États-Unis : Obama raconté par ses ex
Une nouvelle biographie du président américain, Barack Obama, paraîtra le mois prochain aux États-Unis. David Maraniss, son auteur, a notamment retrouvé plusieurs de ses anciennes petites amies…
«J’ouvre la porte de sa chambre, qu’il laisse fermée, et j’entre dans un espace chaud et privé, où se mêlent les odeurs qui évoquent si fort sa présence, sa vivacité, ses habitudes – l’odeur de transpiration du joggeur, le spray déodorant, le tabac, le raisin sec, le sommeil, la respiration »… Non, vous ne rêvez pas : vous êtes dans la chambre de Barack Obama ! Celle qu’il louait à New York en 1984, alors que, fraîchement diplômé de l’université Columbia, le jeune homme de 22 ans travaillait – sans enthousiasme – pour la société Business International, rédigeant des newsletters pour des entreprises exportatrices.
La femme qui le décrit dans son intimité, le dimanche, « paressant, buvant du café et faisant les mots croisés du New York Times, torse nu, en sarong bleu et blanc », est l’un de ses premiers amours. Genevieve Cook, une Australienne de 25 ans à l’époque, que le futur président des États-Unis a, de son côté, décrit dans son autobiographie Les Rêves de mon père : « C’était une Blanche. Elle avait les cheveux bruns et des yeux tachetés de vert. Nous sommes sortis ensemble près de un an, surtout les week-ends. Nous nous retrouvions parfois dans son appartement, parfois dans le mien. »
Même si Obama a admis avoir mélangé dans son livre les anecdotes et les descriptions ayant trait à ses ex-petites amies pour ne pas les mettre dans l’embarras par la suite, la jeune femme qu’il évoque est bel et bien celle qu’a retrouvée trente ans plus tard David Maraniss, dont la biographie Barack Obama : The Story doit sortir le 19 juin aux États-Unis (aux éditions Simon & Schuster).
Vie sentimentale et années de formation
Maraniss n’en est pas à son « scoop d’essai » : en 1993, ce journaliste du Washington Post avait reçu le prix Pulitzer pour sa biographie de Bill Clinton. Cette fois, il lève le voile sur la vie sentimentale et les années de formation d’un jeune homme brillant et ambitieux, mais aussi très perturbé par l’absence de son père et en quête de ses origines. Alors que l’on croyait tout savoir sur le premier président noir des États-Unis – ses années passées en Indonésie et à Hawaii, l’influence de sa mère, sa proximité avec ses grands-parents… -, des témoignages recueillis par Maraniss éclairent d’un nouveau jour la personnalité du futur chef de l’État. En particulier les souvenirs d’Alex McNear, qu’Obama avait rencontrée à l’Occidental College de Los Angeles et avec laquelle, malgré leur liaison, il échangeait des lettres plus débordantes de références littéraires que de sensualité, et de Genevieve Cook, qui tenait à l’époque un journal intime, dont le journaliste livre de larges extraits, divulgués en avant-première par le magazine Vanity Fair.
Noël 1983. Barack et Genevieve se rencontrent lors d’une fête organisée par une connaissance dans le quartier d’East Village, à New York. S’y côtoient des étudiants récemment diplômés et des jeunes qui travaillent dans l’édition. On passe Ella Fitzgerald à la radio. Dans la cuisine, Genevieve tombe sur « un type nommé Barack, portant des jeans, un tee-shirt et une veste en cuir sombre ». Ne pouvant trouver un verre, elle boit du Baileys à la bouteille et ils n’échangent que quelques mots. En fin de soirée, pourtant, alors qu’elle s’apprête à partir, il lui demande d’attendre un peu. Son accent australien l’intrigue. Viendrait-elle d’« ailleurs », comme lui ? Ils discutent une partie de la nuit sur un pouf orange et se découvrent beaucoup de points communs. Tous deux ont passé leur enfance en Indonésie à la même époque. Tous deux se sentent étrangers à leur milieu familial et, finalement, très seuls.
"Déjà si vieux à l’âge de 22 ans"
Fille d’un brillant diplomate australien et d’une historienne de l’art, Genevieve, depuis le divorce de ses parents, vit avec sa mère et son beau-père, qui appartient à l’establishment démocrate. Intelligente et cultivée, elle attire Barack. Mais, si elle en est amoureuse, lui n’éprouvera jamais le besoin de s’engager davantage. Tout au long de son journal, la jeune femme constate avec tristesse et lucidité que ce garçon à qui elle reconnaît d’éminentes qualités – son sérieux, sa vitalité, son intégrité – ne sera pas l’homme de sa vie. « Comment est-il déjà si vieux à l’âge de 22 ans ? » s’étonne-t-elle.
Tout en admettant qu’elle l’aime de plus en plus et que « la chaleur sexuelle est bel et bien là », elle se surprend à vouloir se détacher de cette relation troublante. « Je trouve son attitude très menaçante. Distance, distance, distance et méfiance », poursuit-elle en décrivant un être « vide à l’intérieur ». « Même s’il emploie des mots doux et peut être ouvert et confiant, il y a aussi cette froideur… Il veut préserver notre relation mais veut aussi se protéger, dans un certain sens, d’un engagement immédiat », note-t-elle. Un jour qu’elle lui dit « je t’aime », il lui répond… « merci » ! Pas vraiment romantique.
Barack emménage pourtant quelques mois dans l’appartement de Genevieve, faisant la cuisine et préparant des sandwichs au thon à la manière de son grand-père à Hawaii. Mais les disputes, jointes au désarroi croissant de la jeune femme, les séparent. « Je me rends compte combien, depuis le début, je me sens plus impliquée que lui, écrit-elle le 23 mai 1985, jour de leur rupture. J’espérais qu’avec le temps il finirait par se laisser aller, par tomber amoureux de moi. »
"Une cicatrice émotionnelle"
À ces regrets se mêle une analyse très fine de la psychologie de Barry : « Je me demande si sa réserve n’est pas liée à une cicatrice émotionnelle qui fait qu’il lui est difficile de s’impliquer », observe-t-elle. Les amis pakistanais qu’Obama fréquentait à l’époque en tirent les mêmes conclusions. Beenu Mahmood, par exemple : « Cette période a été cruciale pour lui, car il s’efforçait de passer de l’état de citoyen du monde à celui de citoyen américain, et de son identité blanche à son identité noire. »
De fait, il dévore les ouvrages d’auteurs africains-américains comme Maya Angelou, Toni Morrison, Toni Cade Bambara, Ntozake Shange et Ralph Ellison, dont il lit et relit Homme invisible. Il est « hanté » par la figure de son père, raconte Genevieve, qui l’a vu se réveiller bouleversé après un rêve dans lequel il a vu le défunt lui tendre les bras et lui dire qu’il l’aimait. « Il me confiait qu’il avait l’impression d’être un imposteur, parce qu’il était tellement blanc […]. Dans sa quête pour résoudre son ambiguïté [raciale], il devint très clair pour moi qu’il avait besoin de devenir noir. »
À plusieurs reprises dans son journal, Genevieve décrit de manière prémonitoire la femme que choisira Barack : « Une femme très forte, très droite, une battante, une femme enjouée, expérimentée – une femme noire, c’est ce que je vois toujours. » Cinq ans plus tard, en 1989, Barack allait rencontrer une certaine Michelle Robinson… L’année précédente, Genevieve avait épousé Mohamed Moustafa, un comptable new-yorkais d’origine égyptienne. Selon David Maraniss, qui l’a interviewé pour rédiger sa biographie, le président Obama s’est montré curieux de savoir ce qu’était devenu son amour de jeunesse.
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