Ken Ofori-Atta : « Je suis désolé pour les épreuves », lâche le ministre ghanéen des Finances
Ken Ofori-Atta s’est excusé auprès des citoyens pour les difficultés sans précédent qu’ils endurent. Il n’a pas accepté pour autant d’endosser la responsabilité de la récession économique.
De sa voix douce, le ministre a nié tous les torts qui lui sont attribués. L’opposition parlementaire l’accuse d’avoir fait un mauvais usage des fonds publics, d’avoir présenté des données économiques erronées et d’avoir appliqué une mauvaise gestion, ce qui a entraîné l’effondrement de l’économie ghanéenne.
>> À lire sur The Africa Report – Ghana : « I am not guilty, but I am sorry for the hardship », says Finance Minister Ofori-Atta
« La vérité est [que] des progrès considérables ont été réalisés sous mon mandat de ministre des Finances. Depuis 2017, nous avons géré l’économie de manière compétente… En effet, pour apprécier où nous sommes maintenant, nous devons regarder d’où nous venons », a plaidé Ken Ofori-Atta devant la commission parlementaire chargée d’examiner la motion de censure visant à le démettre de ses fonctions.
Myriade de problèmes
Ce fut un moment décisif pour Ofori-Atta, certains députés du Nouveau parti patriotique (NPP) au pouvoir ayant aussi exhorté le chef de l’État à le renvoyer. L’audition de ce cousin du président Nana Akufo-Addo a duré plus de 7 heures, à la mesure des enjeux et du mécontentement de la majorité des Ghanéens. » Je reconnais que notre économie est confrontée à des difficultés et que le peuple ghanéen endure des épreuves. En tant que chargé de ce poste par le président Akufo-Addo, je ressens la douleur personnellement, professionnellement et dans mon âme », a reconnu le ministre.
Sachant que le ressentiment grandit, Ken Ofori-Atta a déclaré : « Je vois et je ressens l’impact terrible de la hausse des prix des biens et des services sur la vie et les moyens de subsistance des Ghanéens ordinaires. Je ressens le stress lié à la gestion d’une entreprise, mais c’est la force et la persévérance du peuple ghanéen, ainsi que mes collègues du gouvernement, qui m’incitent chaque matin à aller de l’avant. » « C’est ce qui me donne la force de presser le pas pour trouver des solutions et soulager les Ghanéens face à la myriade de problèmes que notre pays et le reste du monde traversent, en particulier depuis mars 2020 », a-t-il ajouté.
« Permettez-moi de saisir cette occasion pour dire au peuple ghanéen ce que tous les ministres des Finances du monde entier voudraient dire à leur peuple maintenant, avec courage : je suis vraiment désolé », a déclaré Ofori-Atta dans un plaidoyer pour sauver son emploi.
Déni catégorique
Le président Akufo-Addo n’est pas prêt à lâcher son chef du Trésor, qui semble aussi avoir le soutien de certains poids lourds du cabinet présidentiel, en dépit des protestations des citoyens. Le chef de cabinet de la République du Ghana, Frema Osei-Opare, a conduit de nombreux ministres à apporter son soutien moral à leur collègue à l’audience du 18 novembre.
Malgré le déni catégorique des allégations portées contre lui, certains analystes continuent de penser qu’Ofori-Atta a fait plus de mal que de bien, et qu’il doit tirer sa révérence. Benjamin Otchere-Ankrah, chargé de cours sur la gouvernance à la Central University, estime qu’il devrait céder sa place à un nouveau visage, avant même la fin du travail de la commission. « Ken Ofori-Atta doit démissionner. Il a fait de son mieux. Il doit quitter la scène pour sauver sa réputation. Je pense que l’introduction de […] sang neuf au ministère des Finances ramènera la confiance des Ghanéens et des investisseurs en général », estime-t-il. « Il y a beaucoup de pression sur lui, ça pourrait lui faire perdre sa concentration. Nous ne devrions pas plaisanter [sur] la façon dont nous gérons l’économie. »
Kwasi Yirenkyi, un analyste financier, affirme que le ministre n’a pas réussi à s’expliquer devant la commission, mais qu’il a plutôt utilisé cette enceinte pour faire campagne. « Son témoignage a consisté à vanter les réalisations du gouvernement Akufo-Addo sans vraiment aborder ce qu’on lui reproche. Nous avons entendu cela maintes et maintes fois, et ce n’est pas le moment de lire des déclarations budgétaires ou de s’engager dans des gadgets politiques. Je lui donne une note inférieure à la moyenne, il doit partir », pense cet expert.
Sauvetage du FMI
La carrière d’Ofori-Atta a fait l’objet d’un examen approfondi à un moment où l’inflation au Ghana atteint un niveau record (40,4 % en octobre), où le cédi ghanéen est en chute libre et où le coût de la vie et les prix des carburants ne cessent d’augmenter, principalement en raison de la pandémie et de la crise en Ukraine. Toutefois, Kwasi Yirenkyi est optimiste sur la capacité de l’économie à rebondir après la conclusion des négociations avec le FMI. Le Ghana cherche à obtenir 3 milliards de dollars du Fonds, un montant qui devrait être intégré au budget présenté ce mois-ci.
« Nous avons presque terminé les négociations avec le FMI. Je suis convaincu qu’une fois que nous aurons conclu notre programme de viabilité de la dette, la nation retrouvera la stabilité et une marge de manœuvre budgétaire qui nous permettront de renouer avec une reprise économique et une croissance durables, grâce aux investissements que nous avons réalisés dans tous les secteurs », a conclu Ken Ofori-Atta.
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