France – Allemagne : après Merkozy, Merkollande ?

L’une est une inconditionnelle de la rigueur. L’autre veut privilégier la croissance. En dépit de leurs différences, Angela Merkel et François Hollande sont condamnés à s’entendre.

Au sommet de l’Otan, le 21 mai à Chicago. © SIPA

Au sommet de l’Otan, le 21 mai à Chicago. © SIPA

Publié le 12 juin 2012 Lecture : 3 minutes.

La page « Merkozy » tournée, l’arrivée de François Hollande va-t-elle, en pleine crise de la zone euro, provoquer un durcissement des relations franco-allemandes ? Les débuts ont été houleux. Pendant la campagne électorale française, la chancelière avait pris parti pour Nicolas Sarkozy et boycotté le candidat socialiste. De son côté, ce dernier avait tiré à boulets rouges sur la stratégie allemande de sortie de crise, fondée sur l’austérité. Très attachée à l’orthodoxie budgétaire, Merkel souhaitait imposer à l’Europe une relance par l’offre et la compétitivité fondée sur une profonde réforme du marché du travail et la libéralisation de l’économie – comme l’Allemagne le fit dans les années 2000. Hollande était favorable à une relance par la croissance et l’investissement. L’introduction d’eurobonds (obligations communes émises par plusieurs pays de la zone euro) et l’élargissement du rôle de la Banque centrale européenne étaient au coeur du différend.

Le terme de croissance est apparu dans la bouche de Merkel, même si des désaccords subsistent sur la manière de la mettre en oeuvre.

La realpolitik semble avoir repris le dessus. C’est ce que suggèrent les premières rencontres Merkel-Hollande : à Berlin, le 15 mai ; lors du G8 à Camp David, le 19 ; puis à Bruxelles, le 23. « La France et l’Allemagne sont obligées de travailler ensemble. Notre imbrication économique et politique est trop importante pour qu’une rupture soit envisageable », estime Andreas Schockenhoff, président du groupe d’amitié France-Allemagne au Bundestag. Déjà, les lignes bougent…

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Le terme de croissance est apparu dans la bouche de Merkel, même si des désaccords subsistent sur la manière de la mettre en oeuvre. La chancelière s’est déclarée prête à faire un geste sur l’augmentation du capital de la Banque européenne d’investissement et n’exclut plus d’assouplir sa position sur les eurobonds, à condition que les pays de la zone euro s’engagent à assainir leurs finances et à entreprendre des réformes. Côté français aussi, le discours change. On reconnaît que la maîtrise des déficits est une obligation. On ne souhaite plus renégocier le pacte budgétaire européen, seulement lui ajouter un volet croissance. Un compromis est-il possible ? Les prochains sommets, surtout celui avec l’Italie et l’Espagne, fin juin, seront décisifs.

Entre deux feux. « Un clash n’est pas exclu, mais il est peu vraisemblable », analyse Claire Demesmay, de la Société allemande de politique étrangère, à Berlin. « Le compromis est à la base du couple franco-allemand. Après la parenthèse ouverte à la fin du quinquennat de Sarkozy, nous revenons à un schéma plus classique. » De fait, l’histoire récente des relations entre les deux voisins a été marquée par plusieurs duos politiquement hétérogènes : Giscard d’Estaing-Schmidt, Mitterrand-Kohl, Chirac-Schröder… En outre, les personnalités sobres, pragmatiques et portées à la conciliation de Merkel et Hollande semblent a priori s’accorder.

Reste une inconnue : la politique intérieure. Merkel est prise entre deux feux. D’un côté, le SPD, d’accord avec le PS français sur la croissance, profite de ses victoires aux élections locales pour accroître la pression sur la chancelière, qui aura besoin d’une majorité des deux tiers pour ratifier le traité budgétaire. De l’autre, selon un sondage récent, près de 80 % des Allemands se déclarent opposés aux eurobonds. Céder un an avant la fin de son mandat pourrait lui coûter cher…

Quant à la France, il ne fait aucun doute qu’elle devra réduire son décrochage économique par rapport à l’Allemagne si elle veut que ses exigences soient prises au sérieux. 

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