Tunisie – Mondial 2022 : les Aigles de Carthage privés de Coupe du monde ?

Les relations exécrables entre Kamel Deguiche, le ministre des Sports, et Wadi el-Jari, le président de la Fédération tunisienne de football, pourraient conduire la Fifa à priver l’équipe de la prochaine compétition internationale. Explications.

Le onze national tunisien, en 2022.

Alexis Billebault

Publié le 30 octobre 2022 Lecture : 3 minutes.

Ce n’est pas la première fois, ni sans doute la dernière, que des rumeurs plus ou moins insistantes évoquent une dissolution de la Fédération tunisienne de football (FTF) par le ministère des Sports, autrement dit le gouvernement. Le mercredi 26 octobre, Mosaïque FM a annoncé avoir appris que la Fifa menaçait de geler toutes les activités des sélections nationales tunisiennes, ainsi que des clubs engagés dans les compétitions internationales, notamment la Ligue des Champions africaine et la Coupe de la Confédération africaine de football.

Selon le média, certaines sources auraient appris que Kamel Deguiche, le ministre des Sports, réfléchissait à la possibilité de dissoudre des bureaux fédéraux de différentes disciplines, dont le football. La Fifa, qui sanctionne systématiquement toutes les tentatives d’ingérence du pouvoir politique dans les affaires du football, a déjà statué en 2022 sur les cas du Kenya et du Zimbabwe, lesquels n’ont pas pu prendre part aux qualifications pour la Coupe d’Afrique des Nations 2024 en Côte d’Ivoire.

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Concernant la Tunisie, les rumeurs, qui viennent rappeler combien les relations entre Deguiche et Wadi el-Jari, le patron du football tunisien, sont détestables, interviennent au plus mauvais moment pour la sélection nationale et ses supporteurs. Les Aigles de Carthage doivent en effet disputer la Coupe du Monde au Qatar (20 novembre-18 décembre), où ils affronteront au premier tour la France, championne du monde en titre, le Danemark et l’Australie. « Il semble difficile d’imaginer que le ministre des Sports puisse prendre la décision de dissoudre la fédération, avec les conséquences immédiates que cela aurait pour la sélection nationale. Je n’ose penser à la réaction des supporteurs, dans une période où les occasions de se distraire sont rares », glisse un acteur du football tunisien sous couvert d’anonymat.

Gestion critiquée et divergences politiques

Ce n’est pas la première fois que les tensions entre les deux hommes sont relatées par la presse. Deguiche et Jari se détestent cordialement. Revenu au ministère en octobre 2021, après avoir occupé ce poste entre septembre 2020 et février 2021 dans le gouvernement de Hichem Mechichi, Kamel Deguiche ne manque pas une occasion d’étriller Jari, à qui il reproche une gestion autoritaire du football tunisien. En juin dernier, après que des rumeurs autour d’une possible dissolution de la FTF avaient circulé, le ministre s’était arrangé pour ne pas croiser son adversaire alors que celui-ci revenait du Japon, où la Tunisie venait de remporter la Kirin Cup après avoir brillamment battu le Chili (2-0) et la sélection locale (3-0).

Deguiche, à peine nommé, s’était aussi emporté contre une décision de Jari, lequel avait décidé qu’un match qualificatif pour la Coupe du Monde 2022 contre la Zambie serait disputé à huis clos au stade de Radès, dans la banlieue de Tunis (3-1, le 16 novembre 2021). En juin dernier, une affaire supposée de corruption lors d’un match de Ligue 1 et les décisions prises par la FTF avaient provoqué une nouvelle sortie médiatique du ministre, et laissé se diffuser les rumeurs d’une possible dissolution de l’instance. Ces tensions palpables entre Deguiche et Jari ne sont pas uniquement motivées par de simples désaccords sur la gestion du football tunisien.

« Il y a des raisons politiques qui expliquent qu’ils ne peuvent pas se voir en peinture. Car politiquement, ils sont de bords totalement opposés », intervient une autre source. Wadi el-Jari, ancien footballeur à l’US Ben Guerdane, un club qu’il présida ensuite pendant cinq, et médecin de formation, avait soutenu Youssef Chahed – ancien ministre des Affaires locales et surtout Premier ministre du président Béji Caïd Essebsi (d’août 2016 à février 2020) – lors de l’élection présidentielle de 2019.

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Tout l’oppose à Kamel Deguiche, et cette profonde hostilité entre ces deux fortes personnalités s’est déplacée sur le terrain du football. Si certains acteurs du ballon rond, contactés par Jeune Afrique, ne craignent pas forcément une dissolution de la FTF et une exclusion de la Coupe du Monde, tous ont la même lecture : « Des sujets comme celui-là, avant une telle échéance, ne sont pas idéaux pour la sérénité de la sélection et pour l’image du sport tunisien. » Message transmis aux intéressés…

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