France : c’est la panne !
La menace de plusieurs plans sociaux vient rappeler que le pays souffre d’une grave hémorragie d’emplois industriels. Les solutions pour en sortir sont compliquées.
L’électrochoc a été l’annonce par le groupe PSA (Peugeot Citroën), le 12 juillet, portant sur la suppression de 8 000 postes sur le sol national. L’opinion publique a alors découvert que la liste des sociétés malades était longue. D’Air France au laboratoire Sanofi, en passant par les groupes de télécoms SFR et Bouygues, les métallurgistes Arcelor, Ascometal et Rio Tinto, le volailler Doux, le pétrolier Petroplus, le constructeur General Motors ou encore l’équipementier Honeywell, le nombre des emplois menacés dépasserait les 50 000.
Comme l’ont souligné à plusieurs reprises François Hollande et ses ministres, une telle avalanche s’explique par le blocage de ces suppressions de postes pendant la campagne électorale, afin de ne pas nuire aux chances du candidat Nicolas Sarkozy. Mais pas seulement. Le président de la République a beau qualifier d’« inacceptable » le plan de PSA, et son ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, convoquer les télécommunicants pour qu’ils ne suppriment pas d’emplois, ils sont démunis face à des entreprises privées en proie à de vraies difficultés.
L’industrie française est malade d’une productivité en berne.
Empêcher les licenciements ? Les milliers de suppressions deviendraient des dizaines de milliers, car ce ne serait plus des pans d’entreprises qui disparaîtraient, mais des entreprises entières empêchées d’adapter leurs coûts. Exiger le reclassement des licenciés et la revitalisation des sites abandonnés ? La loi prévoit déjà de telles thérapeutiques. Débloquer 300 millions d’euros d’argent public pour les cas les plus douloureux, comme le souhaite M. Montebourg ? La mesure n’est pas à la hauteur du défi, car l’industrie française est malade d’une productivité en berne.
"Choc de compétitivité"
Il y a dix ans, les produits français étaient 10 % moins chers que leurs équivalents allemands. Aujourd’hui, ils sont au même prix, sous l’effet des 35 heures et des alourdissements des charges. Louis Gallois, ancien patron d’EADS et nouveau commissaire général à l’investissement, appelle désormais à « un choc de compétitivité » et propose de baisser de 30 à 50 milliards d’euros les charges qui pèsent sur les entreprises françaises.
Le gouvernement explore la voie d’un tel transfert de charges vers la fiscalité via une hausse de la CSG. Pour remédier au manque de capitaux des petites et moyennes entreprises (PME), un livret d’épargne industrie est à l’étude, tout comme une dotation de plusieurs milliards d’euros pour la future banque des PME ainsi qu’un nouveau crédit d’impôt recherche. À l’initiative du syndicat Force ouvrière, on parle de recréer un commissariat au Plan afin de se donner les moyens stratégiques de la reconquête.
Les entreprises françaises n’investissent pas assez dans la recherche – notamment par rapport aux allemandes, qui dépensent 40 % de plus à cette fin.
Les pertes de parts de marché de la France n’ont pas une seule cause. Ses entreprises n’investissent pas assez dans la recherche – notamment par rapport aux allemandes, qui dépensent 40 % de plus à cette fin. « Les produits allemands possèdent un fort contenu technologique grâce à un recours permanent à la recherche, explique Bernard de Montferrand, ancien ambassadeur de France à Berlin. Leurs PME vivent en symbiose avec des laboratoires pour appliquer les dernières découvertes de ceux-ci, même dans des domaines que mépriseraient les Français, comme la modeste vis qu’une entreprise d’outre-Rhin s’est appliquée à rendre la meilleure du monde ! »
Individualisme forcené
La France a aussi un problème de compétitivité « hors coûts » qui relève de la culture et de l’éducation. Le mépris du travail manuel, que confirme la faiblesse de l’apprentissage, explique que l’industrie ne trouve pas les salariés qualifiés dont elle a besoin. Le manque de dialogue social au sein des entreprises multiplie les occasions de conflit et sabote l’amour du travail bien fait. L’individualisme forcené des patrons les empêche de travailler en équipe au profit de leur clientèle, qui a souvent l’impression qu’elle paie un maximum pour un produit minimum, sans service après-vente digne de ce nom.
Autrement dit, quand le made in Germany repose sur un travail d’équipe basé sur la confiance garantissant l’homogénéité des produits, le made in France excelle dans le jeu individuel, souvent brillant mais moins constant. À égalité de prix, la France est hors jeu. Il lui faudra maintenir le cap des réformes durant plusieurs quinquennats pour remettre ses produits en situation d’affronter la concurrence et ainsi sécuriser ses emplois.
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