Syrie : complaisances complices et échanges de mauvais procédés

Quand les médias, les communicants et certains hommes politiques occidentaux frayaient avec les dictateurs, de la Syrie à la Tunisie.

Barbara Walters interviewant Bachar al-Assad, en décembre 2011. © Rob Wallace/AP/SIPA

Barbara Walters interviewant Bachar al-Assad, en décembre 2011. © Rob Wallace/AP/SIPA

ProfilAuteur_LaurentDeSaintPerier

Publié le 26 juin 2012 Lecture : 2 minutes.

Née de révélations publiées par le quotidien britannique The Daily Telegraph, la polémique a fait la une du Herald Tribune le 12 juin sous le titre « Comment les Assad ont manipulé les médias occidentaux ». Au coeur du dossier, l’interview accordée en décembre 2011 par le président syrien à Barbara Walters, pour la chaîne américaine ABC News.

De son propre aveu, la journaliste vedette de 82 ans avait obtenu l’entretien grâce à l’entregent de Shéhérazade Jaafari, 22 ans, ancienne conseillère d’Assad et fille de l’ambassadeur de Syrie à l’ONU. En retour, Walters avait recommandé la Syrienne pour un stage à CNN et une inscription à l’université Columbia, à New York. Trahie par des échanges de mails piratés, la journaliste a reconnu et regretté le conflit d’intérêts. Mais la jeune Syrienne, finalement prise à Columbia, affirme que Walters n’a été pour rien dans son admission et s’est dite victime d’une campagne de manipulation, précisant que l’interview, très peu obligeante, lui avait valu la disgrâce présidentielle.

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"Une rose dans le désert"

L’affaire a été pour le Herald Tribune l’occasion de revenir sur l’indulgence de la presse occidentale pour le couple Assad. La plus fameuse illustration en a été l’élogieux portrait d’Asma, femme de Bachar, intitulé « Une rose dans le désert », publié par Vogue fin février 2011. Mais le Herald Tribune évoquait aussi des articles des magazines Elle et Paris Match. En effet, les pages à la gloire d’Asma ont fleuri dans les kiosques de France depuis qu’en 2007 le président Nicolas Sarkozy a voulu la réhabilitation internationale d’Assad, alors ostracisé pour son rôle supposé dans l’assassinat du Premier ministre libanais Rafic Hariri, en 2005. Belle, jeune et brillante, l’épouse du président était, pour les spin-doctors du régime, l’instrument idéal pour redorer l’image de l’autocrate : sans objection, la presse française en a fait une icône orientale, avant de la transformer plus récemment en « Marie-Antoinette arabe ».

Les scandales mêlant médias, pouvoirs et sorciers de la communication posent régulièrement la question des complaisances journalistiques pour des régimes souvent plus « généreux » que recommandables. En juin 2011, Le Canard enchaîné avait ainsi révélé l’existence du réseau d’influence médiatique mis à la disposition du président tunisien Ben Ali par l’agence Image 7 d’Anne Méaux : de grands patrons comme Étienne Mougeotte (Le Figaro), Nicolas de Tavernost (M6) et Dominique de Montvalon (Le Parisien) s’étaient ainsi vu offrir de luxueux séjours en Tunisie. C’était en 2009. Ben Ali était alors « notre bon ami ». Et Bachar rimait encore avec espoir.

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