Royaume-Uni : Boris Johnson, la tornade blonde

Excentrique et gaffeur, Boris Johnson régale la presse de ses frasques. Mais le maire de Londres a parfaitement réussi « ses » Jeux olympiques. Et l’on commence à parler de lui pour succéder un jour à David Cameron.

Boris Johnson, pendant les Jeux paralympiques, le 31 août. © Chen Yehua/Chine nouvelle/Sipa

Boris Johnson, pendant les Jeux paralympiques, le 31 août. © Chen Yehua/Chine nouvelle/Sipa

Fouad Laroui © DR

Publié le 21 septembre 2012 Lecture : 3 minutes.

Pour comprendre Boris Johnson, il faut oublier sa coiffure et connaître le Bullingdon. Pour ce qui est de l’étrange paillasse blonde perchée sur son crâne, elle dénote un trait de caractère très prisé outre-Manche : l’excentricité. Mais il y a des limites : l’excentricité doit s’accompagner de qualités – Johnson est cultivé, éloquent et intelligent – et elle est réservée à ceux qui sont bien nés. C’est ici que le Bullingdon Club intervient : lorsqu’il était à Oxford, le jeune Alexander Boris de Pfeffel Johnson fut invité à rejoindre ce très chic cercle d’étudiants. L’une des activités favorites de ses membres consiste à aller dîner dans un restaurant, puis, après avoir festoyé de mets fins et de vins exquis, à se lever soudain et à tout casser : assiettes et verres, mobilier, vitres, chandeliers… Tout se passe en quelques instants et les étudiants prennent la fuite avant l’arrivée de la police. Le lendemain, un membre du Bullingdon revient sur les lieux du méfait, le chéquier à la main, et paie rubis sur l’ongle la facture des dégâts. Il faut que jeunesse (huppée) se passe, mais les manants ne doivent pas trop en souffrir…

Il est à la fois libertaire et de droite, impertinent et franchement réac.

David Cameron, l’actuel Premier ministre, était membre du Bullingdon en même temps que Boris Johnson. Tous deux (qui sont d’ailleurs cousins éloignés) ont exprimé quelques regrets pour leur comportement d’alors. Avec des débuts aussi prometteurs, Johnson ne pouvait que faire la carrière traditionnelle du Tory doué, faisant des va-et-vient entre la politique (il fut député) et le journalisme : d’abord au Times, d’où il fut renvoyé pour avoir « bidonné » un article, puis au Daily Telegraph et enfin au Spectator, hebdomadaire qui se targue d’être à la fois libertaire et de droite, impertinent et franchement réac. Collant parfaitement à cette image, Johnson en fut le rédacteur en chef de 1999 à 2005. Élu en 2008 maire de Londres, ville multiculturelle, il se souvint que bien qu’Anglais jusqu’au bout de ses brogues (il descend de toutes les maisons royales anglaises depuis les Tudors), il était aussi l’arrière-petit-fils d’Ali Kemal Bey, ministre de l’Empire ottoman. Boris multi-culti ? Il l’affirma crânement : « Je suis un melting-pot ambulant : il y a en moi du chrétien, du musulman et du juif. Et ma belle-mère est sikhe. » Londres vaut bien cette messe oecuménique…

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Les cigares de Tarek Aziz

Devenu maire, Boris Johnson réussit l’exploit de faire du bon travail tout en régalant la presse de ses frasques. On ne compte plus ses liaisons (vraies ou imaginaires), ses bourdes dans le choix de ses collaborateurs et ses gaffes suivies d’excuses calamiteuses. Réussir à insulter une ville (Liverpool, dont les habitants ont selon lui « une mentalité répugnante »), un peuple (les Irlandais), puis un pays (la Papouasie-Nouvelle-Guinée, « des cannibales »), ce n’est pas rien. Il est vrai qu’on a affaire à un homme qui, en 2003, fit l’objet d’une enquête de police pour avoir dérobé des cigares à Tarek Aziz ! Mais Johnson, c’est aussi l’homme qui, un jour, sauta de son vélo quand il aperçut dans une ruelle une femme agressée par des voyous, et fonça dans la bagarre pour la délivrer. Qui peut en dire autant ?

On a ce qu’on mérite. Fascinante, excentrique, anarchique et créative, Londres mérite d’avoir Boris Johnson comme maire. La réussite éclatante des Jeux olympiques n’a fait que renforcer l’image de la tornade blonde. Et l’on parle de lui pour remplacer Cameron à la tête du Parti conservateur dans la perspective des législatives de 2015. D’un « Bullingdon » l’autre… 

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