Israël : Netanyahou peut-il perdre ?

Tous les sondages d’opinion donnent le Premier ministre vainqueur des élections anticipées de janvier prochain. Mais les centristes et la gauche ne désarment pas.

La campagne de Netanyahou devrait être axée sur des thèmes sécuritaires. © Bernat Armangue/AP/SIPA

La campagne de Netanyahou devrait être axée sur des thèmes sécuritaires. © Bernat Armangue/AP/SIPA

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Publié le 30 octobre 2012 Lecture : 4 minutes.

La deuxième tentative aura été la bonne. Après y avoir renoncé in extremis en mai dernier, à la suite du ralliement surprise du parti Kadima, Benyamin Netanyahou s’est finalement résolu à provoquer des élections législatives anticipées. Il faut dire que la formation centriste, dirigée par l’ancien général Shaul Mofaz, n’aura tenu que deux mois au sein d’un gouvernement largement dominé par la droite nationaliste et les partis religieux. Incapable de réformer la loi Tal – qui devait rendre le service militaire obligatoire pour les Juifs ultraorthodoxes -, le Premier ministre israélien n’est pas non plus parvenu à faire voter le budget 2013. Son plan d’austérité, supposé éviter au pays une crise de la dette semblable à celle qui sévit en Europe, a été rejeté par ses alliés.

« J’ai décidé que, pour le bien de l’État d’Israël, il fallait aller devant les électeurs le plus vite possible », a déclaré Netanyahou pour justifier la tenue d’un scrutin anticipé fixé au 22 janvier prochain. Mais cet empressement n’est pas anodin. Quatre ans après son élection, et à la faveur d’un gouvernement présenté comme l’un des plus stables de l’histoire du pays, la cote de popularité du Premier ministre reste intacte. Les premiers sondages créditent son parti, le Likoud, de 28 à 30 sièges à la Knesset, alors qu’il n’en comptait que 27 en 2008. D’après le quotidien Haaretz, si les élections avaient lieu aujourd’hui, la coalition de droite rassemblerait une majorité de 68 sièges sur 120.

Crédité de 17 à 24 sièges, le Parti travailliste est redevenu la deuxième force politique du pays.

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Tout laisse à croire que Netanyahou se dirige donc vers un plébiscite en janvier prochain. S’appuyant sur son bilan sécuritaire, probable thème phare de sa campagne, il rappellera qu’en dépit des craintes liées au Printemps arabe, son pays a tenu bon derrière ses frontières. Certes, la situation régionale reste volatile, mais jusqu’ici ni l’avènement des Frères musulmans en Égypte, ni le prolongement de la crise syrienne n’ont eu de répercussion majeure pour Israël. Quant aux Palestiniens, en colère contre leurs dirigeants, ils sont englués dans leurs problèmes intérieurs et paraissent incapables de lancer une troisième Intifada. Sur le dossier du nucléaire iranien, enfin, Netanyahou a tenu ses promesses en plaçant cette question – et la menace de frappes israéliennes – au coeur des préoccupations internationales.

La réélection du Premier ministre précéderait d’ailleurs de peu la « ligne rouge » qu’il a évoquée, fin septembre, à la tribune de l’ONU, au-delà de laquelle la République islamique serait, selon lui, en mesure de développer sa première bombe. D’ici là, l’éventuelle intronisation de son ami Mitt Romney à la Maison Blanche conforterait un peu plus sa légitimité dans la perspective d’une confrontation militaire avec l’Iran. Le terrain est cependant miné pour « Bibi », comme en témoignent la réticence de l’armée à se lancer dans une guerre aux conséquences incertaines et celle de la population qui, en dépit des efforts consentis pour protéger l’arrière-front, reste hostile au scénario du pire.

Jeu d’alliances

« Netanyahou ne nous imposera pas une campagne sur l’Iran et sa bombe », a prévenu le député travailliste Daniel Ben Simon, décidé à ne pas laisser l’épouvantail sécuritaire, une fois encore, prendre le dessus sur les préoccupations sociales. « Nous allons gagner les élections, assure-t-il, et nous bâtirons une coalition de centre gauche, avec un programme clair pour la société israélienne, l’économie et l’avenir de notre pays. » Son parti, qui jadis incarnait le camp de la paix, est à présent crédité de 17 à 24 sièges dans les sondages, ce qui en fait potentiellement la deuxième force politique du pays. Sur le déclin depuis l’assassinat d’Itzhak Rabin en 1995, les travaillistes pourraient signer un retour historique en janvier prochain. Avec à sa tête Shelly Yachimovich, la gauche israélienne entend se poser en alternative au Likoud. Elle s’appuiera en priorité sur le mouvement social des classes moyennes, temps fort de l’été 2011, dont les revendications contre la vie chère n’ont pas été entendues par Netanyahou.

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Si de nouvelles manifestations de masse ne sont pas à exclure, d’autres surprises pourraient venir perturber les plans de réélection du Premier ministre. À commencer par le retour pressenti de deux figures appréciées de l’opinion : Tzipi Livni et Ehoud Olmert. La première, ancienne chef de l’opposition et du parti Kadima, serait plébiscitée par 28 % des Israéliens pour diriger l’État hébreu, ce qui en fait une sérieuse rivale pour Netanyahou. Il se murmure que Livni songerait à se présenter aux côtés de l’ancien journaliste vedette Yaïr Lapid, dont la nouvelle formation, Yesh Atid (« Il y a un futur »), fait figure d’outsider sur l’échiquier politique israélien. Quant à l’ancien Premier ministre Ehoud Olmert, avec 24 % d’opinions favorables il est déjà présenté comme le sauveur providentiel du parti Kadima, à la dérive dans les sondages (seulement 6 à 8 sièges). Son retour sur le devant de la scène reste cependant lié à l’issue de certaines affaires judiciaires, aux rangs desquelles figurent toujours des accusations de corruption.

Au centre, la bataille promet d’être particulièrement serrée, d’autant qu’elle verra aussi la toute première campagne du ministre de la Défense Ehoud Barak et de son parti Atzmaout (« Indépendance »), qu’il avait fondé en 2011 – après son départ du camp travailliste – pour se maintenir au gouvernement. Loin d’affaiblir leur électorat, l’accumulation de candidats centristes pourrait donner lieu à un subtil jeu d’alliances. Car derrière des problématiques communes, ces derniers ont une obsession : se débarrasser de Benyamin Netanyahou.

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