Corée du Sud : duel pour la Maison Bleue

Le retrait de la course à la présidentielle d’Ahn Cheol-soo, le candidat des jeunes branchés, laisse face à face Park Geun-hye, fille d’un ancien dictateur, et le centriste peu charismatique Moon Jae-in.

Les deux candidats au cours d’un débat télévisé, le 4 décembre, à Séoul. © Lee Jae-Won/Sipa

Les deux candidats au cours d’un débat télévisé, le 4 décembre, à Séoul. © Lee Jae-Won/Sipa

Publié le 14 décembre 2012 Lecture : 2 minutes.

« Si nous continuons à nous quereller, le peuple sera la principale victime de notre différend. » Non, il ne s’agit pas d’une déclaration de François Fillon ou de Jean-François Copé saisi d’un brusque remords, mais du constat fait le 23 novembre par Ahn Cheol-soo, le troisième homme de l’élection présidentielle sud-coréenne, devant un parterre de militants atterrés à qui il venait d’expliquer les raisons de son retrait inattendu de la course : laisser à Moon Jae-in, son rival et partenaire du Parti démocrate unifié (centre gauche), les meilleures chances de l’emporter. À la veille du scrutin (le 19 décembre), il était plus que temps. Les interminables bisbilles entre les deux candidats entraînaient l’opposition dans le mur.

Geek

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C’est donc Ahn Cheol-soo (50 ans), véritable héros de la jeunesse, qui a cédé sa place pour mieux barrer la route à Park Geun-hye, la candidate du parti conservateur au pouvoir. Un choc pour ses électeurs, qui voyaient en ce geek millionnaire sans réelle expérience politique une véritable alternative à la vieille génération d’hommes politiques. Mais est-il pour autant assuré que les voix qu’il aurait dû recueillir se reporteront sur Moon ? La question se pose. Oh certes, ce dernier, ancien avocat de 59 ans, fait des efforts méritoires. Il a par exemple troqué les montures carrées de ses lunettes pour des rondes dans l’espoir de paraître plus « branché ». Mais rien à faire, il peine à séduire la « génération des 880 000 wons » (630 euros, allusion au montant de leur salaire), tout acquise à Ahn

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Nés entre 1974 et 1983, ces jeunes gens n’ont connu ni la dictature militaire ni la lutte pour la démocratie de la fin des années 1980 et ont grandi dans une relative aisance. Débarrassés de tout a priori idéologique, ils n’ont qu’une idée en tête : améliorer leur quotidien. « Nous ne raisonnons plus comme la génération née dans les années 1960, explique un militant déçu. Moon Jae-in est comme Roh Moo-hyun (président de 2003 à 2008) : un idéaliste et un faible. »

Excuses

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Sauf que pour vaincre Park Geun-hye, il va quand même falloir se retrousser les manches ! La popularité de cette célibataire de 60 ans, déjà surnommée la « dame de fer de Corée », inquiète l’opposition : elle paraît bien placée pour devenir la première femme à diriger le pays. D’ailleurs, elle connaît bien la Maison Bleue (le siège de la présidence), puisqu’elle y a vécu. Elle est en effet la fille du général Park Chung-hee, qui dirigea le pays d’une main de fer de 1963 à 1979. La filiation est à ce point gênante qu’elle a été contrainte de s’excuser officiellement pour les crimes de son dictateur de père. Pas surprenant, donc, que dame Park séduise les nostalgiques du miracle économique. « C’est grâce au général Park, martèlent ces derniers, que notre pays a réussi à intégrer le "club des 20-50". » Autrement dit, les sept pays comptant plus de 50 millions d’habitants et disposant d’un PIB par habitant supérieur à 20 000 dollars. 

À la veille de l’échéance, Moon Jae-in et Park Geun-hye sont au coude à coude dans les sondages. La clé du scrutin, c’est évidemment leur capacité à séduire les 20 % de jeunes électeurs frustrés par l’abandon d’Ahn Cheol-soo. Pour l’instant, ces derniers hésitent encore entre l’abstention et le vote de dépit.

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