Malgré le M23 et les ADF, le difficile recensement des électeurs dans l’est de la RDC a démarré

La présidentielle en RDC pourra-t-elle se tenir le 20 décembre 2023 ? Les opérations d’enrôlement des électeurs dans les provinces du Nord-Kivu, de l’Ituri et du Sud-Kivu ont démarré, ce jeudi, dans des conditions très délicates, dans une région infestée de groupes armés.

À Goma, lors des opérations e recensement des électeurs. © Guerchom Ndebo / AFP

Publié le 16 février 2023 Lecture : 3 minutes.

« La qualité de la carte n’est pas bonne, mais l’important c’est d’avoir été enrôlée », commente Madeleine Matendo, une jeune habitante de Goma, rencontrée à la sortie d’un centre d’inscription dans la capitale provinciale du Nord-Kivu. Arrivée à 5 h, elle a pu repartir à 11h avec sa carte d’électeur. Ces opérations pré-électorales, appelées « enrôlement », ont commencé juste avant Noël dans la partie occidentale de la RDC et le 25 janvier dans le centre et le sud-est. L’ »aire opérationnelle 3″, qui arrive en dernier, comprend sept provinces, dont les trois de l’Est les plus affectées par les violences armées (Nord-Kivu, Ituri et Sud-Kivu).

La situation est critique dans le Nord-Kivu, où la rébellion du M23 occupe de vastes pans de territoire au nord et au nord-ouest de Goma. Depuis fin 2021, l’offensive de ce mouvement, soutenu par le Rwanda selon de nombreux experts, a provoqué le déplacement de dizaines de milliers de personnes, contraintes par les violences de quitter leurs villages, s’entassant dans des camps, des cours d’école ou d’église.

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« L’armée et la police sont mobilisées pour la sécurisation du processus électoral », a affirmé à la presse le gouverneur militaire de la province, le lieutenant-général Constant Ndima. « Tous les déplacés seront enrôlés en tenant compte de leurs milieux d’origine », a-t-il ajouté. Pour les zones sous contrôle du M23, il faudra attendre qu’elles soient « libérées ». « Nous sommes abandonnés » par la commission électorale, se lamente Rachel, une habitante de Kiwanja, localité aux mains de la rébellion depuis près de quatre mois, interrogée par téléphone depuis Goma.

« Chasser l’ennemi »

« Nous sommes congolais, nous devons être enrôlés comme les autres ! », se désespère aussi Muhoza, qui vit à Kitshanga, cité conquise en janvier par le M23. Des combats se déroulaient encore jeudi à proximité de la ville. « Nous demandons au gouvernement (…) de chasser l’ennemi, chasser le M23, afin que chaque Congolais puisse avoir sa carte d’électeur », déclare à Goma Fiston Ketha, vice-président du Forum national de la jeunesse. « Nous sommes en train de légitimer les rebelles, avec cette partie qu’ils ont déjà prise », déplore-t-il.

L’inquiétude est vive aussi dans la province voisine d’Ituri, théâtre de fréquentes attaques contre les populations civiles menées par des milices communautaires ou par les Forces démocratiques alliées (ADF), affiliées au groupe jihadiste État islamique (EI). Une attaque de village attribuée aux ADF y a encore fait cinq morts mercredi.

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John Ilongo Tokole, délégué de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) à Bunia, chef-lieu de l’Ituri, se dit « surpris de voir l’engouement » dans les centres d’inscription de la ville, « dans une région où tous les jours on parle de violences ». « Nous irons progressivement à l’intérieur de la province, avec l’objectif d’enrôler toute personne éligible », promet-il.

Les opérations d’enrôlement dans l’est du pays doivent durer jusqu’au 17 mars. Elles devaient s’achever le 23 janvier dans l’ouest, zone englobant la capitale Kinshasa, mais ont été prolongées jusqu’au 17 février, à cause d’un démarrage poussif dû à des « kits d’enrôlement » défectueux ou d’autres couacs dans l’organisation.

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Corruption d’agents de la Ceni

Des faits de corruption d’agents électoraux ont aussi été constatés, amenant la Ceni à inviter les citoyens à « dénoncer tout cas de monnayage, de corruption et de désordre dans les centres d’inscription ». Le message est passé, « mais le phénomène continue (…), au vu et au su de tous », constatait jeudi, agacée, une enseignante de Lubumbashi, grande cité minière du sud-est où l’enrôlement doit se terminer le 23 février.

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