BEAC : Je n’ai rien à me reprocher ! par Philibert Andzambé

Depuis son licenciement « sans droits de départ » de son poste de gouverneur de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac) lors du sommet des chefs d’État à Bangui en janvier 2010, le Gabonais Philibert Andzembé ne décolère pas. Et supporte encore moins de voir son nom associé au scandale des détournements de fonds au bureau extérieur de la banque à Paris (BEP), révélé à l’époque par « Jeune Afrique ». Un confidentiel paru dans J.A. no 2688, dans lequel nous annoncions la constitution, quelque peu paradoxale, du cabinet de Me William Bourdon, président-fondateur de l’association Sherpa, comme défenseur de M. Andzembé, a fait réagir ce dernier. Il nous a semblé équitable de le laisser s’expliquer.

Publié le 10 août 2012 Lecture : 3 minutes.

Deux décisions autoritaires sont à l’origine de l’anticipation de la fin de mon mandat irrévocable de sept ans en tant que gouverneur sortant de la Beac. La première est celle du gouvernement gabonais. Réuni en Conseil des ministres le 19 octobre 2009 à Libreville, il a décidé de me rappeler en vue de mon remplacement suite aux malversations du BEP de la Beac. J.A. n° 2588-2589 évoque, dans l’« interview vérité » du chef de l’État gabonais, les circonstances de cette décision.

La deuxième est celle de la conférence des chefs d’État, qui s’appuie, elle, sur les conclusions tronquées de l’audit spécifique sur le placement de 500 millions d’euros des réserves de change de la Beac auprès de la Société générale à Paris. Le communiqué final, le texte des recommandations et l’acte additionnel ont tous été signés par le président en exercice de cette conférence des chefs d’État, le président de la République centrafricaine, et par conséquent font foi.

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Ces deux décisions, sur la forme et le fond, violent les principes et les textes qui régissent la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) et la Beac. En effet, la fraude comptable qui amplifie les détournements de fonds au sein du BEP a commencé en 2000 et a permis que s’organise au fil du temps un système que l’on peut qualifier de mafieux.

Il était dès lors important pour moi d’agir avec précaution mais fermeté afin que les coupables puissent répondre de leurs actes devant la justice, mais surtout de mettre un terme définitif à ce système de fraude qui avait tissé des liens importants en Afrique et en Europe.

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C’est ainsi que dans ce dossier brûlant, dans une volonté de transparence, j’ai fait faire un audit indépendant (par le cabinet Mazars France) et que, par la suite, j’ai porté plainte contre X auprès du procureur du tribunal de commerce de Paris.

Quant au dossier du placement de 500 millions d’euros auprès de la Société générale, contrepartie déjà agréée au niveau de la salle des marchés de la Beac, il procède d’une stratégie de maximisation des réserves de change suite à la réforme du compte d’opérations intervenue en 2006. Le comité de stratégie, organe de supervision de la salle des marchés, s’est réuni le 11 décembre 2007 et a approuvé le choix de ce placement, donnant mandat au gouverneur de signer le contrat.

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J’assume les conséquences administratives de ce choix (même si la perte occasionnée cette année-là n’a pas empêché la Banque de réaliser des bénéfices record, sans aucun impact sur les réserves de change) et non celles, pénales, qui tendraient à m’impliquer dans une supposée dérive délictuelle. Sur ce dossier, la Beac a été induite en erreur par la Société générale, qui n’a pas respecté les règles d’éthique en matière financière. Une partie non négligeable de la perte occasionnée, c’est-à-dire environ 15 millions d’euros, a d’ailleurs été reversée à la Beac par la Société générale dans le courant de l’année 2010. […]

Toutes les instances de la Cemac (la conférence des chefs d’État, la commission, le comité ministériel de l’Union monétaire de l’Afrique centrale, le conseil d’administration de la Beac), pourtant dépositaires des vraies conclusions de l’audit, ont adopté un comportement conduisant à un traitement inéquitable et injuste à mon égard.

Malgré mes demandes répétées pour avoir accès à ces conclusions qui m’accusent directement, ils se sont réfugiés dans un mutisme affligeant et indigne. C’est dans ces circonstances que j’ai choisi pour ma défense le cabinet de Me Bourdon. Ce dernier faisant partie de ceux qui luttent contre la criminalité et les délits financiers. 

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