Au Nigeria, Atiku Abubakar peut-il gagner le Nord ?
Pour la première fois depuis 2003, il n’y aura pas de bulletin au nom de Muhammadu Buhari lors de la présidentielle du 25 février. Mais Atiku Abubakar, musulman lui aussi, espère bien conquérir le septentrion et son électorat.
Ancien vice-président aujourd’hui candidat à l’élection présidentielle du 25 février prochain, Atiku Abubakar aborde le scrutin avec un problème de taille : il va devoir trouver une solution à la délicate équation entre Nord et Sud dans un pays où la géographie tient souvent lieu de consigne de vote.
>> À lire sur The Africa Report – Nigeria 2023 : Can Atiku win the north?
Investi par le People’s Democratic Party (PDP), il devrait être tranquille dans le Sud, bastion historique du parti depuis le retour à la démocratie en 1999. Là où le combat sera rude, et son issue incertaine, c’est paradoxalement dans le Nord, sa région d’origine. Avec la crise au sein d’un PDP secoué par la fronde de cinq gouverneurs, dont celui de l’État de Rivers, Nyesom Wike, Atiku Abubakar sait qu’il pourrait avoir des difficultés à y faire le plein de voix.
Réelle dynamique
Le président sortant, Muhammadu Buhari, était certes parvenu à emporter le Sud en 2015 et 2019, mais il passait surtout pour être, depuis sa première participation à une élection présidentielle en 2003, le « roi du Nord ». Maintenant que son nom ne figurera plus sur le bulletin de vote, Atiku Abubakar espère hériter de cet immense réservoir d’électeurs.
Le candidat du PDP, en lice pour la cinquième fois dans la course à la magistrature suprême, reste en pole position pour s’y démarquer : nordiste, musulman, il est considéré par une grande partie de la population de la région comme le seul capable de défier le parti au pouvoir, le All Progressives Congress (APC). Mais il est confronté à plusieurs défis de taille.
Le premier est le recul de son parti dans la région, qui ne contrôle que 4 des 19 États du Nord. Il doit également composer avec les ambitions présidentielles de l’ancien gouverneur de l’État de Kano, Rabiu Musa Kwankwaso, porte-drapeau du New Nigeria People’s Party (NNPP). Kwankwaso et Atiku sont les deux principaux politiciens du septentrion à viser le poste suprême et, à moins que des compromis ne soient trouvés, la dispersion des votes traditionnels du PDP pourrait jouer en faveur du candidat de l’APC, Bola Tinubu.
Mais des analystes soulignent que, dans le Nord, prévaut l’habitude de suivre celui qui représente le mieux ses intérêts. C’est peut-être ce sentiment qu’Atiku Abubakar espérait attiser à Kaduna, lors d’un meeting devant un groupe de dirigeants du Nord, où il a déclaré : « Ce dont le Nordiste moyen a besoin, c’est de quelqu’un qui vient du Nord et qui comprend cette partie du pays… Il n’a pas besoin d’un candidat yoruba ou igbo. Je me présente devant vous en tant que pan-nigérian d’origine nordiste. » Bien que cette déclaration ait été très critiquée, le message est passé, et a atteint sa cible.
Ramener le calme
Yusuf Suleiman Dambatta, candidat au poste de gouverneur du PDP dans l’État de Kano, explique que la stratégie d’Atiku Abubakar consiste à tendre la main à toutes les « personnes influentes dans le Nord, y compris aux jeunes et aux femmes » – il espère que la puissance de la machine électorale du PDP fera le reste.
Selon Yusuf Suleiman Dambatta, le Nord a cette « conviction écrasante que seul Atiku possède l’expérience et les antécédents économiques requis pour ramener le calme dans une région en proie à la pauvreté, au chômage, à l’insécurité et à une inflation brutale ». À l’en croire, « la désignation d’Atiku comme candidat du PDP a ravivé la confiance dans la région et donné un nouvel élan au PDP ».
Son de cloche différent dans le camp adverse où Festus Keyamo, porte-parole de la campagne de Bola Tinubu : « Il a beau être originaire du Nord-Est, il a perdu quatre des États du cette région en 2019. Et dans le Nord-Ouest, il n’a même pas gagné un seul des sept États. » Selon Keyamo, il ne fait aucun doute que le candidat du PDP devra s’incliner dans les urnes face à Bola Tinubu, sudiste certes, mais musulman lui aussi.
Bien s’informer, mieux décider
Abonnez-vous pour lire la suite et accéder à tous nos articles
Les plus lus – Politique
- Sexe, pouvoir et vidéos : de quoi l’affaire Baltasar est-elle le nom ?
- Législatives au Sénégal : Pastef donné vainqueur
- Au Bénin, arrestation de l’ancien directeur de la police
- L’Algérie doit-elle avoir peur de Marco Rubio, le nouveau secrétaire d’État améric...
- Mali : les soutiens de la junte ripostent après les propos incendiaires de Choguel...