Algérie : un processus électoral sous contrôle du pouvoir judiciaire

L’organisation, le contrôle et, donc, la crédibilité du processus électoral relèvent désormais du seul pouvoir judiciaire. L’opinion est à moitié rassurée.

Des électeurs algériens devant un bureau de vote de Tizi Ouzou, le 9 avril 2009. © AFP

Des électeurs algériens devant un bureau de vote de Tizi Ouzou, le 9 avril 2009. © AFP

Publié le 18 avril 2012 Lecture : 3 minutes.

Des élections pour changer l’Algérie ?
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Des élections pour changer l’Algérie ?

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L’une des principales innovations du nouveau code électoral algérien adopté en décembre 2011 est de confier l’organisation et le suivi des élections, tâches jusqu’à présent dévolues à l’administration, au seul pouvoir judiciaire. Érigés en « premiers garants » de sa transparence et de sa crédibilité, les magistrats interviennent désormais à toutes les étapes du processus électoral, via les commissions de wilaya (composées de trois magistrats) et les tribunaux administratifs : dépôt des listes, contrôle des candidatures, recours relatifs à leur éventuel rejet, prestation de serment des membres des bureaux de vote, élaboration des procès-verbaux… Ce sont aussi des magistrats qui ont présidé les commissions électorales communales lors de la révision exceptionnelle des listes. Reste à savoir si c’est une garantie suffisante pour assurer l’intégrité du scrutin.

Impartialité

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Le juriste Abdelmadjid Bencheikh répond sans hésitation par la négative. « La justice n’étant pas indépendante, les élections ne seront ni libres ni honnêtes », assure-t-il. Un propos que tempère l’avocat Miloud Brahimi, ancien président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme. « Certes, le magistrat est avant tout un fonctionnaire, mais c’est paradoxalement cette situation qui garantira la transparence de la consultation électorale. C’est le pouvoir exécutif qui, pour des raisons endogènes et exogènes, veut que le déroulement des législatives et leurs résultats soient incontestables, tant à l’intérieur du pays qu’à l’étranger. En appliquant les instructions du pouvoir, le magistrat ne sera pas dépaysé. »

La justice n’étant pas indépendante, les élections ne seront ni libres ni honnêtes.

Abdelmadjid Bencheikh, juriste

Me Miloud Brahimi relève néanmoins un dysfonctionnement. « Juge, substitut ou procureur ont tendance à percevoir le justiciable comme un ennemi. Ce n’est pas sans conséquences sur le principe cardinal de la présomption d’innocence. En réaction, le citoyen doute de l’impartialité de la justice et donc de toutes les institutions de la République. » Cela étant, les magistrats issus des générations postindépendance sont mieux formés (lire ci-dessous) et beaucoup plus libres par rapport à l’exécutif.

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Moyen

Si l’évolution de la carrière d’un magistrat dépend du bon vouloir de la chancellerie, il ne considère pas pour autant les réquisitions du parquet comme des instructions à appliquer à la lettre. La preuve en est donnée quotidiennement dans les arrêts des différentes juridictions. « Nous avons d’excellents magistrats, affirme un ténor du barreau d’Alger, mais ils ploient sous le poids de centaines de dossiers. La lenteur de l’institution judiciaire, du fait de la charge de travail des magistrats, en entame la crédibilité. »

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L’institution judiciaire aura-t-elle le temps, les moyens humains et financiers nécessaires pour assurer cette nouvelle mission ? Chacune des 48 wilayas (départements) dispose d’une cour de justice, chapeautant elle-même une dizaine de tribunaux, et le pays recense environ 4 500 magistrats. Pour la supervision des législatives, ils doivent bénéficier de l’assistance d’auxiliaires de justice afin d’être présents dans les quelque 16 000 bureaux de vote du pays. Ces auxiliaires seront-ils assez nombreux pour couvrir tout le territoire ? Réponse le 10 mai.

Double surveillance

Auparavant, la surveillance des élections était confiée à une commission mixte, composée de représentants des partis et présidée par un coordinateur désigné par le chef de l’État. Le nouveau code électoral institue deux commissions. La Commission de surveillance des élections législatives (CSEL), indépendante, ne comprend que des militants de formations politiques, qui ont élu à leur tête, le 27 février dernier, Mohamed Seddiki, membre fondateur de Ahd 54 (parti nationaliste créé en 1991 par Fawzi Rebaïne). Dotée de larges prérogatives, en particulier concernant le « contrôle des opérations électorales et de la neutralité des agents en charge de ces opérations », elle sera représentée dans les 48 wilayas et les 1 541 communes du pays.

La Commission nationale de supervision des élections est composée quant à elle de 316 magistrats désignés par le chef de l’État. Installée fin février, elle doit recevoir et traiter les recours des partis de la Commission de surveillance. Cécile Manciaux


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