Vie et destin des pieds-noirs restés en Algérie

Journaliste, auteur de Ni valise ni cercueil, les pieds-noirs restés en Algérie après l’indépendance (Actes Sud, 2012).

Publié le 27 novembre 2012 Lecture : 2 minutes.

En 1963, l’Assemblée constituante, dont Pierre Chaulet faisait partie, offrait à l’Algérie sa première Constitution. Dans son article 4, elle disposait : « l’islam est la religion de l’État ». On aurait bien tort de relire ce moment historique avec les lunettes du présent. Car aujourd’hui, la seule mention de l’islam au coeur d’un État provoque d’apocalyptiques visions de salafistes empaquetant les femmes de draps noirs, ou de talibans égorgeant le moindre impie. Que l’on est loin de l’Algérie des années 1960 !

En 1963, à Oran, à Alger ou à Annaba, les hommes se pavanaient en terrasse en sirotant leur bière, les yeux errant nonchalamment sur les jambes nues des jeunes femmes en jupes très courtes. Chez les 200 000 pieds-noirs restés dans leur pays (soit 20 % des anciens Français d’Algérie), cet article 4 n’a certainement pas provoqué de grandes inquiétudes. D’autant plus qu’il affirmait dans le même temps : « la République garantit à chacun le respect de ses opinions et de ses croyances, et le libre exercice des cultes ».

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Sans être inquiets, certains ont cependant pu être déçus. Tous ceux qui, parmi les pieds-noirs comme parmi les Arabo-Berbères (pour ne pas reprendre la terminologie coloniale de « musulmans »), rêvaient d’une Algérie nouvelle profondément laïque et multiculturelle. En 1963, la Constitution fut adoptée avec 139 voix pour, 23 voix contre et 8 abstentions (dont 7 Européens, sur les 16 membres pieds-noirs de la nouvelle Assemblée). Je ne sais pas quelle fut la position de Pierre Chaulet ce jour-là. Une chose est sûre : à aucun moment de sa longue vie dans l’Algérie algérienne ce fervent catholique n’a été empêché de pratiquer sa foi, ni d’aller prier à l’église quand bon lui semblait. Tout comme son ami l’abbé Jean Scotto, avec lequel il fut élu aux élections municipales d’Alger en février 1967.

Cinquante années plus tard, au moment où disparaît le professeur Chaulet, que reste-t-il de ces 200 000 pieds-noirs ? Plus grand-chose, assurément. Ils ne seraient plus que quelques centaines, enfants compris. Les raisons d’une telle fonte des effectifs ? Le temps, naturellement, puisque à présent nombreux sont ceux qui reposent aujourd’hui dans la terre qui les vit naître.

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