Qui garde les gardiens ?

Fouad Laroui © DR

Publié le 9 mai 2012 Lecture : 2 minutes.

Voici une histoire dont je ne sais s’il faut en pleurer ou en rire – du coup, je vous la refile, comme une patate chaude… Il s’agit d’un jeune Marocain des environs de Tilburg, aux Pays-Bas, qui fait les 400 coups pendant son adolescence – de petits larcins, par-ci par-là… -, puis qui passe à la délinquance sérieuse, puis, carrément, aux braquages. Il est très habile et jamais la police ne réussit à l’arrêter. Son signalement est diffusé à chaque fois que des caméras de surveillance arrivent à capturer son visage lors d’un de ses méfaits, mais lesdites caméras ne sont pas en haute définition – ce que (soit dit entre parenthèses) je ne comprends pas : dans le moindre appareil photo à dix balles on a une qualité parfaite de définition, genre un milliard de pixels. Les caméras de surveillance donnent des images dignes des films super-8 de contrebande ? Mais bon, revenons à nos moutons, c’est-à-dire à Abderrahim – appelons-le ainsi. Toutes les brigades de police sont à ses trousses, mais en vain.

Et puis, un jour, miracle, Abderrahim rencontre une jeune et douce Lamia, il tombe amoureux, elle aussi, les deux tourtereaux décident de se marier et de fonder une famille. Abderrahim dit adieu à sa carrière de brigand et le voici en quête d’un métier honnête. Le problème, c’est qu’il a le niveau bac moins 4 et qu’à part ses muscles et sa débrouillardise il n’a pas beaucoup d’atouts pour entrer chez Philips ou AkzoNobel.

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Finalement, ô joie, ô bonheur, Abderrahim trouve dans le journal l’annonce providentielle. C’est un métier stable et honnête : gardien de prison. Problème : il est, répétons-le, recherché par toutes les polices du royaume. No problemo, se dit notre ami : il prend les papiers de son frère, passe les entretiens d’embauche ainsi que les tests physiques, et le voici promu gardien de prison dans la bonne ville de Breda – où tous les flics sont à ses trousses. Et c’est ainsi qu’il passe cinq ans de tranquillité absolue, vêtu de son bel uniforme de maton d’élite.

Entre nous, le dernier endroit la police irait chercher un malfrat en cavale, c’est en taule, non ? Deux mignonnes petites filles naissent au foyer d’Abderrahim et de Lamia, Dieu est grand, le ciel est bleu, il pleut des nounours.

Et puis, ce qui devait arriver arriva : un des bandits sur lesquels veillait Abderrahim le reconnut et se souvint qu’ils avaient braqué ensemble quelques banques, du temps de leur jeunesse folle. Il le fit chanter : tu m’aides à m’évader ou j’te dénonce, mon z’ami ! Abderrahim, la mort dans l’âme, se résolut à se dénoncer à la police. Il couche maintenant dans une cellule de sa propre prison en attendant de passer en jugement.

Espérons que la justice tiendra compte des années où il a été son fidèle auxiliaire. Et méditons la morale de cet apologue : entre un honnête homme et un forban, il n’y a parfois que l’épaisseur d’un uniforme…

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