Sénégal : au PS, ils ont pris Tanor au mot

En début d’année, le secrétaire général du Parti socialiste promettait de passer la main. Résultat : en coulisses, les prétendants cachent de moins en moins leurs ambitions.

Nombreux sont ceux qui aimeraient couper le fil d’équilibriste sur lequel Tanor se tient. © Glez/J.A.

Nombreux sont ceux qui aimeraient couper le fil d’équilibriste sur lequel Tanor se tient. © Glez/J.A.

Publié le 29 octobre 2012 Lecture : 3 minutes.

Cela faisait longtemps que le Parti socialiste (PS) sénégalais n’avait pas été aussi agité. Et quelque part, souligne un de ses cadres, c’est encourageant. « Cela prouve qu’on est encore en vie après douze ans d’opposition. »

À l’origine, il y a cette interview accordée à Jeune Afrique en début d’année, en pleine campagne électorale. À la question : « Quitterez-vous la tête du parti [en cas d’échec à l’élection présidentielle] ? », Ousmane Tanor Dieng, le candidat du PS, qu’il dirige sans réelle opposition interne depuis douze ans, avait répondu, peut-être un peu trop rapidement : « Que je perde ou que je sois élu, je laisserai la place. Il faut préparer les jeunes générations. » On connaît la suite : le 26 février, Tanor n’a recueilli que 11,3 % des voix, loin derrière Abdoulaye Wade, Macky Sall et, suprême humiliation, l’ancien socialiste Moustapha Niasse, son ennemi intime. En guise de récompense au soutien apporté à Sall au second tour, Niasse a obtenu la présidence de l’Assemblée nationale, quand le PS a dû se contenter de quelques ministères de second rang. Depuis, la chasse au secrétaire général est ouverte…

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Chien fou

C’est une traque discrète et civilisée. Au siège de cette formation où priment les instances et dans laquelle les décisions sont collégiales, les ego sont priés de rester au vestiaire. Pas une tête ne doit dépasser et aucune déclaration ne doit venir contredire la ligne officielle. Malick Noël Seck, un chien fou du parti, l’a appris à ses dépens. Pour avoir publiquement déclaré qu’à 65 ans Tanor devait être « extirpé » de la formation, il en a été exclu début octobre. Un putsch au PS, le parti de Senghor et de Diouf ? Impensable. « Tout se fera dans les règles », assure un membre du bureau politique. Rendez-vous est pris lors du prochain congrès, qui devrait se tenir début 2013.

Les quinquas s’impatientent et, hors micro, raillent le manque de charisme du patron du PS.

Ils ne le diront pas devant des micros, mais, en coulisses, les anti-Tanor ne manquent pas de relever son manque de charisme et son incapacité à renouer avec la victoire. Parmi eux, deux des principaux prétendants à sa succession, tous deux quinquagénaires : Aïssata Tall Sall, députée-maire de Podor et porte-parole du PS, qui cache de moins en moins ses ambitions, et Khalifa Sall, maire de Dakar, qui oeuvre pour tisser sa toile, notamment auprès des jeunes. « Tanor aurait dû passer la main depuis longtemps, dit un partisan du changement. Son échec, c’est de ne pas avoir réussi à moderniser le parti. »

Très dur

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Les partisans d’Ousmane Tanor Dieng – il en compte encore un certain nombre, dont Abdoulaye Wilane et Barthélémy Dias, deux jeunes maires qui représentent la nouvelle génération, ou la très influente Aminata Mbengue Ndiaye, égérie féminine des socialistes – rétorquent qu’en Afrique il est rare de voir un parti aussi bien structuré après douze années d’opposition. De fait, le PS est aujourd’hui la seule formation implantée dans l’ensemble du Sénégal. C’est aussi la plus dynamique au niveau de la jeunesse. « En 2000 [après la défaite d’Abdou Diouf face à Wade, NDLR], nous avons perdu 75 % des membres du bureau, partis rejoindre le vainqueur, rappelle un cadre. Ça a été très dur. Et pourtant, nous représentons toujours la deuxième force du pays. C’est grâce à Tanor. »

Ce dernier prend soin de garder le silence sur ses intentions. Ses proches disent qu’il briguera un nouveau mandat. Malgré une popularité en berne, il peut compter sur ses réseaux, au sein du parti comme à l’étranger. « La bataille risque d’être sévère, analyse un cadre du PS. Cela fait trop longtemps que les jeunes attendent leur tour. Aujourd’hui, ils ne sont plus si jeunes et le temps leur est compté. »

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