Côte d’Ivoire : les bons comptes du « mobile banking »

Sur un marché de plus en plus mature en Côte d’Ivoire, Orange et MTN rivalisent d’idées en matière de services financiers via le téléphone portable. Un bon moyen de fidéliser leurs abonnés.

MTN estime que son service Mobile Money représentera 5% de ses revenus en 2015. © Olivier pour J.A.

MTN estime que son service Mobile Money représentera 5% de ses revenus en 2015. © Olivier pour J.A.

Julien_Clemencot

Publié le 19 avril 2012 Lecture : 3 minutes.

Quartier du Plateau, à Abidjan en Côte d’Ivoire. Le vieux centre commercial Djé Konan, dédale de box rudimentaires en béton, connaît son agitation habituelle. Au milieu des échoppes de portables d’occasion, Yolande, 30 ans, vend des puces et des recharges téléphoniques. Depuis un an, elle est aussi agréée par le service Mobile Money conçu par l’opérateur sud-africain MTN en partenariat avec Ecobank et la Société générale de banques en Côte d’Ivoire (SGBCI). « Chaque jour, une vingtaine de clients se présentent pour transférer de l’argent ou épargner via ce service », explique Yolande. « Il y a plusieurs avantages, complète Romuald, qui vient de créditer son compte virtuel pour envoyer 7 000 F CFA [10,67 euros, NDLR] à une tante. Ce n’est pas très cher [200 F CFA lors du dépôt et 800 F CFA à payer par le destinataire au moment du retrait si la somme est inférieure à 50 000 F CFA] et on trouve facilement une boutique pour retirer son argent près de chez soi. »

Dans un pays où le taux de bancarisation ne dépasse pas 8 % et où le nombre d’agences bancaires est encore limité, les services financiers offerts par les leaders de la téléphonie mobile gagnent tranquillement en popularité. MTN et le français Orange – associé à la Banque internationale pour le commerce et l’industrie de la Côte d’Ivoire (Bicici) – revendiquent chacun environ 1 million d’abonnés au mobile banking et un réseau de 1 000 points de vente répartis sur tout le territoire. Pas si mal dans « une société ivoirienne habituée, toutes classes sociales confondues, à privilégier l’argent liquide, y compris pour les envois d’argent », reconnaît Sadamoudou Kaba, responsable du projet Orange Money.

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Malgré ces réticences, les principaux opérateurs misent beaucoup sur le mobile banking. Pas encore pour constituer une véritable source de revenus, mais plutôt dans le cadre d’une stratégie de consolidation de leur clientèle (environ 6 millions d’abonnés mobile chacun). « À l’horizon 2015, cela ne représentera que 5 % de nos revenus globaux », estime Henri Legré, responsable des ventes Mobile Money chez MTN Côte d’Ivoire. En revanche, MTN comme Orange l’assurent, le mobile banking a un impact évident sur la fidélisation de leurs clients. Habitués à changer de puce téléphonique en fonction des opportunités tarifaires, les consommateurs africains convertis à ce service seraient « deux fois plus fidèles », explique Sadamoudou Kaba.

Distributeurs

Si les opérateurs ont au départ imaginé leurs services financiers pour une clientèle populaire, ils élargissent peu à peu leur palette pour conquérir des abonnés plus argentés, avides d’innovations et surtout très rentables. Orange vend, par exemple, en partenariat avec le groupe Sunu, une assurance prévoyance garantissant le paiement d’une prime de 500 000 F CFA en cas de décès. MTN devrait prochainement lui emboîter le pas.

Autre initiative, l’accord passé par l’opérateur sud-africain avec les supermarchés King Cash pour développer le paiement des courses via le système Mobile Money. La liste des nouveaux usages ne cesse de s’allonger. Le groupe agroalimentaire Sifca étudie la possibilité de payer une partie de ses salariés par ce biais, alors que des factures d’eau et d’électricité, mais aussi des inscriptions scolaires commencent à être réglées de la sorte. Sans oublier – et c’est la dernière nouveauté déployée par Orange – l’installation en ville de distributeurs automatiques de billets spécialement destinés à ses abonnés pour retirer ou déposer de l’argent sur leurs comptes Orange Money. De quoi effrayer plus que jamais, outre les concurrents encore à la traîne comme Moov, Comium ou Green, toutes les banques de la place, de plus en plus attaquées sur leur coeur de métier. 

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Julien Clémençot, envoyé spécial à Abidjan

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