Présidentielle française : pourquoi pas un Loft Story politique ?

JOSEPHINE-DEDET_2024

Publié le 2 mai 2012 Lecture : 2 minutes.

C’est l’heure du débat. Le moment fatidique où les finalistes du premier tour s’affrontent devant des millions de Français. En 1974, il y eut le choc Giscard-Mitterrand : le premier l’emporta en lançant à son rival son célèbre « vous n’avez pas le monopole du coeur ». Il y eut le contre-choc de 1981, quand Mitterrand, traité par Giscard d’homme du passé, lui rétorqua qu’il était, lui, l’homme du passif. Puis le duel glacial de 1988, tout au long duquel le président Mitterrand, du haut de son Olympe, affecta d’appeler Chirac « monsieur le Premier ministre ». Passons sur celui de 2002, puisqu’il n’eut pas lieu, Chirac refusant de débattre avec Jean-Marie Le Pen, ou sur celui de 2007, où l’indignation de Ségolène Royal (« non, je ne me calmerai pas ») ne sonna pas assez juste pour déstabiliser un Sarkozy qui jouait la force tranquille.

Pourtant aseptisé et filmé dans un décor sans âme, ce débat fait partie des rituels de la République. Est-il toujours aussi décisif ? « Je n’en suis pas sûr, confie le réalisateur Serge Moati. Quand il n’y avait que trois chaînes, c’était le grand, l’unique rendez-vous démocratique. Aujourd’hui, avec la multiplication des chaînes et des émissions politiques durant la campagne, il s’est banalisé. N’empêche qu’il ne faut pas le perdre ! »

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Et pour remporter la mise, tous les coups sont permis. Les écuries rivales se livrent à un concours de chicanes, réclament que le siège de leur poulain soit rehaussé d’un centimètre ou que les caméras flattent son charmant minois… En 1981 et 1988, Moati a pratiqué ces tours de malice au nom du candidat Mitterrand, multipliant les exigences en apparence techniques, mais avant tout destinées à exaspérer son concurrent.

Toujours fidèle à la gauche, ce grand professionnel* n’en jauge pas moins avec objectivité les atouts des protagonistes du duel télévisé du 2 mai. « Étant le favori, Hollande ne doit pas s’éloigner de sa trajectoire, qui a été cohérente pendant toute sa campagne. Je pense que Sarkozy ne sera pas là où on l’attend, c’est-à-dire excité. Ce n’est pas son intérêt. » Le défi qu’il a lancé à Hollande (débattons trois fois, si tu n’es pas qu’un "capitaine de pédalo" – comme dirait Jean-Luc Mélenchon) et que le « candidat du changement » a repoussé en invoquant « la tradition » est-il dans l’intérêt de la démocratie ? « Il y a déjà trop de débats, on frise la saturation. Pourquoi, tant qu’on y est, ne pas organiser à leur intention une sorte de Loft Story ? On les verrait cuisiner, repasser, manger, et les téléspectateurs taperaient sur un bouton pour dire qui ils préfèrent : 1 pour Sarkozy, 2 pour Hollande », ironise Moati.

« Je leur conseille plutôt de se détendre le jour J, de parler et de rire avec des amis. Un débat, c’est un moment de plaisir. » Il aurait pu leur conseiller de prendre exemple sur Mitterrand, qui, en 1981, avant d’entrer sur le plateau, avait évoqué devant lui non pas les courbes du chômage, mais celles, plus voluptueuses, de Brigitte Bardot. Qui a dit que le pouvoir est un aphrodisiaque ? 

* Son film Elysée 2012, la vraie campagne sera diffusé sur France 3 le 7 mai, à 20 h 50.

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