Christian Ngardoum : « L’État tchadien ne peut pas tout faire seul »

Le pays a des ressources et de la main-d’oeuvre, mais ne produit pas assez et emploie peu… Tel est le constat dressé par le directeur national de la Banque des Etats de l’Afrique centrale, qui fait appel aux investisseurs privés.

A 45 ans, l’économiste Christian Ngardoum est aussi conseiller du chef de l’État. © Abdoulaye Barry/J.A.

A 45 ans, l’économiste Christian Ngardoum est aussi conseiller du chef de l’État. © Abdoulaye Barry/J.A.

Publié le 6 avril 2012 Lecture : 3 minutes.

Tchad : après la tempête, s’ouvrir au monde
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Tchad : après la tempête, s’ouvrir au monde

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Sous l’autorité du ministère des Finances tchadien, Christian Ngardoum, 45 ans, est le conseiller en matière économique et financière du chef de l’État et du gouvernement. Ancien cadre au siège de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac) à Yaoundé (direction des ressources humaines), l’économiste est en poste au Tchad depuis juillet 2008.

Jeune Afrique : Les réserves de change à la Beac sont-elles confortables ?

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Christian Ngardoum : Tout à fait, du point de vue du Tchad comme de la sous-région. En moyenne, environ 1 000 milliards de F CFA [1,5 milliard d’euros, NDLR] de devises entrent annuellement à la Beac. Pour les six pays de la Cemac [Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale], les réserves de change sont de 7 000 milliards de F CFA.

Que dire de la gestion des recettes de l’État tchadien ?

Même si des efforts restent à faire en matière de suivi budgétaire, les recettes de l’État sont gérées en toute transparence. Celles issues des revenus pétroliers, qui passent d’abord par la Beac, sont ensuite convenablement utilisées dans le cadre des conventions qui ont été signées entre l’État et la banque. Concernant les recettes fiscales et douanières, les prévisions budgétaires ont toujours été dépassées ces trois dernières années.

L’État effectue d’importants investissements, notamment dans les infrastructures…

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En effet, et aussi bien à N’Djamena qu’en province. Cela a un coût, mais ces investissements sont incontournables si l’on veut amorcer un développement. Ils constituent des facteurs de croissance. C’est en ce sens que les agents économiques, notamment ceux du secteur privé, doivent accroître leur participation ; car l’État, s’il fixe les conditions, ne peut pas tout faire seul.

Quelles sont les difficultés rencontrées par l’agriculture et l’agroalimentaire, secteurs traditionnellement porteurs, et quelles sont les perspectives ?

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Le Tchad n’a pas de structures de production des biens de consommation de première nécessité. Ce qui est vendu sur les marchés est produit de manière plus ou moins artisanale, puisque nous n’avons ni grandes étendues ni agriculteurs professionnels. Par conséquent, l’offre de biens et de services de première nécessité ne cadre pas avec la demande, ce qui entraîne un renchérissement des coûts et donc l’inflation.

L’année 2010 a été favorable, grâce à la très bonne pluviométrie, qui nous a apporté une hausse du PIB de plus de 13 %. Malheureusement, les estimations pour 2011 et 2012 sont nettement en retrait, autour de 4 %. La croissance record à deux chiffres de 2010 est par ailleurs due à un phénomène de rattrapage, car nous avons enregistré un recul du PIB en 2009, à la suite de la crise financière internationale. L’État a ainsi été contraint de freiner ses investissements.

Quels sont les obstacles au développement de l’économie tchadienne ?

L’offre de production et l’emploi sont les deux principaux points faibles. Dans un pays où l’on a des ressources, des espaces et de la main-d’oeuvre, c’est tout à fait paradoxal que l’on n’arrive pas à produire suffisamment. Il faut faire en sorte de produire en quantité suffisante et à bon marché. L’économie tchadienne ferait par ailleurs un grand bond en avant si l’on essayait de résoudre le problème de l’emploi par l’intéressement au travail et à la terre.

Il faut aussi développer d’autres secteurs porteurs, comme les services, la fibre optique ou le tourisme. Ensuite, il faudrait bien sûr que les structures sanitaires soient au point, de manière à pouvoir apporter les soins nécessaires à la population. Enfin, l’éducation doit être prise en main, afin d’assurer une formation aux cadres de demain. 

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Propos recueillis par Justine Spiegel

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