment de faire au Maroc un cadeau sans contrepartie qui explique que le président Bouteflika n’ait jamais répondu aux appels à la réouverture réitérés ces dernières années par Mohammed VI.

Forte de ses impressionnantes réserves en devises, l’Algérie ne souhaite pas renflouer les caisses de son voisin. Reste que ce raisonnement, qui relève du nationalisme d’État, ne tient ni à moyen terme ni à long terme. Un « Maghreb central » où la libre circulation serait la règle et le marché du travail ouvert ferait gagner aux trois pays qui le composent deux points de croissance par an. Et le PIB réel par habitant, si l’on en croit la Banque mondiale, augmenterait plus vite en Algérie qu’au Maroc.

À ce coût du non-Maghreb s’ajoute celui, pour les deux voisins, de dépenses militaires toujours plus lourdes, nécessitées par le maintien d’un rapport des forces budgétivore : 5 milliards de dollars pour le Maroc en 2012 (le double pour l’Algérie), qui pèsent d’autant plus sur les finances du royaume que les devises dont dispose ce dernier sont étroitement liées non pas à la production passive d’hydrocarbures, mais à ses propres performances économiques. Jusqu’à quand le Maghreb continuera-t-il de marcher sur la tête ?

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