Un sacrilège immonde

Fouad Laroui © DR

Publié le 24 septembre 2012 Lecture : 2 minutes.

Jusqu’où iront-ils ? Oseront-ils tout ? N’y a-t-il plus rien de sacré ? Peut-on commettre n’importe quel crime de lèse-humanité ? Ce sont les questions qui agitent les Marocains en ce moment à Amsterdam et dans les villes circonvoisines. Non, il ne s’agit pas du fameux film diffusé sur internet et qui a déclenché des protestations et des émeutes un peu partout dans le monde. Non, c’est bien plus sérieux, c’est plus grave, il s’agit de… cuisine ! Voici les faits : certains Marocains d’Amsterdam ont constaté avec horreur que des Chinois – encore eux ! – s’étaient mis à fabriquer et à vendre le fameux ras-el-hanout, sans lequel la gastronomie marocaine ne serait pas ce qu’elle est.

Vous me dites : c’est bizarre, pourquoi les Chinois s’intéressent-ils au ras-el-hanout ? Ça ne marchera jamais, les Marocains ne tomberont pas dans le panneau, ils n’achèteront jamais un ras-el-hanout made in Pékin ou made in l’arrière-boutique d’un louche restau cantonais. Mais justement : les Chinois ne s’intéressent pas à nous mais aux Européens qui sont en train de découvrir les trésors de la cuisine marocaine. Flairant la bonne affaire, les Fils du ciel proposent maintenant tous les ingrédients des maîtres-queux chérifiens – et donc, en particulier, le ras-el-hanout.

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L’histoire est ahurissante. Il faut savoir que cet ingrédient miracle se compose de 26 ou 27 éléments différents (ça dépend si on y met ou non un certain truc mystérieux), dont certains sont rares et ne se trouvent qu’au Maroc. Comment font les enfants de Mao pour se les procurer ? Justement, c’est là que le sacrilège commence. Ils ont analysé en gros le goût du ras-el-hanout et ont remplacé le cocktail de 26 (ou 27) ingrédients par une ou deux molécules qui donnent en gros, en très gros, le goût de l’ensemble. Deux molécules pour remplacer ma grand-mère ! Quand je vous disais qu’on est en présence d’un scandale de dimensions planétaires…

Le plus vicieux dans l’histoire, c’est que les Chinois vendent la chose dans des petits paquetages très jolis, très « peintre orientaliste allumé », avec dessus cette inscription d’une insolence sans bornes : « Le vrai ras-el-hanout. Méfiez-vous des imitations ». Incroyable, non ? De quoi se peindre en jaune et aller se pendre à la plus proche pagode, non ?

Les Marocains d’Amsterdam ne savent plus à quel saint (de l’Atlas) se vouer. Certains ont l’intention de prendre langue avec le gouvernement marocain pour riposter à cette manoeuvre déloyale de l’empire du Milieu. Il faut se pencher au plus vite sur cette question culinaire mais néanmoins cruciale… Sinon, il faudra passer aux représailles. C’est la guerre ! Nous n’hésiterons pas à élever des canards laqués dans les Doukkala, à faire pousser du riz cantonais dans le Gharb et à engraisser des porcs halal dans la Chaouïa…

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