Coupures d’électricité : la voie judiciaire pour les délestés ?
Alors que les coupures électriques empoisonnent les Sud-Africains, des partis et un syndicat menacent le gouvernement de poursuites devant les tribunaux. Peut-être un modèle à suivre…
-
Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 19 janvier 2023 Lecture : 2 minutes.
« Délestages » : le mot qui désigne la suspension temporaire de l’approvisionnement en énergie électrique, dans le but de rétablir l’équilibre entre la production et la consommation, vient de résonner aux oreilles de Français incrédules, depuis la crise ukrainienne et ses effets indirects sur le marché du gaz russe. Les Subsahariens, eux, sont coutumiers du fait, notamment de baisses de tension fréquentes et de coupures intempestives, de la RDC à la Côte d’Ivoire, en passant par le Burkina Faso…
L’impact des suspensions de « jus » ne concerne pas que le confort de populations volontiers ventilées, climatisées et connectées, en cette ère du tout-numérique. Souvent en saison sèche, les délestages prolongés et récurrents handicapent sérieusement le développement économique et accentuent la fracture sociale entre ceux qui ont les moyens d’acquérir des groupes électrogènes et ceux qui ne peuvent que sangloter dans le noir.
Les solutions supposent une gouvernance rigoureuse, une « vérité des prix », de la recherche, de l’innovation en matière d’énergies renouvelables et d’investissements dont les effets se font rarement sentir à court terme, que les programmes soient publics ou privés. L’Africain lambda que ne satisfait qu’approximativement le système D finit par ronger son frein. Pour ceux qui ne se résignent pas à la fatalité, il reste le militantisme…
Ultimatum
Au pays de la Teranga, Youssou Ndour avait emprunté aux Beatles la mélodie « Obladi, Oblada » en y apposant les paroles « Leep mo Lendem », littéralement « tout est dans l’obscurité », en wolof. Dans la foulée des artistes, les politiciens qui ne sont pas au pouvoir et les syndicats pourraient jouer une partition nouvelle, si l’on en croit l’exemple sud-africain, celle des poursuites judiciaires.
C’est un ultimatum que plusieurs partis d’opposition et un syndicat de chefs d’entreprise viennent de fixer aux autorités de Pretoria. Une lettre de mise en demeure adressée au ministre des Entreprises publiques et au directeur général de la compagnie nationale d’électricité Eskom accorde un délai qui court jusqu’à ce 20 janvier. Si l’approvisionnement en électricité n’était pas stabilisé d’ici là, l’État risquerait des poursuites judiciaires.
Depuis plusieurs mois, l’Afrique du Sud, pays le plus industrialisé du continent, fait face à des délestages électriques record, de l’ordre de plusieurs heures quotidiennes. Ladite crise énergétique vient même de convaincre le président Cyril Ramaphosa d’annuler sa participation au Forum économique mondial qui se tient à Davos. Les opérateurs économiques sud-africains affirment avoir perdu, en 2022, des centaines de millions de dollars. Or Eskom semble plus que timorée à propos d’une éventuelle amélioration de la situation en 2023.
La menace de procès contre l’État pourrait inspirer les militants d’autres pays. Mais quels impacts concrets peut-on attendre de tels verdicts ? En 2021, le tribunal administratif de Paris condamnait l’État français pour inaction climatique, quelques mois avant qu’Emmanuel Macron ne soit réélu…
L'éco du jour.
Chaque jour, recevez par e-mail l'essentiel de l'actualité économique.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Économie & Entreprises
- La Côte d’Ivoire, plus gros importateur de vin d’Afrique et cible des producteurs ...
- Au Maroc, l’UM6P se voit déjà en MIT
- Aérien : pourquoi se déplacer en Afrique coûte-t-il si cher ?
- Côte d’Ivoire : pour booster ses réseaux de transports, Abidjan a un plan
- La stratégie de Teyliom pour redessiner Abidjan