Photographie : Hady Sy, piqué au sang
Avec sa dernière oeuvre, l’artiste aux origines libanaise et sénégalaise Hady Sy souhaite sensibiliser au don du précieux liquide rouge.
Avec One Blood, Hady Sy n’a qu’un but : sensibiliser au don du précieux liquide rouge. Il a pour cela photographié 366 donneurs sur les cinq continents. Visages anonymes ou célèbres, Noirs ou Blancs, jeunes ou vieux, les sujets, de 90 origines différentes, sont présentés dans une installation semi-circulaire dont l’intérieur, où figurent des gouttes et des poches de sang scannées, est censé rappeler celui du corps humain. Présenté en avant-première lors de la première quinzaine de septembre, au 24e festival international de photojournalisme Visa pour l’image, à Perpignan (France), le projet sera exposé à Beyrouth du 13 décembre 2012 au 13 janvier 2013.
Blessé lors de la guerre du Liban (1975-1990), le photographe libano-sénégalais a choisi de travailler sur « le sang donné et non pas le sang versé ». Pendant quatre ans, il a parcouru la planète. Ce projet l’a même amené en 2009 à rentrer à Beyrouth après trois décennies d’absence. Hady Sy s’est attaché à connaître l’histoire personnelle de chacun : chercheur d’or en Amazonie, Inuit d’Alaska, érudit en Mauritanie, moine au Népal ou encore ministre en Afrique. « J’ai voulu insister sur le fait qu’une personne très différente d’une autre peut sauver celle-ci en donnant son sang, explique-t-il. Un albinos sénégalais, par exemple, a voulu poser avec son fils pour montrer qu’il ne lui avait pas transmis sa maladie et qu’il pouvait donc être donneur. »
Blessé lors de la guere du Liban, il a choisi de travailler sur "le sang donné et non versé".
Quelques touches de couleur parsèment l’ensemble des photographies en noir et blanc. Blonde vêtue de rouge, May Chidiac, la journaliste libanaise qui fut victime d’un attentat, détonne très franchement. Ce choix est purement « esthétique », justifie l’artiste, qui est également plasticien. Il a aussi voulu exposer les portraits de ceux qui, malgré leur souhait, ne pouvaient pas être donneurs. « Lorsque j’étais à Dubaï, j’ai rencontré un homme de petite taille à qui les médecins ont refusé de prélever le sang car il pesait moins de 50 kg, raconte-t-il. J’ai alors décidé de photographier ceux qui voulaient mais ne pouvaient pas donner parce qu’ils étaient porteurs du VIH, tatoués, malades, âgés… Du coup, le projet est devenu beaucoup plus riche. »
Drépanocytose
Né en 1964 à Beyrouth d’un père sénégalais, ambassadeur au pays du Cèdre, et d’une mère libanaise, Hady Sy a très jeune été marqué par la maladie de sa soeur, Youmna, atteinte de la drépanocytose, qui nécessite des transfusions sanguines fréquentes. Son portrait clôt d’ailleurs l’exposition.
Déjà, en 2004 et en 2007, il avait présenté des travaux sur des thématiques semblables : In God We Trust (des radiographies de son corps) est une réaction aux attentats du 11 septembre 2001 – il vivait alors à New York -, tandis que Not for Sale passe en revue les armes les plus meurtrières depuis la Première Guerre mondiale jusqu’à nos jours. Naturalisé français après ses études de communication à l’Efap (Paris), Hady Sy a vécu dans l’Hexagone entre 1984 et 1996. Le 14 juin dernier (Journée mondiale du don de sang), il a achevé One Blood au Centre national de transfusion sanguine de Dakar. « Maintenant, j’ai envie de monter un gros projet sur l’Afrique, confie-t-il. J’ai déjà réfléchi à mon prochain sujet : l’eau. »
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