Qui sont les hommes de Malik Rebrab, l’héritier de l’algérien Cevital ?
Aux commandes du groupe familial depuis le départ à la retraite de son père, Issad, en juin 2022, le patron du premier conglomérat privé d’Algérie a réussi à détendre les relations avec les autorités. Il lui reste à imprimer sa marque.
Publié le 15 mars 2023 Lecture : 5 minutes.
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500 CHAMPIONS AFRICAINS – Depuis le départ à la retraite fin juin 2022 d’Issad Rebrab, fondateur et patron historique de Cevital, son fils cadet, Malik, né en 1971, est bien le seul maître à bord. C’est lui qui assure les quelques prises de parole publiques du groupe et qui prend les décisions difficiles, comme de mettre fin à certains projets paternels restés en souffrance. Il réorganise aussi son équipe. Réputé influent sous l’ère Issad, le Franco-Algérien Mohssen Toumi, partner au sein du cabinet Oliver Wyman, semble avoir pris ses distances, alors que Djaffar Bouslimani, recruté par le père comme secrétaire général courant 2021, a quitté le navire en août 2022.
À l’inverse, une nouvelle directrice de la communication, Samira Guebli, venue de l’Assemblée nationale, a récemment rejoint Cevital. Des mouvements qui permettent à Malik, entré au sein du groupe dès 1999 et qui dirigeait son pôle industrie depuis 2010, de marquer sa différence par rapport à l’héritage paternel. Sans que l’on sache si Issad Rebrab, qui poursuit certains projets lui tenant à cœur dont EvCon, société de purification d’eau dirigée par Kamal Benkoussa et à l’origine des ennuis judiciaires du patriarche en 2019, a définitivement renoncé à toute velléité sur la destinée du groupe.
Si l’actuel PDG de Cevital est devenu le dauphin de fait – il a assuré l’intérim du père en 2019 lors de son incarcération après sa condamnation (contestée) pour infractions fiscales, bancaires et douanières – et s’il est habitué à côtoyer ses frères et sœur (Omar, Salim, Yassine et Lynda), tous membres du conseil d’administration comme le père (selon les dernières informations communiquées par le groupe en mai 2021), cela n’empêche pas les tensions au sein de la fratrie.
Les résultats décevants du projet phare de Malik, une usine Brandt à Sétif qui a nécessité un investissement de 400 millions d’euros, génèrent frustration et ressentiment chez ses proches alors que le groupe, qui compte 26 filiales, vit grâce à son pôle agroalimentaire (sucre et huile), assurant 80 % de son chiffre d’affaires estimé à 300 milliards de dinars pour 2022.
Privé du statut d’héritier malgré sa position d’aîné, Omar peine à relancer les activités automobiles – autrefois florissantes – tout en s’activant dans l’immobilier. Un temps à la tête de Numidis (grande distribution), Salim, qui a pris du champ en s’installant à Londres, et Lynda restent impliqués dans les activités du groupe notamment via Isla Mondial, société française spécialisée dans la charcuterie halal. Quant au benjamin Yassine, qui multiplie les projets personnels ces dernières années dans divers secteurs, il est le seul à se tenir à l’écart des jeux de pouvoir qui agitent le groupe.
Mehdi Adam Iskounen
« Il a travaillé au port de Béjaïa, où il a rencontré Issad Rebrab, qui l’a enrôlé », raconte un bon connaisseur du groupe. Salué pour sa capacité de travail et son sens de l’opérationnel, Mehdi Adam Iskounen est devenu conseiller d’Issad Rebrab sur les projets à l’international.
Vivant aux États-Unis, où il a fondé Entami Corporation, il pilote désormais Cevital International Dubaï, la filiale du groupe aux Émirats arabes unis. Alors que le groupe a récemment été autorisé par les autorités algériennes à reprendre ses exportations (suspendues depuis mars 2022 au nom de la préservation de la sécurité alimentaire), Iskounen aurait joué un rôle clé dans la livraison début 2023 de 18 000 tonnes de sucre à la Mauritanie.
Mustapha Youkenane
Cet ingénieur de l’université de Béjaïa, qui a complété sa formation par un MBA à HEC Montréal, a fait toute sa carrière au sein de Cevital, à l’exception d’une courte expérience entre 2016 et 2019 chez Danone Algérie en tant que directeur d’usine.
Il a gravi les échelons jusqu’à devenir directeur industriel du complexe de Béjaïa, centre névralgique de la production du groupe qui revendique la plus grande raffinerie de sucre au monde (capacité de production de 2 millions de tonnes par an), la plus importante raffinerie d’huile du continent (570 000 tonnes annuelles), et qui doit accueillir le projet de longue date d’une usine de trituration de graines oléagineuses. Une illustration de la relation de confiance existant entre lui et le PDG.
Hamid Chader
Ancien de Lidl (durant huit ans) et du groupe Dia (pendant onze ans), il a rejoint Cevital en 2012 comme directeur général de Numilog, la filiale logistique et transport du groupe en Algérie, avant d’être promu deux ans plus tard, en 2014, directeur général de la division services et logistique de l’ensemble du groupe (Numilog et CTLOG en France). Également impliqué dans la gestion d’autres entités en Europe, il demeure, malgré sa discrétion, un rouage clé de Cevital.
Abdelkader Guemache
Entré chez Cevital en 2007 à Béjaïa comme directeur des finances et de la compatibilité, il fait aujourd’hui figure d’ancien. Désormais à la tête des activités agroalimentaires, il supervise la production en mettant l’accent sur la qualité, tout en faisant du lobbying pour que la levée des restrictions sur les exportations prononcée par les autorités algériennes concerne aussi le marché européen et pas seulement les pays arabes et africains.
Farid Amellal et Ahmed Malek
Ce sont les deux nouveaux directeurs généraux adjoints du groupe. Tous deux arrivés juste après le retrait du père et tous deux anciens banquiers. Passé par Société générale et ancien de BNP Paribas (durant 11 ans), Farid Amellal est aussi le frère de Mourad Amellal, l’un des dirigeants de Menara Capital, société basée à Paris et Londres qui opère dans le conseil en dette privée et a notamment arrangé un financement pour Brandt (repris par Cevital) en 2019.
Fils de l’ancien premier ministre Redha Malek et frère de Mohamed Chérif Malek, le mari de Lynda Rebrab, Ahmed Malek était précédemment directeur général adjoint de Natixis Algérie, où il était entré en 2013. Le profil financier des deux DGA, dont Cevital devrait tirer profit, n’offre cependant pas la garantie d’une intégration réussie au sein d’un groupe familial aux dynamiques complexes.
Thierry Ballard
Recommandé au fondateur de Cevital par Grant Thornton Algérie, dirigé par Rafik Boussa, le neveu d’Issad et cousin de Malik, cet ancien de Bolloré, qui a passé presque trente ans en son sein dont huit comme directeur financier de Bolloré Africa Logistics, a rejoint le groupe algérien en 2018 comme DGA en charge des finances. S’il semblait y avoir trouvé sa place, la situation s’est compliquée plus récemment, même s’il demeure en responsabilité au sein du groupe qui emploie 18 000 personnes.