[Série] Producteurs contre multinationales, la guerre du cacao
Premier et deuxième fournisseurs mondiaux de fèves, la Côte d’Ivoire et le Ghana ont engagé un bras de fer avec les géants de l’industrie du chocolat pour obtenir une meilleure rémunération des cacaoculteurs. Une bataille de longue haleine.
Producteurs contre multinationales, la guerre du cacao
La Côte d’Ivoire et le Ghana ont engagé un bras-de-fer avec les géants nord-américains et européens de l’industrie du chocolat pour une juste rémunération des cacaoculteurs. Mais est-il vraiment possible de revoir le fonctionnement de la filière ?
Derrière la douceur associée au chocolat se cache l’âpreté du combat mené autour du cacao. Cultivées par les pays du sud, principalement en Afrique de l’Ouest ainsi qu’en Amérique latine et en Amérique du Sud, les fèves du précieux or brun sont majoritairement consommées au nord, sur les marchés européens, américains et asiatiques.
Cette réalité se traduit par une répartition déséquilibrée des revenus issus de la vente des tablettes et autres friandises (confiseries, gâteaux, pâte à tartiner…). Les producteurs finaux – multinationales du chocolat comme Lindt, Ferrero, Mars, Nestlé et Hershey’s – et les vendeurs – à savoir les supermarchés – encaissent la majeure partie des recettes générées par le secteur, estimées à 130 milliards de dollars (121,4 milliards d’euros) par an.
« Injustice »
À l’autre bout de la chaîne, dans les régions cacaoyères de la Côte d’Ivoire et du Ghana – respectivement premier et deuxième producteurs mondiaux de fèves –, les cultivateurs ne perçoivent qu’une part réduite de cette valeur, inférieure à 10 % du total. Même si les certifications « commerce équitable » et « bio » permettent d’améliorer, à la marge, la rémunération.
C’est pour changer cette donne qu’Abidjan et Accra ont engagé un bras de fer depuis 2018, nouant une alliance surnommée « l’Opep du cacao ». Son objectif : corriger « l’injustice » dont sont victimes les paysans en augmentant leurs revenus, ce qui signifie faire payer le cacao plus cher au reste de la filière, composée d’un grand nombre d’acteurs – broyeurs, exportateurs, traders en plus des chocolatiers et distributeurs déjà mentionnés.
Face à l’absence de progrès significatifs, le ton s’est durci en 2022, la Côte d’Ivoire et le Ghana menaçant même de couper l’accès aux plantations et de mettre en suspens les programmes de certifications, utilisés par l’ensemble de la filière pour garantir aux consommateurs qu’ils achètent un chocolat de qualité et durable.
Rapport de force
Cette crise n’est pas sans rappeler les précédentes qu’a connu le secteur. À la fin des années 1980, l’ouvrage de Jean-Louis Gombeaud, Corinne Moutout et Stephen Smith, intitulé La Guerre du cacao – Histoire secrète d’un embargo, revenait sur la bataille menée en 1988 par le président ivoirien Houphouët-Boigny pour faire plier les mastodontes du marché de l’or brun.
Quelques décennies plus tard, le nom de certains acteurs a changé mais le combat de fond demeure le même. Et l’offensive de ces derniers mois menée par Abidjan et Accra témoigne du fait que la « guerre du cacao » est plus que jamais d’actualité. La Côte d’Ivoire et le Ghana peuvent-il réussir leur pari et tordre le bras aux géants mondiaux du secteur ?
Alors que les consommateurs de chocolat semblent de plus en plus sensibles à son origine et à ses conditions de fabrication, est-il possible de revoir le fonctionnement de la filière ? Au regard des positions des uns et des autres, qui peut remporter le rapport de force ? Le chocolat pourra-t-il un jour être vraiment équitable ? Éléments de réponse en quatre épisodes.
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Producteurs contre multinationales, la guerre du cacao
La Côte d’Ivoire et le Ghana ont engagé un bras-de-fer avec les géants nord-américains et européens de l’industrie du chocolat pour une juste rémunération des cacaoculteurs. Mais est-il vraiment possible de revoir le fonctionnement de la filière ?
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