Nkosazana Dlamini-Zuma : « Il faut négocier jusqu’à la dernière limite au Mali »

La présidente de la Commission de l’Union africaine (UA), Nkosazana Dlamini-Zuma, s’exprime sur le dossier malien, dont elle s’est entretenue avec François Hollande lors de sa visite à Paris, à la mi-novembre. Interview.

Nkosazana Dlamini-Zuma à l’Unesco, à Paris, le 15 novembre. © Vincent Fournier/J.A

Nkosazana Dlamini-Zuma à l’Unesco, à Paris, le 15 novembre. © Vincent Fournier/J.A

ANNE-KAPPES-GRANGE_2024

Publié le 27 novembre 2012 Lecture : 3 minutes.

Le Mali lui laisse peu de répit. À peine était-elle investie à la tête de la Commission de l’Union africaine (UA), le 15 octobre, que Nkosazana Dlamini-Zuma se rendait deux jours plus tard à Bamako pour y rencontrer Dioncounda Traoré, le président, et Cheick Modibo Diarra, le Premier ministre. Preuve, selon l’ancienne ministre sud-africaine de l’Intérieur, que l’UA n’est pas en retrait sur le dossier malien. Sujet qu’elle a également évoqué avec François Hollande lors de sa visite à Paris, les 14 et 15 novembre – l’occasion pour elle d’insister sur la nécessité d’essayer de négocier avec les groupes armés maliens actifs dans le nord du pays.

Jeune Afrique : Deux puissances occidentales, la France et les États-Unis, appuient ouvertement une intervention au Nord-Mali. Cela vous gêne-t-il ?

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Nkosazana Dlamini-Zuma : L’important est de faire le nécessaire. La situation au Mali est extrêmement complexe. Il y a eu un coup d’État, l’intégrité territoriale du pays est menacée, il va falloir organiser des élections de manière que le gouvernement ait l’autorité et la légitimité nécessaires, il y a des problèmes humanitaires… C’est un dossier qui demande beaucoup d’attention.

Pourtant, votre pays, l’Afrique du Sud, est traditionnellement réticent quand des pays tiers se mêlent des affaires africaines…

Je suis la présidente de la Commission de l’Union africaine. Que je sois née en Afrique du Sud n’influence en rien mon action à la tête de l’UA.

Êtes-vous favorable à une intervention ?

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L’UA a proposé une feuille de route qui dit clairement qu’il faut suivre deux pistes en même temps : l’option militaire et la négociation. Il faut faire le maximum pour amener les groupes armés maliens à prendre leurs distances avec les bandits et avec les combattants d’Aqmi [Al-Qaïda au Maghreb islamique, NDLR]. Il faut que ces groupes renoncent à la sécession, qu’ils acceptent que le Mali soit une République.

Il n’est jamais trop tard quand il s’agit d’éviter la guerre.

N’est-il pas trop tard ?

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Il n’est jamais trop tard quand il s’agit d’éviter la guerre.

Et s’il apparaît qu’une intervention est la seule manière de ramener la paix ?

Si c’est la seule solution, alors…

Ces derniers mois, l’UA a paru en retrait sur le dossier, déléguant sa gestion à la Cedeao…

L’UA n’est pas en retrait. Nous avons élaboré une feuille de route, qui a été validée par le Conseil de paix et de sécurité de l’UA et qui a ensuite été transmise au Conseil de sécurité de l’ONU. Nous avons également nommé un haut représentant pour le Mali, l’ancien président burundais Pierre Buyoya. La Cedeao n’est pas seule à gérer la situation : il y a aussi l’UA et toute la communauté internationale. Le dossier est désormais entre les mains de l’ONU. C’est un processus qui prendra du temps et pour lequel nous devrons ensuite trouver les financements nécessaires.

Fin octobre, l’UA a appelé à la tenue d’élections libres et transparentes au cours du premier trimestre 2013. Est-ce réaliste ?

Il est bien évident qu’il ne peut pas y avoir des élections que dans le Sud : ce serait entériner une partition dont nous ne voulons pas.

Ce sont les Maliens qui nous ont dit, lorsque nous nous sommes rendus à Bamako, que des élections pourraient être organisées en avril, mais selon toute vraisemblance ce pourrait plutôt être vers la fin 2013. Il est bien évident qu’il ne peut pas y avoir des élections que dans le Sud : ce serait entériner une partition dont nous ne voulons pas.

La situation au Mali est-elle à vos yeux une conséquence directe de la chute du régime de Kadhafi ?

Il est clair que cette situation découle, au moins en partie, de ce qui s’est passé en Libye. Elle est toutefois plus complexe que cela. On ne peut pas, par exemple, minimiser le problème du trafic de drogue, dont l’épicentre se trouve sans doute en Guinée-Bissau, mais qui a des ramifications dans toute la sous-région et qui aide les groupes armés à se financer dans le Nord-Mali.

Vous vous êtes rendue à Bamako mi-octobre. Avez-vous eu l’impression que le président Traoré et le Premier ministre Diarra parlaient d’une seule voix ?

Le président et le Premier ministre travaillent en étroite collaboration. Ils vont dans le bon sens et nous avons eu avec eux des discussions très constructives. C’est la raison pour laquelle l’UA a décidé de lever ses sanctions [le Mali, suspendu après le coup d’État, a réintégré l’UA le 24 octobre]. 

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Propos recueillis par Anne Kappès-Grangé

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