Birmanie : le petit frère se rebiffe

Pour acheminer son pétrole sans passer par le détroit de Malacca, contrôlé par les États-Unis, la Chine a un besoin crucial de la Birmanie. Du coup, celle-ci fait monter les enchères…

Des moines birmans protestent contre la répression des manifestations, le 1er décembre. © AFP

Des moines birmans protestent contre la répression des manifestations, le 1er décembre. © AFP

Publié le 19 décembre 2012 Lecture : 2 minutes.

«Même si nos relations sont placées sous le signe de "l’harmonie fraternelle", nous ne sommes pas redevables à la Chine, qui n’est qu’un voisin comme les autres. » Ces mots prononcés le 1er décembre par Aung San Suu Kyi ne sont pas passés inaperçus en Birmanie. Après la dure répression de manifestants réclamant la fermeture d’une mine de cuivre gérée par des Chinois à Monywa, l’ancienne opposante était demeurée silencieuse. Comme s’il était impossible de toucher aux intérêts de la Chine. Premier partenaire commercial, celle-ci achète des matières premières (gaz naturel, pierres précieuses, bois) et vend des armes et des produits manufacturés. Selon le site Irrawaddy, elle tient le gouvernement birman par un chantage aux sanctions financières en cas de rupture de contrat. Est-ce si sûr ? Comment expliquer alors qu’en 2011, après la suspension d’un projet de barrage censé lui fournir de l’électricité, la Chine s’en soit tenue à des menaces sans suite ?

Parce que, contrairement aux apparences, cette dernière a un besoin crucial de la Birmanie. Dans les années qui viennent, elle va devenir de plus en plus dépendante du pétrole du Moyen-Orient. Selon l’Agence internationale de l’énergie, elle importera en 2035 quelque 8 millions de barils/jour (contre 275 000 b/j actuellement). Une fois achevé, l’oléoduc qu’elle construit à travers la Birmanie lui permettra de rattacher sa province méridionale du Yunnan à l’océan Indien, sans passer par le détroit de Malacca, contrôlé par la marine américaine et susceptible d’être bloqué en cas de conflit.

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Profil bas

Consciente de l’importance stratégique de son voisin, la Chine fait donc profil bas. Le 5 décembre, son ambassadeur est allé jusqu’à déclarer que son gouvernement « ne verrait pas d’inconvénient majeur à une éventuelle fermeture de la mine de Monywa ». Étrange humilité ! Hier encore sans rivaux, la Chine voit venir la fin de son monopole et repense sa stratégie.

Ce sont d’ailleurs moins les États-Unis qui l’inquiètent que le Japon, qui, depuis des mois, tisse discrètement sa toile. Après avoir effacé la dette birmane au printemps, il a, à l’automne, rouvert le robinet de l’aide. Résultat : c’est aux Japonais, et non aux Chinois, que le président Thein Sein a confié le colossal projet de construction d’une nouvelle zone industrielle et d’une ville nouvelle à la périphérie de Rangoon. Tout comme la rénovation de quatre centrales électriques ou l’étude du futur réseau de transports urbains. Le message est clair : le petit frère a choisi de se rebiffer. 

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