Retrait du M23 et des groupes armés de RDC : l’EAC durcit le ton
Les dirigeants des pays de la Communauté des États d’Afrique de l’Est (EAC), réunis ce samedi en sommet extraordinaire au Burundi pour discuter de la situation sécuritaire dans l’est de la RDC, ont appelé à un « cessez-le-feu immédiat de toutes les parties » et à un retrait de tous les groupes armés, « y compris les étrangers ».
Les chefs d’État de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) ont appelé à un « cessez-le-feu immédiat de toutes les parties » et à un retrait de tous les groupes armés, « y compris les étrangers », dans un communiqué publié à l’issue du sommet extraordinaire qui s’est tenu ce samedi 4 février à Bujumbura, la capitale économique du Burundi, pour discuter de la situation sécuritaire dans l’est de la RDC.
Ils ont demandé aux chefs des armées de se réunir d’ici une semaine afin de fixer un calendrier pour ce retrait, et souligné « la nécessité d’un dialogue renforcé entre toutes les parties ». Cette réunion intervient en pleine recrudescence des violences dans l’est de la RDC.
Feuille de route pour la paix
Dans la province congolaise du Nord-Kivu, la rébellion du M23, que Kinshasa accuse le Rwanda de soutenir, s’est emparée de larges territoires riches en minerais, et elle continue d’avancer malgré une feuille de route pour la paix conclue à Luanda, en Angola, en juillet 2022. Plusieurs initiatives diplomatiques ont été lancées pour faire taire les armes et apaiser les tensions, en vain jusqu’à présent. « Les discussions devraient se concentrer sur l’évaluation de la feuille de route de Luanda qui exigeait le retrait effectif et définitif des troupes du M23/RDF (Forces de défense rwandaises) des zones occupées avant le 15 janvier », a déclaré samedi la présidence congolaise.
« Les troupes terroristes du M23 n’ont jamais quitté ces zones, au contraire le M23 et ses alliés ont élargi leurs zones d’occupation », a-t-elle ajouté. Si la RDC accuse le Rwanda de soutenir le groupe rebelle, ce qui est corroboré par des experts de l’ONU et les pays occidentaux, Kigali s’en défend. Il s’agit de « parvenir à des décisions qui amélioreront la situation sécuritaire et faciliteront le rétablissement de la paix dans l’est de la RDC », a déclaré sur Twitter l’actuel président de l’EAC, le président burundais Évariste Ndayishimiye.
La coordination humanitaire de l’ONU en RDC (Ocha) a assuré samedi que des dizaines de milliers de personnes étaient « prises dans l’étau des violences armées » face à l’avancée récente de la rébellion. Les rebelles se sont emparés de plusieurs localités dont Kitshanga, ville d’environ 60 000 habitants, et Kirolirwe, provoquant la fuite de plusieurs milliers de personnes ces derniers jours. L’armée a reconnu s’être retirée de certaines localités pour, selon elle, épargner les populations civiles.
Outre les présidents burundais et congolais, participent au sommet les chefs d’État rwandais Paul Kagame, kényan William Ruto, ougandais Yoweri Museveni et tanzanienne Samia Suluhu Hassan. Cette rencontre est convoquée alors qu’une vive tension persiste entre la RDC et le Rwanda, et se tient peu après la visite du pape François à Kinshasa, où il a condamné les « cruelles atrocités » perpétrées dans l’est de la RDC. De nombreux groupes armés y sévissent depuis des décennies, dont beaucoup sont un héritage des guerres régionales qui ont éclaté dans les années 1990-2000.
« Clarification urgente »
Pour lutter contre ces groupes, l’EAC a créé en 2022 une force régionale devant comprendre des militaires kényans – arrivés à Goma à partir de novembre –, ougandais, burundais et sud-soudanais. Le mini-sommet réuni le 23 novembre à Luanda lui a confié la mission de « faire usage de la force » contre les rebelles du M23 s’ils refusaient de se retirer des zones occupées, ce qu’elle n’a pas encore fait. À Bujumbura, le président Tshisekedi « entend clarifier le mandat de la force régionale », a déclaré samedi la présidence congolaise.
À la demande de Kinshasa, cette force ne comprend pas de troupes rwandaises, mais quelques officiers rwandais étaient toutefois présents à son quartier général de Goma. Fin janvier, Kinshasa a fait savoir que ces officiers avaient été « enjoints de quitter le sol congolais pour des raisons sécuritaires ». Dans une lettre au ministre congolais des Affaires étrangères, le secrétariat général de l’EAC a demandé « une clarification urgente » sur cette décision.
Cette semaine encore, durant la visite du pape François à Kinshasa, Félix Tshisekedi a réitéré ses accusations contre Kigali. « Outre des groupes armés, des puissances étrangères avides des minerais contenus dans notre sous-sol commettent, avec l’appui direct et lâche de notre voisin le Rwanda, de cruelles atrocités », a-t-il déclaré.
Rapprochement rwando-burundais
Dans une déclaration avant le sommet, William Ruto a demandé que les riches ressources minières de RDC, à l’origine des nombreux conflits en cours, soient protégées. « Le moment est venu depuis longtemps pour la communauté internationale d’auditer avec la plus grande vigilance les chaînes d’approvisionnement industrielles et de s’assurer que la production et la consommation mondiales respectent la souveraineté congolaise en matière de ressources et ne profitent pas des conflits et des souffrances humaines », a-t-il déclaré.
Un début de rapprochement rwando-burundais se noue par ailleurs en marge du sommet : c’est la première visite de Paul Kagame au Burundi depuis 2013. Les deux pays avaient jusqu’alors des relations tendues. Le Burundi a notamment accusé le Rwanda d’abriter les responsables d’un coup d’État raté en 2015. En 2020, Paul Kagame avait exhorté son homologue Évariste Ndayishimiye, élu depuis peu, à normaliser les relations diplomatiques, mais cette demande avait alors été rejetée, qualifiée d’« hypocrite ».
(avec AFP)
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