France : la semaine africaine de François Hollande

Deux mois après son élection, François Hollande s’est tourné vers le continent. La première semaine de juillet, il a reçu ses homologues guinéens, gabonais et sénégalais. Au menu de leurs entretiens, les relations bilatérales, la coopération, mais aussi les crises régionales.

François Hollande et Alpha Condé, le 2 juillet à l’Elysée. © Mehdi Fedouach/AFP IMAGEFORUM

François Hollande et Alpha Condé, le 2 juillet à l’Elysée. © Mehdi Fedouach/AFP IMAGEFORUM

Publié le 12 juillet 2012 Lecture : 4 minutes.

Après s’être concentré dans les semaines qui ont suivi son élection sur les questions liées à la crise de la zone euro, François Hollande s’est offert une petite cure africaine en recevant tour à tour le Guinéen Alpha Condé (le 2 juillet), le Gabonais Ali Bongo Ondimba (le 5 juillet) et le Sénégalais Macky Sall (le 6 juillet) au palais de l’Élysée. Il s’est aussi entretenu au téléphone avec le Tchadien Idriss Déby Itno (le 5 juillet) et le Burkinabè Blaise Compaoré (le 6 juillet). Le courant est visiblement bien passé lors de ces entretiens au cours desquels ont notamment été abordées les relations bilatérales, la coopération et les questions sécuritaires (crise malienne, piraterie dans le golfe de Guinée). Désireux de rompre avec le style de son prédécesseur – adepte de la tape sur l’épaule -, le président « normal » n’a donné ni dans le paternalisme ni dans la familiarité. S’il tutoie le Nigérien Mahamadou Issoufou, qu’il fréquentait dans les réunions de l’Internationale socialiste, il vouvoie le chef de l’État gabonais.

« C’était cordial et sérieux, explique le ministre gabonais des Affaires étrangères, Emmanuel Issoze-Ngondet. On est dans la construction d’une relation. Notre président a présenté tous les grands chantiers initiés dans le cadre de la modernisation de l’État, avant d’aborder les questions de partenariat, notamment en matière de défense. » Au-delà des évidents intérêts économiques de la France au Gabon, Hollande a poliment mais fermement rappelé le principe qu’il souhaite voir guider les relations entre les deux pays : un dialogue exigeant sur les questions de gouvernance, de lutte contre la corruption et de pluralisme démocratique. Cela tombe bien : lors de l’entretien d’une demi-heure qui a débuté à 15 heures, le 5 juillet, en présence notamment du ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, c’est Ali Bongo Ondimba lui-même qui a pris l’initiative de mettre ces sujets sur la table.

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Le message du président français a réjoui, peut-être un peu trop vite, l’opposition gabonaise. Accompagnés de représentants d’une partie de la société civile et de la diaspora, ses leaders (André Mba Obame, Zacharie Myboto et Jean Eyéghé Ndong), qui s’évertuent à contester la légitimité d’Ali Bongo Ondimba, avaient été reçus la veille par les conseillers de Hollande, Hélène Le Gal et Thomas Mélonio. Ils leur ont remis un mémorandum élaboré trois jours plus tôt dans un café parisien, demandant la tenue d’une conférence nationale souveraine, l’adoption d’une nouvelle Constitution et l’organisation d’élections générales (présidentielle, législatives, locales) avant la fin de 2013. Rien que ça… « On ne partage pas forcément leurs conclusions », a-t-on expliqué à l’Élysée. D’autant que, avec quelque 15 000 ressortissants et de nombreuses entreprises installés au Gabon, des intérêts pétroliers importants et un accord de défense, Hollande entend aussi jouer la carte du réalisme.

 François Hollande et Macky Sall, le 6 juillet à l'Elysée.

François Hollande et Macky Sall, le 6 juillet à l’Elysée.

© WITT/SIPA

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"Depuis qu’il est élu je dors tranquillement"

Le président français avait commencé sa semaine africaine par une rencontre avec Alpha Condé. Au chef de l’État guinéen, il a réaffirmé son souhait de voir les élections législatives se tenir rapidement et dans de bonnes conditions pour confirmer l’ancrage démocratique du pays. Condé semble avoir compris le message, en promettant la tenue du scrutin avant la fin de l’année. Il n’a pas caché son plaisir d’être reçu à Paris. « J’ai dit au président Hollande que depuis qu’il est élu je dors tranquillement », a-t-il déclaré.

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François Hollande a conclu cette série de visites le 6 juillet à 17 heures, avec Macky Sall, qui se veut lui aussi un président « normal ». Et qui, comme Hollande en France, ne faisait pas franchement figure de favori il y a seulement un an dans la course présidentielle. Les deux hommes avaient déjà échangé à deux reprises depuis leur élection. Au menu des discussions à l’Élysée : les questions bilatérales évidemment (accord de partenariat en matière de défense, confirmation de l’engagement de 130 millions d’euros par l’Agence française de développement, investissements français au Sénégal, etc.), mais aussi les crises du moment : malienne, bissau-guinéenne et syrienne.

Lors de son entretien téléphonique avec Idriss Déby Itno, le président français a surtout abordé les questions de la sécurité en Afrique de l’Ouest, de la crise malienne, de l’instabilité en Libye, dont le chef de l’État tchadien est un fin connaisseur, et du statut de la base militaire française de N’Djamena (lire aussi p. 8). Il a également été question du Mali avec Blaise Compaoré. Les deux hommes ne se connaissaient pas, mais ils ont pu se jauger, alors que la cote du locataire du palais de Kosyam n’est pas au plus haut à Paris. Il lui est reproché d’avoir fait cavalier seul dans la crise malienne. Le Quai d’Orsay et l’Élysée travaillent depuis quelques semaines à une plus forte implication des acteurs politiques maliens, des pays africains et de la communauté internationale pour résoudre la crise. Le projet de résolution – feuille de route pour le retour à l’ordre constitutionnel – et le respect de l’intégrité territoriale du pays, adopté le 5 juillet par le Conseil de sécurité, a été porté par la France. 

Réserve

Le chef de l’État français devait finir ses rencontres africaines par un tête-à-tête avec Abdou Diouf, le secrétaire général de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), le 9 juillet à l’Élysée. Pour l’instant, il réserve sa décision de participer au sommet de l’OIF à Kinshasa en octobre, mais Diouf aimerait infléchir sa position. « Il pourrait y aller à condition que Joseph Kabila montre de nouvelles dispositions en matière de dialogue politique avec l’opposition, de transparence électorale et de respect des droits de l’homme, explique un de ses proches. Si ce n’est pas le cas, la France pourrait être représentée à un niveau inférieur. Mais une annulation ou un déplacement de la rencontre n’est pas à écarter. » 

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