Facebook bientôt face à des juges kényans ?
Le temps où les GAFA échappaient aux législations nationales est-il révolu ? La justice kényane vient de se déclarer compétente pour poursuivre la société Meta sur son territoire…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 9 février 2023 Lecture : 2 minutes.
Dans une décision rendue ce lundi 6 février, le juge kenyan Jacob Gakeri a débouté Meta, la maison mère de Facebook, qui tentait de faire annuler des poursuites engagées par un ancien employé de son sous-contractant Samasource Ltd, dans la capitale Nairobi.
La plainte de Daniel Motaung, ancien modérateur local de Facebook, concerne des conditions de travail qu’il qualifie d’inhumaines, voire de travail forcé. Il évoque notamment des horaires de travail déraisonnables, des rémunérations aléatoires, l’absence de droit de représentation syndicale, mais aussi la mise en danger présumée de la santé mentale des travailleurs, par l’exposition traumatisante à des contenus qui vont de viols à des décapitations et autres tortures.
L’entreprise de Mark Zuckerberg arguait que l’employeur chargé de jauger les publications n’était qu’un sous-contractant local, susceptible, lui, de répondre devant un tribunal kenyan chargé des relations sur le marché du travail, à l’inverse du groupe américain échappant, selon Meta, à la juridiction du Kenya où il n’est pas formellement implanté. Le juge ayant tranché, Meta Platforms et sa filiale Meta Platforms Ireland seront donc considérés comme « des parties à part entière » potentiellement poursuivies dans cette affaire, dont la prochaine étape est fixée au 8 mars.
Modération algorithmique
Meta est régulièrement accusée de négliger le travail de modération humaine des publications, ayant notamment recours à des algorithmes qui ne filtrent pas assez les contenus haineux. Moins désuet en Afrique qu’ailleurs, Facebook réagirait particulièrement lentement aux crises du continent, notamment en Éthiopie.
En plus de la procédure initiée par Daniel Motaung, Meta fait l’objet d’une plainte d’une ONG kényane et de deux Éthiopiens, toujours devant la justice kényane. Les plaignants affirment que des discours incendiaires ont été non seulement validés mais encouragés, sur Facebook, dans le contexte du conflit meurtrier du Tigré. Comme les réfugiés rohingya, en 2021, ils réclament la création d’un fonds –cette fois de 1,6 milliard de dollars– en faveur des victimes de contenus à caractère haineux.
Quête de buzz pour audience monétisée ? Convoquée cette fois en justice, en Afrique de l’Est, Facebook ne pourrait plus se réfugier dans la virtualité des métavers…
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