France : Les Roms, éternels expulsés
La droite n’hésitait pas à renvoyer massivement chez eux ces Européens atypiques originaires surtout de Roumanie et de Bulgarie. Revenue aux affaires, la gauche française n’agit pas différemment.
En dépit de la promesse de campagne de François Hollande de ne pas procéder à des expulsions de Roms sans « solutions alternatives », les démantèlements de campements illégaux ont repris de plus belle depuis le mois d’août. Au point qu’ils ont ravivé le débat ultrasensible sur l’intégration de ces populations. Pour le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, c’est même l’un des dossiers chauds de la rentrée. « La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde et de l’Europe », a lancé, le 11 septembre, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls, paraphrasant Michel Rocard. Sept mille Roms seront ainsi reconduits à la frontière avant la fin du mois de septembre, nantis d’une aide au retour humanitaire (ARH).
Deux jours plus tard, à l’issue d’un voyage en Roumanie, Valls s’est interrogé sur la possibilité de revoir ce système, qui prévoit une allocation de 300 euros par adulte et de 100 euros par enfant mineur. En 2011, environ 10 000 personnes en ont bénéficié. Parmi eux, 7 284 Roumains et 1 429 Bulgares. Le nombre des Roms résidant en France est estimé à 15 000. Depuis 2007, ils bénéficient de la libre circulation au sein de l’Union européenne.
Il y a très longtemps, ils sont venus du Rajasthan. En hindi, leur nom signifie "être humain".
Mais qui sont donc ces populations très atypiques, indistinctement appelées Gitans, manouches, Tsiganes ou bohémiens ? Selon les Nations unies, les Roms (« être humain », en hindi) sont originaires du Rajasthan (Inde) et parlent le romani. Mais le terme renvoie aujourd’hui uniquement aux migrants d’Europe de l’Est, Roumanie et Bulgarie en premier lieu. En France, l’amalgame est souvent fait avec les « gens du voyage », qui n’est qu’un statut administratif appliqué aux adeptes du nomadisme. Or 80 % des 10 millions à 12 millions de Roms vivant en Europe sont sédentaires !
Voleur de poules
« Ils migrent surtout pour des raisons économiques, mais leur but est de rentrer dans leur pays d’origine, explique Michaël Guet, secrétaire du Comité ad hoc d’experts sur les questions roms (Cahrom) au Conseil de l’Europe. L’image inique du mendiant ou du voleur de poules doit disparaître. Les conditions de vie de la grande majorité d’entre eux sont certes précaires, mais d’autres sont très bien intégrés dans leurs pays d’origine. » Justement, Manuel Valls le répète, le problème des Roms doit être traité à la source. Sauf que les fonds alloués aux pays concernés par la Commission européenne afin de favoriser l’intégration des Roms ne sont pas, ou alors très mal, utilisés.
La France n’est certes pas la seule à rapatrier les Roms en situation illégale. Mais sa politique répressive diffère sensiblement de celles d’autres pays européens. Il est vrai que l’Italie, la Belgique, la Grèce, le Danemark ou la Finlande procèdent eux aussi à des démantèlements de camps et à des expulsions. Mais l’Allemagne, par exemple, a reconnu les Roms (dont le nombre y est estimé à 30 000) comme l’une des quatre minorités nationales, les plaçant de fait sous la protection de l’État. Reste que, comme la France, la République fédérale est l’un des huit pays européens (avec la Belgique, le Luxembourg, Malte, l’Autriche, le Royaume-Uni et les Pays-Bas) qui continuent d’appliquer des mesures transitoires limitant jusqu’à décembre 2013 l’accès des citoyens roumains ou bulgares, pourtant membres de l’UE, à leurs marchés du travail respectifs. En août, Jean-Marc Ayrault s’est déclaré favorable à l’assouplissement du dispositif limitant à 150 le nombre des métiers accessibles aux Roms. Une première étape vers leur intégration ?
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