Collectionneurs d’art : Jean-Paul Blachère, faire la lumière

Les lumières de Noël des Champs-Élysées, la tour Eiffel scintillant de mille feux, c’est elle. Blachère Illumination est une entreprise installée à Apt (sud de la France) et comptet plus d’une centaine de salariés pour un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros.

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Publié le 7 novembre 2012 Lecture : 3 minutes.

À la tête de Blachère Illumination, Jean-Paul Blachère, créateur de la fondation d’entreprise qui porte son nom. Sa rencontre avec l’Afrique, il l’a racontée plusieurs fois. Lorsque à 33 ans il a perdu l’usage de ses jambes, c’est grâce au continent qu’il s’est reconstruit « spirituellement et moralement ». Pierre Jaccaud, le directeur artistique de la fondation, se souvient : « Nous nous sommes rencontrés en 1999, il était passionné d’Afrique et disposé à faire des rencontres, nous sommes devenus amis. »

Venu du théâtre, propriétaire avec sa femme d’une résidence d’artistes, Jaccaud ne connaît alors rien à l’Afrique. « Il y a eu une envie commune de faire des choses, une confiance et des possibles qui se sont ouverts. » À la manière du couple Pigozzi-Magnin, le couple Blachère-Jaccaud construit la Fondation en 2003 – alors que l’entrepreneur a commencé sa propre collection d’art contemporain africain trois ans plus tôt. « Nous avons construit le programme des cinq premières années sur un principe d’exploration, médium par médium », explique Jaccaud.

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Terrains risqués

La fondation Blachère

Nombre d’oeuvres : environ 1 000 pour la collection personnelle de Jean-Paul Blachère

Artistes : El Anatsui, Abdoulaye Konaté, Frédéric Bruly Bouabré, Malick Sidibé, Hassan Musa…

Localisation : Apt, ouverte au public

Activités principales : expositions, résidences d’artistes, ateliers, prix

Directeur artistique : Pierre Jaccaud

Entreprise : Blachère Illumination

Site internet : www.fondationblachere.org

En mars 2012, Jean-Paul Blachère a reçu pour son action la médaille de grand mécène de la culture des mains du ministre Frédéric Mitterrand. Il faut dire que la fondation a bien grandi, avec en moyenne trois expositions par an attirant quelque 15 000 personnes, des résidences et des ateliers organisés pour des artistes et une participation active aux biennales de Bamako et de Dakar, le tout pour un budget d’environ 400 000 euros par an. Sans nier pour autant que les conditions sont difficiles. « Outre que nous souffrons d’être installés en province, nous évoluons sur des terrains postcoloniaux très risqués, estime Jaccaud. Ce que doit faire une fondation ? À mon avis, être à l’écoute des projets, des propositions, et créer un réseau de résidences. Le problème majeur, c’est souvent que ce que le Nord veut voir ne correspond pas à ce que les artistes du Sud veulent montrer. »

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Optimiste, Jaccaud ajoute néanmoins que la fondation est de plus en plus souvent consultée par des entreprises qui envisagent de marcher sur ses traces. Quant au collectionneur Jean-Paul Blachère, il possède aujourd’hui quelque 1 000 oeuvres, qui seront présentées fin 2012 dans un catalogue que prépare le critique et philosophe ivoirien Yacouba Konaté. « Cette collection, c’est son oeuvre », affirme Jaccaud. 

Jean-Paul Blachère : "Un travail qui exprime le meilleur de l’Afrique"

Jeune Afrique : Comment avez-vous décidé d’entamer une collection d’art ?

Jean-Paul Blachère : J’ai rencontré l’Afrique au milieu des années 1980, dans une période très difficile de ma vie. Suite à des visites d’ateliers et à d’extraordinaires amitiés, j’ai éprouvé le besoin de commencer une collection et de la montrer. Je me souviens de la rencontre avec le Malien Amahiguéré Dolo, qui sculpte des racines d’arbres, ou encore avec le Sénégalais Ndary Lô et ses hommes qui marchent…

Comment vous décidez-vous pour une oeuvre ?

La plupart des achats ont été réalisés lors de visites d’ateliers, parce qu’il y a eu une histoire d’amour entre l’oeuvre, l’artiste et moi. Et puis parce que j’ai éprouvé le besoin de faire reconnaître la qualité d’un travail qui exprime le meilleur de l’Afrique. Mais vous savez, on évolue en permanence. Avec le temps, j’ai pris du recul et mon approche est devenue plus réfléchie, moins impulsive. Parfois, j’aimerais revenir à mes critères de base, au choix « coup de coeur ».

Y a-t-il une dimension spéculative dans votre collection ?

Absolument pas. Je pense que tout ce qui n’est pas donné est perdu. C’est une vraie passion, une envie de rendre aux artistes ce qu’ils nous donnent et leur permettre d’être reconnus. Les oeuvres que j’achète n’ont aucune valeur spéculative, c’est un marché de coeur et il ne m’est jamais venu à l’esprit de les revendre.

Quel avenir espérez-vous pour votre collection ?

Je voudrais qu’elle soit montrée le mieux possible, et pourquoi pas dans un musée africain qui se donne les moyens de la faire connaître. Aujourd’hui, parmi les quelque 240 artistes que nous avons choisis, certains sont désormais représentés par de grandes galeries. On a participé à un élan, et, de ce point de vue, c’est une réussite. J’espère qu’il y aura de plus en plus de collectionneurs. 

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Propos recueillis par Nicolas Michel

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