L’imam Iquioussen bientôt expulsé de Belgique
Le Marocain Hassan Iquioussen, exilé cet été dans le pays pour échapper à une mesure d’expulsion de la France vers le Maroc, a été placé mardi soir dans un centre de rétention belge en vue d’un éloignement du territoire. Une décision jugée « scandaleuse » par ses avocats.
L’imam marocain Hassan Iquioussen a été placé, ce mardi 15 novembre au soir, dans un centre de rétention belge : le centre fermé de Vottem, dans la commune de Liège (est), selon une source policière. Alors qu’il était depuis la Toussaint assigné à résidence sous surveillance électronique, cette nouvelle incarcération intervient en vue d’un éloignement du territoire.
Du terrain judiciaire, le dossier s’est déplacé vers celui de l’administration, le gouvernement belge relevant que l’imam est en séjour irrégulier en Belgique et n’a pas vocation à y rester. Ses avocats jugent cette décision « scandaleuse ». Le projet d’expulsion, annoncé ce mercredi par la secrétaire d’État belge à l’Asile et la Migration, Nicole de Moor, fait suite au refus, répété mardi par la justice belge, de remettre l’imam à la justice française en vertu d’un mandat d’arrêt européen (MAE).
Aucun délai précisé
Les avocats du prédicateur de 58 ans arguaient que l’infraction reprochée en France (« soustraction à l’exécution d’une mesure d’éloignement ») n’existait pas en droit belge, ce qui est une condition pour qu’un MAE puisse être exécuté. Le tribunal de Tournai (ouest) fin octobre, puis la cour d’appel de Mons (sud) mardi, leur avaient donné raison.
« Nous sommes en contact avec la France pour permettre son retrait du territoire », a souligné Nicole de Moor dans un tweet, laissant entendre que l’imam pourrait être d’abord remis aux autorités françaises avant une expulsion vers le Maroc. Aucun délai n’a été précisé. Il n’y a « pas de place pour les prédicateurs de haine étrangers dans notre pays », a ajouté cette responsable chrétienne-démocrate flamande.
Le prédicateur de la haine Iquioussen a été enfermé dans un centre de retour fermé la nuit dernière. Nous sommes en contact avec la France pour permettre son retrait du territoire. Pas de place pour les semeurs de haine étrangers dans notre pays.
— Nicole de Moor (@Nicole_demoor) November 16, 2022
Dans un communiqué, elle a aussi relevé que Hassan Iquioussen « ne donne aucun signe qu’il souhaite retourner volontairement » dans son pays et « les autorités françaises réclament toujours son retour afin de pouvoir l’envoyer au Maroc ».
Lucie Simon, avocate française de l’imam, a jugé ce placement en centre fermé « purement scandaleux », estimant que le pouvoir politique contournait « une fois de plus le judiciaire » dans cette affaire. Sur Twitter, elle a accusé l’administration belge de l’immigration de « s’être entendue avec le parquet » pour que le dossier prenne la voie administrative.
La procédure pénale de mandat d'arrêt européen est jugée illégale ? Qu'à cela ne tienne, l'Office des étrangers belge décide, après s'être entendue avec le Parquet, de remettre M. #Iquioussen à la France, empruntant ainsi la voie administrative.
— Lucie Simon (@LucieSimon94) November 16, 2022
Imbroglio politico-juridique
Hassan Iquioussen, arrêté le 30 septembre dans la région de Mons, en Belgique francophone, est au cœur d’un imbroglio politico-juridique depuis quatre mois. Fin juillet, le ministre français de l’Intérieur Gérald Darmanin avait annoncé l’expulsion de ce prédicateur du Nord, fiché S (pour sûreté de l’État) par les services de renseignement.
L’arrêté signé de la main du ministre lui reproche « un discours prosélyte émaillé de propos incitant à la haine et à la discrimination et porteur d’une vision de l’islam contraire aux valeurs de la République ». Mais Hassan Iquioussen était introuvable au moment où cet arrêté, qu’il avait contesté devant la justice, avait été définitivement validé par le Conseil d’État, le 31 août.
Je veux bien qu’on me condamne, parce qu’il est sûr et certain que j’ai dit des choses condamnables.
Dans une interview en forme de mea-culpa diffusée par le quotidien français Le Parisien, l’imam admet qu’il a pu tenir par le passé des « propos déplacés et certaines expressions qui trompent [s]a pensée ». « Je suis disposé à accepter des reproches, un procès. Je veux bien qu’on me condamne, parce qu’il est sûr et certain que j’ai dit des choses condamnables. Mais m’expulser de l’endroit où je suis né, là où j’ai toujours vécu, c’est comme déraciner un chêne », a-t-il ajouté.
Né en France, Hassan Iquioussen avait décidé à sa majorité de ne pas opter pour la nationalité française. Lui affirme y avoir renoncé à 17 ans sous l’influence de son père et avoir ensuite tenté en vain de la recouvrer. Ses cinq enfants et 15 petits-enfants sont eux Français et implantés en France, dans le département du Nord : l’un de ses fils est imam à Raismes, un autre ex-élu PS à Lourches.
(avec AFP)
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