Algérie : dans la chair de l’Histoire

À l’occasion du cinquantenaire de l’indépendance de l’ancienne colonie, la télévision française multiplie les témoignages.

Extrait du documentaire « Algérie, nos années pieds-rouges ». © DR

Extrait du documentaire « Algérie, nos années pieds-rouges ». © DR

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Publié le 2 juillet 2012 Lecture : 3 minutes.

D’un côté et de l’autre de la Méditerranée, d’un côté et de l’autre de l’Histoire. Comment raconter ce que l’on a vécu ? Les points de vue diffèrent, laissant aux historiens le soin de démêler le vrai du faux en naviguant dans une mer grosse de bien des possibles. Ainsi cette anecdote : les Algériens qui venaient de dire oui à l’indépendance racontent que les colons quittant le pays, en 1962, brûlaient préalablement leurs voitures afin de ne pas les laisser entre les mains des « indigènes ». Mais pour les Français contraints d’abandonner un territoire qu’ils jugeaient leur, la perspective est bien différente : pour eux, les dockers du port d’Alger laissaient volontairement choir les voitures qu’ils chargeaient dans le ventre des bateaux afin qu’elles ne fonctionnent plus… Où se trouve la vérité ? Sans doute de part et d’autre.

Cinquante ans après la proclamation d’indépendance de l’Algérie, le 5 juillet 1962, bien des acteurs de la tragédie sont encore vivants. Pour la plupart âgés, ils gardent des événements une mémoire souvent limpide, quoique partisane. Mémoire, souvenirs : ce ne sont pas exactement les termes qui conviennent. Mieux vaut parler de plaies, de blessures, de cicatrices, de deuils…

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En cette année de commémorations, la télévision française a choisi de privilégier la forme documentaire et de faire la part belle aux témoignages pêchés dans les deux camps. Ce qui en résulte ? La sensation d’une Histoire encore à vif. Combien de visages froissés et de mains tremblantes qui cherchent avec pudeur à cacher ces larmes irrépressibles, et trahissent la permanence de l’horreur vécue ? Racolage, diront certains. Non, passage obligé pour dire la réalité sans s’abstraire dans la froideur des dates et des déclarations politiques.

Pieds-rouges

À ce titre, le documentaire le plus réussi est signé Marie Colonna et Malek Bensmaïl et s’intitule 1962, de l’Algérie française à l’Algérie algérienne. Multipliant les témoignages, le film couvre la dernière année de la colonisation, et plus particulièrement la période qui s’étire entre le cessez-le-feu du 19 mars 1962 et l’élection d’Ahmed Ben Bella, le 25 septembre de la même année. Terreur organisée par l’OAS, liesse populaire de l’indépendance, enlèvements, affrontements entre l’Armée des frontières et l’Armée de libération nationale (ALN)… Les repères historiques complétés par des images d’archives permettent de situer la parole des acteurs, donnant au spectateur la possibilité de plonger dans la chair de l’Histoire.

France Télévisions propose

1962, de l’Algérie française à l’Algérie algérienne, sur France 3, en deux parties, les 3 et 10 juillet.

Algérie, nos années pieds-rouges, sur France Ô le 5 juillet après le téléfilm Le Choix de Myriam, avec Leïla Bekhti, et avant le concert de Khaled à Mawazine.

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Sur la même période – ce moment de transition qui exacerba la violence -, Algérie 1962, l’été où ma famille a disparu relève plus de la quête initiatique. À la mort de son père, Hélène Cohen découvre qu’il lui a toujours caché l’histoire dramatique de sa famille. Fin juin 1962, sa mère, sa soeur et son père ont disparu pour ne jamais revenir. En enquêtant sur ce secret de famille poignant, Hélène Cohen revient sur un épisode qui continue de hanter les deux communautés. Victimes collatérales de l’Histoire en marche ? Quand il s’agit de votre famille, de votre soeur, de votre mère, il n’existe rien de « collatéral »…

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Sur les cendres, reconstruire. La chaîne France Ô a, pour sa part, choisi un thème original : celui de ces Français qui ont soutenu le FLN – dont les fameux « porteurs de valises » – et qui après l’indépendance ont offert leurs compétences au jeune pays. Algérie, nos années pieds-rouges, d’Emmanuel Migeot, multiplie de même les témoignages d’acteurs. Mais outre le sort individuel de quelques engagés, le film – comme les deux autres – permet de saisir la complexité de cet instant où un pays pose les bases de sa future existence.

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